Accueil ACTUALITÉ Marche contre le terrorisme en Tunisie : un rempart en mouvement

Marche contre le terrorisme en Tunisie : un rempart en mouvement

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L’avenue Bourguiba, au cœur de Tunis, entre les places 14-Janvier et de l’Indépendance, a été interdite, depuis vendredi, à la circulation et au stationnement pour tous types de véhicules, en prévision de la marche contre le terrorisme, hier en Tunis, et à laquelle ont participé des chefs d’États et de gouvernements et des dizaines de milliers de citoyens anonymes. Après avoir parcouru l’avenue Bourguiba pour arriver au pied du Parlement tunisien, les vingt mille marcheurs, femmes et hommes, jeunes et moins jeunes, ont été rejoints, à la mi-journée, par les officiels tunisiens et étrangers pour prendre part à cette marche. Au premier rang de cette marée humaine, dont bon nombre de citoyens brandissaient les couleurs nationales de Tunisie, le président tunisien Béji Caïd-Essebsi qui a donné le rythme pour marcher du siège du Parlement, au musée du Bardo, où il a inauguré une stèle à la mémoire des victimes de l’attentat qui a ciblé, le 18 mars dernier, le musée. L’attaque terroriste en question a fait 22 victimes, 21 touristes étrangers et un policier tunisien, bilan revu à la hausse, samedi dernier, après l’annonce par Paris du décès d’une Française grièvement blessée, lors dudit attentat. Pour que nul n’oublie, la stèle résume le message premier véhiculé, hier, par la marche contre le terrorisme de Tunis. Outre le fort message contre l’oubli, les vingt mille marcheurs ont affiché, par leur présence à cette action, un second message lourd de sens: le refus de se soumettre à la peur à laquelle aspirent les terroristes par leur actes barbares et meurtriers, en vue de voir ligoter les synergies et les initiatives des citoyens, dans le cadre de lutte contre le terrorisme, à d’autres niveaux que celui de nature sécuritaire. Aux côtés des présidents tunisien, français, polonais, palestinien et gabonais étaient également présents des chefs de gouvernements. Le premier ministre, Abdelmalek Sellal, qui représentait le Chef de l’État à cet évènement, son homologue français, Manuel Valls, le chef du gouvernement italien, Matteo Renzi, et aussi les chefs de la diplomatie, d’Allemagne et d’Espagne, respectivement, Frank-Walter Steinmeier et José Manuel Garcia-Margallo. La marche contre le terrorisme s’est tenue, après 11 jours de l’attentat contre le musée du Bardo, et notamment quelques heures après l’opération réussie des services de sécurité tunisiens qui ont mis hors d’état de nuire neuf terroristes, à leur tête, Lokman Abou Sakhr, chef de katibat «Okba Ibn Nafaâ». C’est ce qu’a annoncé, hier matin, le gouvernement tunisien au terme de l’opération réussie des éléments de sécurité, dont la brigade de lutte contre le terrorisme, menée, durant la nuit de samedi à dimanche, à Gefsa, au sud-ouest de la Tunisie Le Premier ministre, Habib Essid, a annoncé, à ce propos, que le chef principal du groupe armé djihadiste tunisien, Lokman Abou Sakhr, qui «a dirigé l’attaque du Bardo, avait été tué samedi». Opération «très importante dans notre programme de lutte contre le terrorisme», a souligné Habbib Essid, dont le terroriste Okba Ibn Nafaâ et ses dizaines de jihadistes, tunisiens et étrangers, sont responsables, selon les autorités tunisiennes, de la mort de dizaines de policiers et militaires, depuis décembre 2012.

