Les derniers développements survenus sur la scène libyenne, principalement la déroute du général à la retraite Khalifa Haftar qui, dans son offensive militaire, pour la conquête de la capitale libyenne, Tripoli, entamée, avril 2019, ses troupes de l’armée nationale libyenne viennent d’enregistrer des défaites militaires, après avoir enregistré des avancées, notamment à Tripoli
et ses environs.
La déroute en question marque le début d’une nouvelle étape, sur la scène libyenne ainsi que l’entrée en force du rôle des États-Unis, jusque-là plus discrets, préférant coordonner et jouer son rôle, sur les deux fronts, à travers ses alliés membres de l’Otan, la Turquie et la France, pour ne citer qu’eux, en dépit des divergences persistantes, non pesantes et importantes, au regard de leurs divergences qu’ils ont avec ses rivaux, sur la scène internationale, la Russie et la Chine.
Au moment où ces derniers jours la scène libyenne enregistre une accélération sur le cours des évènements sur le terrain, avec les échecs militaires de Khalifa Haftar, alors soutenu par la France, membre de l’Otan et la Russie, les avancées des troupes militaires du gouvernement d’union national (GNA) de Fayez Serradj, dont principalement la non perte de leur contrôle de la Capitale libyenne, rendu possible, avec l’entrée sur la scène libyenne de la Turquie, avec l’envoi de ses militaires, en Libye en soutien au GNA, le pays semble se diriger vers une nouvelle étape, encore plus complexe. Ne dit-on pas que l’action militaire est l’expression du politique dans sa forme la plus violente. Les acteurs libyens influents sur la scène libyenne ne s’étant pas inscrits sur la voie éminemment politique pour sortir le pays du chaos, dans lequel il a été plongé, avec la précipitation de l’intervention militaire étrangère, via l’Otan, dès 2011, les objectifs et les conséquences de l’action de l’Otan, continuent de rythmer l’actualité dans ce pays, à ce jour. Après la tenue de la Conférence de Berlin, janvier dernier, sur la Libye, dont l’objectif principal était de faire taire les armes pour que les libyens puissent entamer la phase du dialogue inter-libyen, pour dépasser leurs divergences et tracer la voie pour que le pays renoue avec la vie politico-institutionnelle, les efforts pour y parvenir, dont ceux d’acteurs occidentaux, n’ont pas suivis.
La Libye otage des soutiens militaires d’acteurs étrangers
Le soutien politique et militaire des deux camps s’est poursuivi, jusqu’à accentuer davantage le conflit armé, jusqu’à voir se manifester amplement de nouveaux soutiens militaire à l’un des deux camps, comme ce fut le cas pour la Turquie, envoyant sur le sol libyen, ses soldats. Dans un monde globalisé, les régions et les zones de conflits devenus, notamment ces dix dernières années, l’espace dans lequel la maîtrise du degré de la violence armée, pour mieux négocier, se replacer et pouvoir jouer sur l’échiquier mondial, dans un monde en plein mutations profondes dans les rapports des relations internationales, avec la fin d’un monde unipolaire, que dirigeait jusque-là la première puissance, les États-Unis, la scène libyenne est un des théâtres où se joue cette bataille mondiale.
Si dans un passé récent, et à ce jour, nombreux sont les responsables régionaux, dont des pays voisins à la Libye, à l’instar de l’Algérie, ceux de l’Union africaine (UA) ou de l’Institution onusienne avertissant sur les conséquences du retour des milliers de terroristes, en défaite dans des zones de conflits, dont la Syrie et l’Irak, vers la Libye, les ingérences et les interférences de pays occidentaux en Libye ont rendus difficile, voire impossible la mise en application du processus politique dans ce pays, en raison de leurs intérêts respectifs. Le chaos libyen offrant un terrain propice aux groupes terroristes, avec l’insécurité, l’instabilité, les tensions armées, la circulation de plus de 22 millions d’armes dans ce pays, selon des rapports de l’ONU, la Libye semble s’acheminer vers une nouvelle étape, celle d’un nouveau théâtre d’affrontement entre des acteurs puissants, dont leur lutte contre le terrorisme s’est et se révèle un prétexte pour déployer leurs troupes militaires, dans des pays et régions, non sous la casquette de l’ONU, ou en réponse à une demande exprimée souverainement par des gouvernements de pays. Avec la sortie politico-médiatique des États-Unis, notamment par des déclarations de hauts responsables militaires, sur la situation en cours, sur le terrain libyen, alors qu’on entendait à peine alors que tout le monde s’exprimaient sur le dossier libyen, semble un autre indicateur annonciateur de la nouvelle étape de la crise libyenne. Dans un communiqué du commandement des États-Unis pour l’Afrique (Africom), il est indiqué qu’ «alors que la Russie continue d’attiser les flammes du conflit libyen » allusion à son soutien militaire à Khalifa Haftar, Africom affirme que «la sécurité régionale en Afrique du Nord est une préoccupation accrue » pour les États-Unis.
En réaction aux accusations des États-Unis, Moscou affirme de son côté que Washington vise à renforcer sa présence militaire, citant entre autres, le continent africain, le Moyen-Orient et l’Afrique. La porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères, Maria Zakharova a déclaré, en effet, jeudi dernier, que «Nous avons remarqué que Washington ne cesse de diffuser des informations sur des actions russes à caractère militaire, lesquelles représenteraient une menace pour la sécurité de l’Afrique du Nord », les États-Unis, poursuit-elle « le font depuis longtemps de manière sporadique » a indiqué Maria Zakharova. Poursuivant, elle dira qu’ « on assiste actuellement à une nouvelle flambée, sans en voir d’exemples, de faits ou d’informations concrètes » affirme la responsable russe, précisant que «les Américains ne prennent pas la peine de fournir des faits» indique-t-elle.
« Nous n’avons pas déclenché cette guerre, mais c’est nous qui allons déterminer l’heure et le lieu de sa fin ».
Sur un autre plan, lors de la rencontre du vice-président du GNA, Ahmed Maïtig, à Moscou, la semaine passée, avec le chef de la diplomatie Russe, Sergueï Lavrov, Moscou a appelé les acteurs libyens en conflit, à se mettre « le plus vite possible autour de la table des négociations ».
De son côté, le président du parlement libyen, Aquila Saleh et Khalifa Haftar se sont réunis avec le président égyptien, Abdel-Fatah Es-Sissi. À l’annonce lors de la conférence de presse conjointe tenue par le président égyptien, le chef de l’’Armée nationale libyenne, Khalifa Haftar et le président du Parlement libyen, Aquila Saleh, au Caire, portant sur un appel à un cessez-le-feu, devant entrer en vigueur demain lundi, ainsi que sur la teneur des articles portant sur le processus politique à entreprendre pour sortir de la crise libyenne, la réponse ne s’est pas fait attendre du GNA. Commentant l’annonce du Caire, d’une nouvelle initiative pour résoudre la crise libyenne, les forces du GNA, soutenu par la Turquie, ont souligné, en effet, via Le porte-parole du gouvernement d’Union, Mohamed Kanounou, que « nous n’avons pas déclenché cette guerre, mais c’est nous qui allons déterminer l’heure et le lieu de sa fin ».
Karima Bennour