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Obama à la jeunesse kenyane : «vous pouvez vivre votre rêve, ici et maintenant»

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Économie, terrorisme, droits de l’homme… Obama a réussi à séduire son auditoire, pour la première visite d’un président américain au Kenya. Il était déjà l’enfant du pays, « l’un des nôtres » pour les Kenyans. Après une visite de trois jours et trois quarts d’heure de discours à Nairobi, Obama est définitivement devenu l’idole des jeunes. « Il n’y a aucune limite à ce que vous pouvez accomplir », leur a-t-il assuré, sous les applaudissements. « I love you ! » a crié un spectateur, « I love you back », a-t-il répondu, showman imperturbable. Lorsqu’il est arrivé dans le Moi International Sports Centre, un stade couvert, 5 000 chanceux l’attendaient, triés sur le volet. Écoliers, étudiants, représentants religieux et membres de la société civile avaient commencé à se rassembler dès 7 heures du matin, dans la fraîcheur matinale de l’hiver. « J’espère qu’il va parler de la jeunesse, disait Paul Tiberius, 21 ans, étudiant en technologies de l’information, avant d’entrer. Quand il dit qu’il va combattre les shebabs, ce n’est pas très convaincant. Ce qu’il faut, c’est s’attaquer aux causes du terrorisme : le manque de débouchés pour les jeunes. »
Paul n’a pas dû être déçu : Obama s’est longuement adressé à lui et à ses contemporains, insistant sur les perspectives économiques du pays et du continent. « Le Kenya est en plein développement, l’Afrique est en plein développement et vous (les jeunes), vous êtes destinés à jouer un plus grand rôle », a-t-il assuré. Toute son intervention, introduite par sa demi-sœur Auma Obama, mêlait habilement considérations politiques et économiques actuelles, plaisanteries (« Quand je suis venu la première fois, British Airways avait perdu mes bagages. Ça n’arrive pas trop avec Air Force One ») et anecdotes tirées de son histoire personnelle : « Vous n’avez pas à travailler pour un colon comme mon grand-père ou à quitter le pays comme mon père… Grâce aux progrès du Kenya, grâce à votre potentiel, vous pouvez construire un meilleur avenir, ici et maintenant ! »

Un numéro d’équilibriste
Un numéro d’équilibriste dans lequel le président des États-Unis a glissé des leçons de démocratie, mais aussi des compliments sur les progrès accomplis. Si l’exercice était réussi, c’est qu’Obama est vu ici comme un enfant du pays. Mais aussi que, comme il le montrait dans son livre Les Rêves de mon père, écrit en 2007, où il évoquait notamment sa première visite à Nairobi, en 1987, il sait faire preuve d’une réelle sensibilité aux problèmes du continent. Jusqu’à présent, il avait déçu les espoirs de l’Afrique, mais cette première visite d’un président américain au Kenya prouve qu’il ne l’avait pas totalement oubliée. Pour autant, Obama a souligné les faiblesses qui, selon lui, minent encore le pays : la corruption, la discrimination envers les femmes et les luttes tribales. « Quand j’ai entendu ça, ça m’a fait prendre conscience que nous étions vraiment en retard, reconnaît Thadins Rajwahyi, président de l’assemblée du comté de Mombasa. L’Afrique est encore loin du compte, nous avons un sérieux problème de gouvernance. » La première faiblesse est l’un des freins majeurs au développement, pour un pays classé 145e sur 175 par l’ONG Transparency International (la France est 26e). « Trop souvent, on tolère la corruption parce qu’on a toujours fait comme ça, a constaté Obama. Ici, au Kenya, il est temps que cela change ! » De même que l’accès limité des filles à l’éducation, notamment dans le centre du pays, ou l’excision : « Ce ne sont pas de bonnes traditions, a-t-il martelé, le Kenya ne réussira pas s’il traite les femmes comme des citoyens de seconde zone. » Enfin, il a insisté sur les divisions ethniques : « Toute politique fondée seulement sur la tribu et l’ethnie est une politique qui ne peut que déchirer un pays. » Ces sentences parfois un peu didactiques ont pourtant été acceptées avec un enthousiasme bruyant.

«Nous resterons à vos côtés dans cette lutte contre le terrorisme»
« C’était merveilleux, cela m’a remotivé, témoignait Kitheka Mundymwiy, étudiant en agrobusiness. Il nous a montré que nous avions tant d’opportunités à explorer. Je sais que j’ai le potentiel, je vais demander une bourse pour aller étudier aux États-Unis. » Obama a fasciné son public, confiant dans sa capacité à changer son avenir. « Je lui donne 8,5 chances sur 10 d’y arriver avec ce discours qui va influencer les mentalités. Revenez dans deux ans, vous verrez, les investisseurs seront revenus ! » veut croire Jackline Mburu, 25 ans. Après des années de défiance, lorsque Uhuru Kenyatta était inculpé par la CPI de crimes contre l’humanité, liés aux violences postélectorales après la présidentielle de 2007, les relations entre les deux pays semblent donc revenues au beau fixe. Parce que Kenyatta est redevenu fréquentable, parce que les États-Unis sont désireux de rattraper leur retard sur la Chine qui a massivement investi au Kenya, parce que, enfin, la menace terroriste a rapproché les deux gouvernements. « Nous sommes reconnaissants pour les sacrifices consentis par les Kenyans, en première ligne dans l’Amisom », a souligné Obama. Depuis 2011, le Kenya est en effet l’un des plus gros contributeurs de troupes de la force africaine qui combat les islamistes d’Al-Shebab. C’est son contingent qui les a délogés, en 2012, du port de Kismayoo, qui constituait alors l’un de leurs bastions et jouait un rôle économique majeur. «Nous resterons à vos côtés dans cette lutte contre le terrorisme », a juré Obama. Sa dernière promesse, avant de sortir sous les vivats, et de partir pour l’Éthiopie où il doit rester deux jours, était pour la jeunesse : « Je suis là pour vous dire que les États-Unis seront à vos côtés, tout le long du chemin. » Peut-il réellement imprimer un changement au Kenya, et en Afrique ? « Bien sûr, répond Paul Tiberius. C’est l’homme le plus puissant du monde ! »

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