Lutte contre le terrorisme sur tous les fronts
L’annonce précitée de Habib Essid n’a pas été sans impact sur le cours de la marche des milliers de citoyennes et citoyens tunisiens, qui scandaient «Tunisie libre, terrorisme dehors» «Notre pays est plus fort que vous (les terroristes, ndlr)» ou bien encore «Tounes (Tunisie, ndlr) démocratique», et les plus forts moments étaient quand l’hymne national tunisien ne cessait d’être récité tout au long du parcours des marcheurs, de la place 14-Janvier à celle de l’Indépendance. Si le mot d’ordre principal de cette marche était l’expression de l’opposition au terrorisme, par les officiels, tunisiens et étrangers, et les citoyennes et citoyens tunisiens présents, l’absence de certains officiels étrangers, à cette marche, remet, à l’ordre du jour, le débat sur l’engagement effectif d’acteurs sur la scène internationale, notamment politique, contre l’extrémisme religieux et sa matrice idéologique. Nul n’ignore, comme le rappelle bon nombre d’experts, régionaux et internationaux, en matière de lutte contre le terrorisme, que dans le sillage des luttes d’intérêts stratégiques entre acteurs sur la scène mondiale, le soutien par certains de ces acteurs, financier et logistique, aux djihadistes est avéré et n’est plus à démontrer. La crise en Syrie et la guerre menée contre ce pays, qui n’a cessé d’être inondé, depuis plus de quatre ans, date du début de la crise en Syrie, de terroristes, notamment par la frontière turque, outre que ceux qui s’entraînent au Qatar, ou bien des terroristes d’En-Nosra, qui, blessés, sont évacués, via le le Golan occupé pour être soignés dans les hôpitaux de l’entité sioniste.
Après la marche de Paris, janvier dernier, contre le terrorisme, à laquelle ont pris de nombreux présidents et de hauts responsables de gouvernements, celle de Tunis a eu le mérite de rappeler que le terrorisme islamiste a fait plus de victimes dans les pays arabes qu’ailleurs. Et c’est en ce sens que le traitement de la question est fondamentalement, et en premier lieu, d’ordre politique, et qu’en l’absence d’une volonté politique effective pour faire face à ce phénomène, et à ce qu’il le nourrit, le traitement sécuritaire demeure amputé et ne suffit pas, à lui seul. Même si la lutte contre le terrorisme, par son volet sécuritaire, en est le socle, celui-ci n’aura son impact réel que si cette lutte est menée conséquemment sur les autres fronts qui, par leur faiblesse, favorisent les idées djihadistes à s’y griffer. Le système éducatif, l’amélioration des conditions socioéconomiques, la consolidation des acquis et les principes démocratiques et leur enracinement dans la gestion des affaires de la Cité, la fortification du pouvoir de l’État de droit, pour ne citer qu’eux, l’ensemble prémunira et consolidera les piliers de l’État républicain et démocratique. La scène politique tunisienne a divergé sur sa participation à la marche, d’hier, contre le terrorisme. Après l’annonce par le parti islamiste En-Nahdha de sa participation à la manifestation, en qualifiant le «terrorisme d’ennemi de l’État, de la révolution, de la liberté, de la stabilité et du développement», la troisième force politique du pays, le Front populaire (FP), avait déclaré voir d’un «très mauvais œil» la participation d’En-Nahdha à cette marche. Le FP estime, en effet, que le parti islamiste entretenait des liens troubles avec la mouvance djihadiste, lorsqu’il était au pouvoir, notamment avec les ligues de défenses de la Révolution de fin 2011 à début 2014, dont certains de ses membres ont été impliqués dans des actes terroristes. Le porte-parole officiel du parti du Front populaire, Hamma Hammami, a accusé, pour rappel, 3 juillet dernier, un certain nombre ded leaders du mouvement En-Nahdha de «parrainer» le terrorisme. Il avait déclaré que «le terrorisme s’est développé (en Tunisie, ndlr ) suite au parrainage politique, intellectuel et religieux de quelques leaders d’En-Nahdha, et l’indulgence de la Troïka» de 2011 à 2014. De son côté, l’ancien secrétaire général d’En-Nahdha et ex-chef du gouvernement, Hamdi Jebali, en réponse à ceux qui pointent du doigt le Qatar dans son rôle «de soutien» aux terroristes, il prend la défense de Doha, et de déclarer, «tout le monde a salué le rôle positif qu’a joué le Qatar, et ce qu’on veut remettre en cause par les accusations de financement du terrorisme», a asséné Hamadi Jebali. Notons par ailleurs avant le coup réussi contre le groupe terroriste de Lokman Abou Sakhr, vendredi dernier, l’imam de la mosquée Atig, dans la région de Hergla, a été arrêté par les forces de l’ordre de la ville de Sousse pour appartenance à une organisation terroriste.
Karima Bennour

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