Le quotidien El-Moudjahid a reçu hier le nouveau secrétaire général de l’Union générale des travailleurs algériens (UGTA), Amar Takdjout, afin de débattre sur les priorités, sa légitimité, sa feuille de route relative aux droits et revendications des travailleurs et à la préservation de leur pouvoir d’achat, ainsi que sur les réformes socio-économiques engagées. À la tête de l’UGTA depuis juillet dernier, Amar Takdjout a hérité de la lourde responsabilité de diriger la centrale syndicale, dans un contexte difficile pour les travailleurs et le monde du travail, au sein d’une organisation traversée par plusieurs problèmes. S’exprimant d’emblée sur les priorités organisationnelles et sociales de la centrale syndicale, et ce qui préoccupe le monde du travail, à savoir la place actuelle du secteur économique et ses spécificités, l’intervenant a annoncé dans ce sens que l’UGTA « revient petit à petit aux traditions, dans son rôle de concertation et construction, même s’il faut lui reconnaître certains dérapages, dérives et incompréhensions ». Pointant du doigt le clientélisme dont a souffert l’organisation, Takdjout a expliqué « il n’a pas commencé à l’UGTA, mais ailleurs, dans la sphère politique », ajoutant, à ce titre, que « ce qui est demandé aujourd’hui dans la ligne de conduite de l’UGTA, c’est de revenir à une structuration et une organisation ».
« Discuter d’égaL à égal avec les responsables politiques »
À ce propos, le chef de l’UGTA a expliqué que « la souveraineté d’un pays passe par l’organisation de son peuple. L’organisation, c’est la clé de voûte, notre force passe par l’organisation, tout le reste n’est qu’accessoire. J’ajouterais aussi que c’est à travers l’échange et la concertation que nous pourrons trouver les argumentaires nécessaires ». « Notre rôle n’est pas de confectionner un programme, parce que nous ne sommes pas un parti politique, et nous ne cherchons donc pas à accéder au pouvoir. Notre objectif est de défendre les intérêts moraux et matériels des travailleurs. Nous avons tendance à ne pas parler de l’espace social », poursuit l’intervenant. À cette fin, Amar Takdjout a confié, entre autres : « À ce sujet, je n’ai aucun complexe à développer avec quiconque. Si la loi du travail est contestée par le syndicat, c’est qu’elle a été fixée par les politiques. Pour cela, il faudra qu’on discute d’égal à égal ».
« Réunir les travailleurs et leur dire la vérité »
S’agissant de la manière par laquelle le premier responsable de l’UGTA envisage de réunir toutes ces conditions, au moment où la centrale syndicale s’est affaiblie en interne et en externe, par le nombre faible de ses adhérents et la confiance perdue des travailleurs, le SG dira : « C’est par le travail. Les décisions qu’on prendra, il faudra les appliquer. Il n’y a pas de solution miracle. Il faut engager une pédagogie syndicale. Il faut reprendre les espaces de concertation, de rassemblement, de réunions et de la compétition des idées ». Pour le responsable syndical, il est primordial de « réunir les travailleurs autour des questions d’actualité, et leur dire la vérité ». Concernant le texte de loi sur la prévention et le règlement des conflits collectifs de travail, adopté en mai 2023, et auquel le prédécesseur de Amar Takdjout s’était opposé, ce dernier a expliqué que « les lois de la République sont faites pour être appliquées, mais qu’« il n’est pas interdit de les faire changer, notamment faire amender certains de leurs articles ». Et de s’interroger : « Est-ce que nous pouvons traduire cette loi sur le terrain ? Dans ses témoignages à cet égard, l’intervenant a faire référence à certaines insuffisances, mais demeurant évasif à ce sujet, si ce n’est le phénomène de grève. « Les questions de la grève et les restrictions de grève…La grève reste un exercice difficile, aujourd’hui encore plus. On a tendance à oublier qu’on avait la capacité d’organiser des grèves, mais pas de reprendre le travail. Nous devons également connaître les capacités des dirigeants à écouter les questions et interrogations des travailleurs », a déclaré le SG de l’UGTA.
« Réguler les prix et accompagner les entreprises en difficulté »
Abordant la pénibilité au travail, Amar Takdjout s’est contenté de dire que « tout travail est pénible. L’identification de la pénibilité est compliquée. Dans certains pays il est laissé le soin aux médecins de décider de cela ». « Ce qui me pousse à aborder la santé mentale des travailleurs, d’où la question de savoir combien la sécurité sociale investit pour cette santé mentale ? », poursuit l’orateur. Pour ce qui est du pouvoir d’achat, et ayant fait part au lendemain de son élection, de propositions en vue de préserver l’intérêt des travailleurs et les ménages face à la hausse des prix des produits de large consommation, Amar Takdjout a révélé que « ce n’est pas facile », affirmant qu’il s’est « heurté à beaucoup de problèmes », notamment sur « la réflexion de nos responsables, des structures qui n’ont pas été renouvelées depuis des années, des abus, un manque de discernement du secteur syndical dans certaines activités, etc… ». Préconisant « la maîtrise des prix élevés et l’accompagnement des entreprises qui ont des difficultés », il note que ces dernières « subissent les problèmes du marché et au niveau du plan de charge, ainsi que l’endettement ». Pour le premier responsable de l’UGTA, « Il faut un diagnostic. Il faut trouver un mécanisme d’accompagnement contre le chômage partiel des entreprises, qui se traduit par une caisse au niveau de l’entreprise, qui dépendra de la CNAC ». Il faut une répartition juste, afin d’optimiser nos ressources et nos investissements ». Et pour cela, il faudra « anticiper sur l’évolution du monde économique », a-t-il indiqué.
Hamid Si Ahmed