Ancien cadre de l’ONLCDT (Office national de lutte contre la drogue et la toxicomanie) : il y a occupé durant de longues années le poste de directeur de la coopération internationale, Aïssa Kacemi, commissaire-divisionnaire à la retraite et, néanmoins, actuel vice-président de l’Association nationale des retraités de la Sûreté nationale, a dit, hier. tout haut ce que nombre d’officiers pensent tout bas. à savoir que «60% du cannabis circulant aujourd’hui dans le monde sont produits par le Maroc».
Et que « l’Algérie est inondée de ce produit à desseins ». Des précisions que Aïssa Kacemi a, à l’évidence, apportées…à dessein. Pour souligner, en l’insérant dans le cadre global qui le sous-tend, celui des menées extérieures visant à la déstabilisation de l’Algérie, la gravité de ce problème. Et partant, la nécessité d’une implication plus grande de la société, notamment, des familles, dans la lutte visant à son éradication.
Ou, à tous le moins, à son confinement dans des proportions maîtrisables. Une tâche dont l’ampleur a été parfaitement illustrée par les bilans chiffrés présentés à cette rencontre avec la presse, organisée dans le cadre de la célébration par la DGSN, de la Journée mondiale de la lutte contre la drogue, qui correspond au 26 juin de chaque année, par le chef du service central de la lutte contre le trafic illicite de stupéfiants à la direction de la Police judiciaire de la DGSN (SCLTIS/PJ). Selon le commissaire principal de police, Djamel Guessoum, c’est son nom, « pour les seules cinq dernières années, pas moins de 120 tonnes de résine de cannabis et quelque deux (2) millions de comprimés de psychotropes ont été saisis par les seuls services de la DGSN ». Un bilan qui donne froid au dos surtout que le chef du SCLTIS/PJ a estimé, en réponse à une question d’un confrère, que la quantité saisie précitée « représente quelque 50% de toutes celles saisies par l’ensemble des services de sécurité, et autres, » engagés dans la lutte contre le trafic de drogue.
Cette sensation, de froid au dos, a été sensiblement renforcée par les précisions apportées, sur le même thème, par l’ancien directeur de la Coopération internationale à l’ONLCDT selon lesquelles « les quantités saisies sont estimées à seulement 13% de celles qui sont effectivement introduites sur le territoire national ». Sauf qu’elle a été quelque peu atténuée par d’autres précisons apportées par le commissaire principal Djamel Guessoum sur la destination finale des quantités de drogue qui arrivent à échapper aux mailles des services de sécurité : «Nous estimons que 30% seulement de ces quantités sont écoulées dans le pays », a-t-il, en effet, déclaré. Non sans ajouter que « l’Algérie demeure, dans une large mesure, un pays de transit ». Un « statut » qu’elle pourrait perdre à terme si on s’en tient au bilan sur le trafic de drogues établi, par les services compétents de la DGSN, pour les années 2014 et 2015 et le premier semestre de celle en cours. Celui-révèle, en effet, une sensible aggravation du problème. Et ce, particulièrement en matière de personnes impliquées, d’affaires traitées et d’introduction de drogues dures; les quantités saisies de résine de cannabis ayant enregistré une légère baisse durant cette période : 69 tonnes ont été (saisies) en 2014, 41 (tonnes) en 2015 et 15 tonnes, durant les six premiers mois de la présente année. Concernant les personnes impliquées, alors qu’elles étaient 9896 en 2014, leur nombre a littéralement explosé l’année d’après pour atteindre les 19855 (personnes). C’est pratiquement à la même augmentation sensible et continue de leur nombre que l’on assiste pour ce qui est des affaires traitées : 7465affaires en 2014 ; 15564 affaires en 2015 ; 14 162 autres, pour les six premiers mois de l’année 2016. La rencontre avec la presse d’hier a également valu par l’exposé sur la « stratégie nationale de lutte contre la drogue », couvrant la période 2011-2015, que Ghania Keddache, directrice de la Communication et de la Prévention à l’ONLCDT a présenté à cette l’occasion. Une stratégie dans laquelle se sont inscrites, a-t-elle précisé, toutes les actions menées par les différents services de sécurité contre ce fléau. Qui a été élaborée, a-t-elle ajouté, « sur la base d’un certain nombre de données » ; certaines « relatives aux personnes impliquées et arrêtées, par les services de sécurité » et d’autres, « concernant le traitement médical des toxicomanes, par ceux de la Santé ». à ces données, les concepteurs de cette stratégie, aujourd’hui, nous a déclaré Ghania Keddache, ont ajouté « d’autres tirées d’une recherche scientifique effectuée sur le sujet par un institut spécialisé ». Parmi lesquelles, « le taux de prévalence (à la drogue) que les conclusions de ladite recherche ont établi, pour l’année 2010, à 1,05% de la population ». Un taux qui, a précisé la directrice de la communication et de la prévention à l’ONLCDT, « a servi aux auteurs de ladite stratégie de fixer un des objectifs pour lesquels elle a été élaborée : celui de le réduire de moitié à l’horizon 2015 ».
Parmi les autres objectifs tracés, toujours selon l’intervenante, figurent « la réduction de l’offre (en matière de drogue) et celle de sa demande » ; la première étant, a-t-elle ajouté, « l’affaire des services de sécurité et la seconde, de la société civile ». Est-ce que cela a été atteint ? Ghania Keddache nous a déclaré qu’on « le saura après la phase d’évaluation en cours de la stratégie » en question.
Mourad Bendris