Durant son passage au Forum du Courrier d’Algérie, le président de la Forem, M. Mustapha Khiati, n’est pas allé avec le dos de la cuillère pour fustiger le système et les moyens de prévention dont dispose l’Algérie pour faire face à une quelconque épidémie du genre du coronavirus. « Nous ne pouvons pas gérer scientifiquement une situation de ce genre, étant donné que ne nous disposons pas de moyens efficaces», dit-il. Et d’ajouter : «Les moyens de prévention, en absence de traitements et de vaccins, sont les seuls qui s’offrent à nous, or ceux-ci son hautement déficients».
Le professeur en pédiatrie parlera notamment des centres d’isolement dont on ne trouve pas de traces en Algérie. «Ce qui est regrettable, assure notre invité, est que l’Algérie ne dispose d’aucun centre d’isolement P3 : un service équipé d’un système de ventilation intrinsèque faisant qu’un virus ne peut pas sortir à l’extérieur, ainsi que de sas pour la décontamination des personnels)». Pourtant des enveloppes budgétaires conséquentes ont été dégagées après le SRAS de 2002 et 2003 pour la besogne. Des travaux avaient même été entamés à El- Kattar, «mais malheureusement ils ont été arrêtés alors qu’ils avaient atteint 80% de réalisation», regrette M. Khiati qui s’est interrogé avec amertume : «N’a-t-on pas le droit de disposer d’un centre d’isolement de niveau international ? Pourquoi l’Institut Pasteur ne dispose-t-il pas d’un laboratoire P4 ? Pourquoi il n’y a qu’un seul service de virologie d’autant plus que depuis des années on est confronté à des infections d’origine virologique, à l’instar d’Ebola, la vache folle, la fièvre porcine, le SRAS ? ». Des questions, estime M. Khiati, qu’on est en droit de poser au système de la Santé qui « ne paraît pas à la hauteur des défis de la médecine moderne ».
Il en sera fini du Coronavirus en septembre
S’agissant du coronavirus qui, parait-il, provoque plus de peur que de mal, M. Khiati dira que, selon les calculs et les expériences de ceux qui travaillent sur le sujet, «on va arriver à l’acmé de l’épidémie vers le 10 février». Ensuite ? «Elle (l’épidémie) va commencer à chuter jusqu’en avril», dira M. Khiati. Et d’ajouter : «Je pense qu’en été, on aura le vaccin, et ce problème devrait être définitivement réglé en septembre». Le casse-tête de ce virus réside, explique le professeur, dans le fait qu’il se diffuse très rapidement : «une personne atteinte peut contaminer jusqu’à 14 autres», fait-il savoir, assurant qu’il ne va principalement pas y avoir d’incidences particulières sur l’économie nationale, contrairement à ce qui se passe actuellement en Chine.
Par ailleurs, M. Khiati dira qu’étant donné qu’il n’y a pas de cas déclarés en Algérie, «la situation ne pose pas de problème». «Bien avant la déclaration de l’urgence sanitaire, l’Algérie avait pris des mesures de prévention, notamment en activant les caméras thermiques et en renforçant les équipes médicales en niveau des aéroports », dit-il. Qu’en est-il des mesures d’isolement des rapatriés du Wuhan que les uns jugent manquant de rigueur ? « Ce sont des gens qui ne sont que potentiellement porteurs. Les mesures actuelles devraient largement suffire», dira M. Khiati.
La communication, le maillon faible
Le volet communication, estime notre invité, constitue l’autre maillon faible du système algérien de la Santé. «Il ne suffit pas, dit-il, qu’un directeur de la prévention fasse une déclaration pour que les Algériens comprennent de quoi il s’agit réellement», dit-il avant de suggérer que «les 50 radios locales, les 48 directeurs de la santé, les directeurs de la prévention de chaque wilaya, les médecins inspecteurs… participent à l’opération de communication». «Ils peuvent faire des speechs quotidiens, expliquer aux gens, répondre au téléphone…», dira M. Khiati qui relève «une centralisation des pouvoirs au niveau du ministère». «Dans les pays du monde, explique-t-il, on trouve ce qu’on appelle des personnes focales qui communiquent chacune sur une ou un ensemble de pathologies, ce qui ne se fait pas chez nous ». Notre invité fait en outre état d’«une crise de confiance entre le citoyen et l’administration». «Même si le ministre fait des déclarations, les gens ne croient pas», déplore-t-il, en insistant sur l’ «impératif de travailler ce volet».
Hamid Fekhart