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Rachid Ksentini : un homme de théâtre au parcours mouvementé

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Rachid Ksentini, de son vrai nom Rachid Belakhdar, est né le 11 novembre 1887 à la Casbah d’Alger. Chansonnier et homme de théâtre algérien, il quitte très tôt l’école pour travailler comme apprenti ébéniste auprès de son père à Bab El Oued jusqu’en 1914.

À la veille de la Première Guerre mondiale, il s’engage comme matelot dans la marine marchande et part en France. Le bateau où il embarque est torpillé par les forces navales allemandes. Les rescapés ont été repêchés par la marine anglaise qui les transfère ensuite à Marseille. De par son métier de matelot, il connut l’Europe, l’Amérique du Nord, la Chine et l’Inde. Il revient en Algérie mais pour un bref séjour puis repart en France. En 1925, il effectue son retour au pays et croise la même année dans un café, Sellali Ali, dit Allalou, qui lui propose d’intégrer sa troupe théâtrale Ezzahia. Leur collaboration se traduit entre autres par la présentation de la pièce Zaouadj Bouaklin, le 26 octobre 1926. Après qui marque la 17ème apparition de Rachid Ksentini sur les planches. Une prestation qui a subjugué le public. La collaboration des deux hommes se poursuit avec des adaptations par Allalou des séquences des Mille et Une Nuits où Rachid Ksentini obtient les premiers rôles. Avec Allalou, il était le promoteur du mouvement théâtral algérien dans les années 20 et 30. En 1927, ce dernier crée avec Djelloul Bachedjerrah la troupe El Djazaïr, dissoute peu de temps après. Certes, Rachid Ksentini s’est imposé surtout dans le théâtre. Mais, il s’est investi en parallèle dans la chanson humoristique à fond social. Grâce à son talent et à son génie, il sut comment mettre en scène et interpréter ce qui préoccupait les gens simples de son peuple écrasé par la domination du colonialisme le plus brutal de l’histoire humaine. Parce qu’il sut être un comédien complet, un comédien populaire, on l’appelait « Le Charlot arabe ». En 1909, il épouse sa cousine. Il va simuler la folie et passer trois mois à l’hôpital psychiatrique de Blida pour pouvoir obtenir le divorce. La perte de ses deux petites filles, mortes l’une et l’autre à deux ans, son caractère impétueux et sa vitalité juvénile ainsi que sa passion des voyages font qu’il va sillonner les mers du monde. Il se trouve à Malte et à Marseille pour une période d’une année. En rentrant à Alger, il trouve son nouveau-né, un garçon âgé de quatre mois. Mais dès 1919, sa passion des voyages le reprend. Exerçant plusieurs métiers, il alla même jusqu’à traîner les touristes étrangers dans les quartiers de Canton, en Chine, avec un Pousse-pousse. En France, il travaille un certain temps en Normandie. C’est là qu’il va se marier avec Marguerite Sevigné. Il emmène sa femme à Paris où il travaillera aux ateliers d’ébénisterie aux galeries Lafayette et fréquente les théâtres parisiens où il est engagé comme figurant. Après six années de vie sédentaire à Paris, il retourne à Alger accompagné de sa femme Marguerite, en 1926. Ce retour coïncide avec la première représentation d’une pièce théâtrale en arabe dialectal, « Djeha » d’Allalou et de Brahim Dahmoun, jouée le 12 avril 1926 au Kursaal, à Alger. Rachid Ksentni travaillait dans une menuiserie à Bab El Oued. Il allait faire ses débuts dans la Zahia-troupe d’Allalou dans une pièce appelée Zwadj Bou Aklin. Enivré par son succès, Rachid Ksentini voulait donner des représentations de ses propres créations dans une salle de la rue de la Lyre. Sa pièce El Ahed El Wafi ne remporte pas un grand succès, vu qu’il avait également éliminé le programme musical qui précédait toute représentation théâtrale à l’époque.
Il revint travailler sous l’égide de la société de musique El Moutribia., dirigée par Mahieddine Bachetarzi. En 1928, il écrivit une pièce qui allait avoir un grand succès Zwadj Bou Borma ou la Folie de Bou Borma. Dès cette époque, il connaîtra une jeune comédienne, Marie Soussan, qui devint sa compagne et sa partenaire sur scène. Ils formèrent un couple artistique jusqu’en 1934. Les sketches qu’ils jouèrent ensemble eurent beaucoup de succès. Après avoir abandonné le théâtre, il tente, sur le conseil d’Allalou, l’expérience de la chanson burlesque où il excella et réussit à écrire plus de douze chansons par jour. Son répertoire dans ce genre compterait environ 600 chansons dont une centaine est enregistrée sur disques. Instable, il l’était aussi bien dans sa vie privée que dans sa vie professionnelle. Marié et divorcé, matelot et menuisier, il a vécu diverses situations, parcouru de nombreux pays et exercé de nombreux métiers. Toutefois, une chose l’intéresse vraiment : son art. Il ne quitte jamais le chant et le Sketch. Son humour est incisif et ses critiques portent toujours.
Il fouette les charlatans de la rue de la Lyre, malmène les nouveaux conseillers municipaux, s’insurge contre les traditions rétrogrades, dénonce les fléaux sociaux, comme l’alcoolisme, parle du chômage qui frappe en premier les Algériens et évoque « le Bateau Blanc » (Al Babor Al Biad) qui accoste chaque mois à la baie d’Alger et qui reste pour le peuple algérien le symbole de la répression coloniale, de l’exil forcé.
Si le théâtre de Ksentini est populaire, son chant est douloureux malgré l’humour qui lui sert d’enveloppe ou bien justement à cause de cet humour-là. Après un parcours mouvementé, il meurt le 4 juillet 1944 à Alger.

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