En Algérie, le nombre des personnes atteintes de cancer est estimé à 480 000 patients. 50 000 nouveaux cas de cancer sont recensés chaque année dans le pays, dont
1 500 enfants, soit une moyenne de cinq nouveaux cas par heure enregistrés chez les adultes contre quatre chez les enfants.
En outre, plus de 12 000 malades meurent chaque année de cancer, deuxième en cause de mortalité après les maladies cardio-vasculaires, faute de prise en charge adéquate. Ce sont là les chiffres rendus publics, vendredi, dans un communiqué, par la Ligue algérienne pour la défense des droits de l’Homme (LADDH). En effet, à l’occasion de la Journée internationale de lutte contre le cancer (le 4 février de chaque année), la LADDH a brossé un tableau peu reluisant de la situation des cancéreux tout en attirant l’attention de l’opinion publique sur leurs souffrances au quotidien. Un
« véritable drame » selon la LADDH devant une prise en charge médicale défaillante ; pénurie de médicaments vitaux, inégalité des soins et absence de radiothérapie. « La maladie du cancer est tellement mal prise en charge que le malade se sent dans une situation de désespoir total et dramatique au point que certains malades en attente de leur traitement pendant plus d’un mois après le diagnostic meurent avant même que le traitement ne commence » note le communiqué de la LADDH. Selon la LADDH, 70 % des traitements effectués par les patients ne sont entamés qu’au stade avancé de la maladie. Toutefois, le secrétaire national chargé des dossiers spécialisés de la LADDH, Houari Kaddour, s’est interrogé, à travers le même communiqué, sur la destination de l’argent d’un fonds spécial à lequel le gouvernement transfère chaque année 18 milliards de DA pour l’amélioration de la prise en charge des malades, rappelant par la suite que le droit aux soins est un droit constitutionnel inaliénable. Selon la ligue, les cancéreux ne bénéficient pas des mêmes chances et conditions de soins dans leurs traitements malgré le fait que le pays dispose de neuf Centres anti-cancer (CAC) opérationnels en 2016, à savoir le Centre Pierre et Marie Curie d’Alger, Blida, Oran, Ouargla, Constantine, Laghouat, Sétif, Batna, Annaba. À cet effet, la ligue a souligné le caractère désastreux de la prise en charge des malades cancéreux dans l’Algérie profonde et qui sont souvent livrés à eux-mêmes : « pour eux, se soigner c’est un vrai parcours du combattant, et face à cette absence de centres de soins et de matériel spécialisé locaux, leurs chances de survie se voient considérablement réduites » souligne le même communiqué. La galère des cancéreux et de leurs familles, selon la LADDH, commence dès leur déposition d’une demande d’obtention d’un rendez-vous pour une opération ou pour suivre des séances de la radiothérapie. En fait, la surcharge des salles d’hospitalisation et les pénuries signalées de médicaments nécessaires dans le traitement du cancer poussent les familles des patients à chercher tous les moyens pour se procurer ce fameux rendez-vous.
Le communiqué a noté quelques témoignages de ces familles : « si tu as le cancer et pas de relations, tu meurs», et « Si tu n’a pas le bras long, tu n’auras pas droit à un traitement de faveur ». Évoquant les multiples appels d’aides lancés sur les réseaux sociaux par des patients en situation de précarité, la LADDH a noté que les frais des soins médicaux ne sont pas à la portée de tous les malades. Le communiqué de la LADDH souligne que : « le montant d’une séance de radiothérapie s’élève à 13 000 DA chez le privé tandis que les services de la Sécurité sociale n’en remboursent que 400 DA seulement , alors parfois la famille dépense entre 60 millions à 80 millions de centimes dans les transports, l’hôtel, les analyses sanguines et les examens radiologiques … », estimant ces coûts à plus de 80 millions de centimes pour un seul cancéreux. Par ailleurs, quant aux principaux facteurs de risque menant au cancer, la ligue a mis en cause quelques pratiques utilisées dans la fabrication agroalimentaire. Selon la LADDH, plusieurs entreprises industrielles et quelques producteurs ne respectent pas les conditions sanitaires et d’hygiène dans l’emballage de l’eau minérale et autres boissons, la vente de la viande blanche sans l’élimination de la toxine de médicament, le non-respect du dosage des colorants industriels dans la fabrication des produits alimentaires. La pollution résultant de l’utilisation abusive des pesticides dans les cultures agricoles, le faux tabac (produits de contrefaçon) et le stress chronique sont signalés aussi par le bureau de la LADDH comme les principales causes de cancer dans le pays.
Hamid Mecheri