Accueil ACTUALITÉ Procès Sonatrach 1 : la partie civile désavoue l’alibi de «l’urgence»

Procès Sonatrach 1 : la partie civile désavoue l’alibi de «l’urgence»

0

C’est une véritable course contre la montre que celle menée par le tribunal criminel près la Cour d’Alger, en vue d’élucider les dessous et les non-dits dans l’affaire dite Sonatrach 1, ayant défrayé la chronique judiciaire depuis plusieurs années déjà. L’audition de la partie civile (Sonatrach) a pris fin, hier, en attendant que le juge ne soit à l’écoute, à partir d’aujourd’hui, de la version des témoins.

Le procès Sonatrach 1 a repris, hier, en écoutant la partie civile composée de Sonatrach. Tôt dans la matinée, le juge Mohamed Reggad commence l’audition de Mohamed Rachid Ben Ali, directeur juridique au sein de la Sonatrach. Celui-ci commence, suite de la demande du juge, par une présentation de l’organigramme du groupe Sonatrach, et ce, pour comprendre les prorogatives du P-DG Mohamed Meziane et des vices présidents de celui-ci, sans oublier leurs relations avec l’ex-ministre de l’Energie, Chakib Khelil. Afin de mieux comprendre le pouvoir de dérogation attribué aux vices-présidents de Mohamed Meziane, le directeur juridique au sein de la Sonatrach a rappelé à l’instance que c’est la direction qui signe les contrats qui doit assumer toutes les responsabilités. Néanmoins, il dira que la direction juridique n’a, en aucun cas, été consultée dans l’élaboration des contrats, que ce soit pour le projet de GK3 ou le marché de la télésurveillance, ou encore, celui de la rénovation du siège de Ghermoul. Aussi, il est évident que l’évaluation du préjudice causé à Sonatrach par le scandale qui a éclaboussé ses plus hauts cadres dirigeants n’a toujours pas été établie, selon les dires de Mohamed Rachid Ben Ali.

Passation des marchés à Sonatrach : la directive R15 passée au peigne fin
La violation de la directive de Sonatrach R15 qui considère la passation de marchés à travers le recours aux appels d’offre comme principe fondamental et que la consultation limitée et le gré à gré simple sont des procédures exceptionnelles, a eu la part belle de l’audition. S’interrogeant sur les raisons d’élaboration de la directive, considérée par le juge, Mohamed Reggad par une loi, qui porte plus de 40 articles, et non une directive, le représentant juridique dira que celle-ci a été établie en vue de faciliter l’application du code de passation des marchés au sein de la première compagnie pétrolière du pays. Il dira, entre autres, que celle-ci vise à adapter les procédures existantes aux lois de la République, notamment le code des marchés publics, et ce, en tenant compte des spécificités des activités de chaque filiale du groupe, en vue d’assurer davantage de transparence et d’équité dans l’attribution des marchés. De surcroît, le représentant de la partie civile composée de la Sonatrach, a indiqué que le recours au gré à gré est choisi selon les conditions et la nature du projet. Pour ce qui est du contrat de réalisation du GK3 par Saipem, le responsable explique : «Ce projet a été réparti en trois phases, deux octroyées à l’égyptienne Petrojet pour 21,518 milliards de dinars et la troisième à Saipem pour 42,955 milliards de dinars. La comparaison entre les différentes phases a fait ressortir un écart de 25,262 milliards de dinars». Cependant, au sujet de la nature de l’urgence qui a poussé au recours au gré à gré, le représentant de la partie civile a commencé à répondre aux questions avec une «langue de bois ». En effet, toutes ses réponses se résumaient à l’expression «je ne suis pas en habilité de vous répondre», ce qui a irrité la défense des prévenus. Suite à ça, le juge ordonne à Mohamed Rachid Ben Ali de répondre en sa qualité de directeur juridique.
Ainsi, après quelques instants de tension, Mohamed Rachid Ben Ali a essayé de convaincre l’instance qu’il n’ y a pas de règle précise pour définir l’urgence. Notamment, l’enquête avait révélé qu’un des fils de Mohamed Meziane travaillait comme conseiller, depuis 2006, auprès du patron de Saipem Algérie, Tullio Orsi. à cet égard, le conseiller juridique dira qu’il n’était pas au courant du fait que le fils du P-DG occupait ce poste. D’autre part, pour ce qui est des cinq marchés frauduleux d’une valeur de 1100 milliards de centimes accordés par l’ex-P-DG de Sonatrach au groupe allemand Contel Algérie Funkwerk Pletarc dans le cadre d’un projet d’acquisition d’équipements de télésurveillance et de protection électronique des complexes du groupe national à travers le pays, le représentant de la partie civile signalera : «Eu égard au manque parmi les cadres de Sonatrach d’experts en télésurveillance et en protection électronique, il est difficile pour nous d’évaluer le préjudice financier engendré par les marchés accordés à Contel-Funkwerk.». Dans le même sillage, il a affirmé que «la majorité des contrats de télésurveillance et le GK3 n’ont pas respecté les procédures juridiques énoncées dans l’instruction Sonatrach A408 R15». De plus, il a ajouté que la A408 R15 qui est une directive entrée en vigueur en 2004, est une instruction interne à Sonatrach, en expliquant que celui-ci n’est pas soumise au Code des marchés publics». à propos de la rénovation de l’immeuble Ghermoul, il rappelle que le marché a connu deux étapes. La première, relative à l’étude technique, a été affectée au bureau CAD et la seconde, ayant trait à la réalisation des travaux, a été confiée à la société allemande Imtech (en vertu d’un contrat résilié avant le début des travaux). «L’étude comparative entre les prix de CAD et ceux d’un bureau d’études de Sonatrach GCB a montré qu’il y a une différence entre les deux. En effet, contrairement à ce qui a été mentionné auparavant, le représentant juridique dira que l’offre du bureau CAD a été de l’ordre de 45 millions de DA, contre, 63 millions de la part de CGB, qui faut le rappeler, est une filiale de Sonatrach. «Cependant, CAD n’a pas respecté ses engagements puisqu’il n’a réalisé que 50% des travaux, ce qui a engendré un préjudice que la compagnie n’a pu estimer.», affirme-t-il. En réponse à une question posée par le juge Mohamed Reggad, quant aux prix élevés des chefs des ouvrages, il a déclaré que les commissions compétentes ont évalué et confirmé dans leurs rapports que les prix poursuivis par les entreprises allemandes et italiennes étaient «élevés». Au sujet des prérogatives de l’ex ministre de l’Energie, Chakib Khelil, il dira qu’en «régle générale le P-DG et les vices présidents exécutent les ordres du ministre de l’état sans les remettre en cause». «Parfois il y a des considérations qu’on ne connaît pas, mais personne n’est en mesure de remettre en cause les décisions du ministre».
Lamia Boufassa

Article précédentCoopération algéro-allemande : l’investissement productif en ligne de mire
Article suivantSaeb Erekat, secrétaire général du comité exécutif de l’OLP : «l’entité sioniste impose un régime d’apartheid aux Palestiniens»