Le long-métrage consacré à l’enquête des journalistes du Golden Globe sur les abus sexuels dans l’église catholique a été sacré meilleur film, au détriment du favori The Revenant. L’épopée survivaliste d’Inarritu repart quand même avec trois trophées, dont celui du meilleur acteur pour Leonardo DiCaprio et du meilleur réalisateur.
Spotlight, The Revenant, Mad Max: Fury Road sont les trois gagnants des 88e Oscars qui ont eu lieu dimanche, à Los Angeles. Couronné en début de soirée de l’Oscar du meilleur scénario original, Spotlight, qui raconte l’enquête des journalistes du Boston Globe sur les prêtres catholiques pédophiles, a créé la surprise en repartant avec la récompense reine de meilleur film, au détriment de The Revenant, favori des pronostics. Mais, le triomphe de Leonardo DiCaprio a bien eu lieu. La star, qui a gagné tous les prix possibles et imaginables cette saison, a remporté le trophée du meilleur acteur pour sa performance ahurissante et physique dans l’épopée survivaliste d’Alejandro Inarritu.
La nuit a été riche en trophées pour cette fresque, au tournage dantesque, sur le calvaire et la vengeance du trappeur Hugh Glass dans les États-Unis enneigés du XIXe siècle. Le cinéaste mexicain est devenu le troisième réalisateur de l’histoire des Oscars à décrocher deux fois de suite l’Oscar du meilleur réalisateur, après son triomphe l’an passé dans Birdman. Alejandro Inarritu, qui avait reçu le prix annonciateur du syndicat des réalisateurs au début du mois, rejoint au panthéon du septième art John Ford et Joseph Mankiewicz, seuls à avoir accompli un exploit similaire…. dans les années 40-50. The Revenant a aussi empoché l’Oscar de la meilleure photo.
Dans une cérémonie marquée par la polémique sur le manque de diversité, Alejandro Inarritu a eu des mots très forts: «Quelqu’un dit dans le film ‘Ils ne t’écoutent pas quand ils voient la couleur de ta peau’. Quelle immense opportunité donc pour notre génération de se libérer véritablement de tous les préjugés et de cette façon de penser et de s’assurer enfin et pour toujours que la couleur de la peau devienne aussi peu importante que la longueur de nos cheveux».
Éviter deux doublés historiques pour Inarritu?
Faut-il voir dans ce doublé d’Innaritu une des raisons de la victoire de Spotlight? Aucune œuvre d’un même réalisateur n’a gagné l’Oscar du meilleur film deux ans de suite. Honorer Spotlight, c’est veiller à un palmarès équilibré et distinguer un film engagé qui offre une tribune aux victimes. L’équipe du thriller ne s’y est pas trompée: «Spotlight donne une voix à tous les survivants [des abus de l’Église]. Avec cet Oscar, ils disposent d’un mégaphone qui ira directement jusqu’au Vatican. Pape François, il faut protéger les enfants. Nous ne serions pas ici sans le travail des journalistes qui montrent le besoin de reportage». Signe avant-coureur, Spotlight avait reçu le prix du syndicat des acteurs de la meilleure distribution et avait fait une razzia, samedi, aux Independent spirit awards. Toutefois bon nombre de spécialistes avaient plutôt tablé sur un Oscar du meilleur film décerné à un challenger, comme The big short: le casse du siècle qui se contente d’une statuette de la meilleure adaptation
Ceci dit, au nombre de trophées remportés, c’est Mad Max : Fury Road qui fait la course en tête de cette édition, avec six statuettes décrochées dans les catégories techniques. Cette hégémonie qui fait figure de lot de consolation prive Star Wars: Le Réveil de la force d’une victoire. Tout comme lui, Brooklyn et le beau mélodrame Carol repartent bredouille.
Sylvester Stallone snobé
Autre surprise de la soirée, l’Oscar du meilleur second rôle masculin est allé non pas au favori du public, Sylvester Stallone, qui faisait un come back remarqué dans Creed: l’héritage de Rocky Balboa , mais au Britannique Mark Rylance, taupe flegmatique dans le Pont des espions, de Steven Spielberg.
Chez les femmes, pas d’imprévu. Mère courage et séquestrée dans Room Brie Larson qui avait raflé, à 26 ans à peine, toutes les récompenses intermédiaires (Golden Globes, prix syndicat des acteurs) est repartie avec le trophée de la meilleure actrice, tandis qu’Alicia Vikander, épouse dévouée dans The Danish girl, a été couronnée meilleur second rôle féminin, battant Kate Winslet.
L’Oscar du meilleur film étranger a échappé à la France. Mustang, le candidat tricolore, s’est incliné face au Fils de Saul du réalisateur hongrois Laszlo Nemes.
Côte musique, personne n’a vu venir la victoire de Sam Smith pour le très moyen Writing’s on the wall de Spectre. Le chanteur a dédié son Oscar de la meilleure chanson à la communauté LGBT, à laquelle il est «fier» d’appartenir. Une des plus intenses salves d’applaudissements a également été donnée au compositeur italien légendaire Ennio Morricone, récompensé pour sa bande-originale des Huit salopards, de Quentin Tarantino. Gentleman, le lauréat a rendu hommage à son ami et rival John Williams qui en était grâce à Star Wars à sa cinquantième nomination.