Alors qu’une conférence nationale devait se tenir du 14 au 16 avril prochain, à Ghadamès, l’occasion, encore une fois, pour les acteurs libyens de tenter de trouver les voies pour dépasser leurs divergences nourries par les interférences des pays initiateurs et acteurs de l’intervention de l’OTAN, en Libye, il y a huit ans. La ligne des bruits de bottes semble avoir été franchi, pour n’entendre que le vacarme meurtrier des canons et des bombardements. Une situation davantage chaotique pour le peuple libyen, qui est victime d’un chaos entretenu depuis 2011, année de l’intervention de l’Otan dans ce pays.
La réunion, dans la ville libyenne de Ghadamès, qui devait ouvrir la voie à une solution politique, notamment en se fixant une date pour la tenue des élections législative et présidentielle dans ce pays déchiré par les conflits, a été précédée de la montée d’un cran de déclarations et contre-déclarations augurant un conflit armé entre un duo qui rythme la cadence politico-militaire, dans ce pays, ravagé par la violence, dont les libyens et leur pays sont les seules victimes. Lors du dernier conflit sanglant pour le contrôle de la capitale libyenne, fin août dernier, 115 personnes ont perdu la vie et 25 000 personnes se sont retrouvées sans abri suite à la destruction de quartiers entiers, à Tripoli, selon les responsables libyens. Aussi, la montée d’un cran des tensions entre la France et l’Italie, ces derniers mois, sur la question libyenne, renseigne, on ne peut mieux, sur les dessous du rôle de certains acteurs occidentaux, sur la scène libyenne qui, après l’entrée en lice de l’Otan, dans la crise libyenne, en 2011, est devenue, l’arène où s’affrontent et se confortent les intérêts, non seulement des pays occidentaux, mais aussi d’autres ; les Émirats arabes unis, le Qatar, et la Turquie. Et c’est dans la défense de leur intérêts respectifs que ces pays ont et continuent d’étendre leur influence, sur une scène libyenne chaotique, dans leur soutien au gouvernement de Seradj pour certains (dont l’Italie), et le Maréchal Haftar, pour d’autres (dont la France). Pour des experts avérés, la partie qui se joue depuis 2011, en Libye, se poursuit dans le chaos libyen, qui n’a pas été pour perturber ou remettre en cause les intérêts respectifs des pays précités qui, tantôt convergent quand ils ne divergent pas. Ce qui amène ces experts à affirmer que «le désordre établi en Libye ne met pas en cause fondamentalement les intérêts de pays puissants». Si jeudi dernier, le maréchal de l’Armée nationale libyenne (ANL), Khalifa Haftar, a ordonné à ses troupes de lancer une offensive sur Tripoli en vue de l’«élimination complète du terrorisme », en réaction, la communauté internationale a multiplié ses appels à Khalifa Haftar pour que ses forces cessent leur offensive sur Tripoli. Le Conseil de sécurité de l’ONU, convoquant en urgence vendredi dernier, une réunion, a appelé l’Armée nationale libyenne (ANL) du maréchal Haftar, « à interrompre tous mouvements militaires», selon l’ambassadeur allemand Christoph Heusgen, au moment, rappelons-le, où des combats au sud de la capitale libyenne avec le gouvernement de Fayez al-Sarraj font craindre un nouvel embrasement. Aussi, au lendemain d’une rencontre à Tripoli avec le chef du gouvernement d’union nationale (GNA) Fayez al-Sarraj, le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a rencontré vendredi dernier le maréchal Haftar à Benghazi, dans l’Est du pays. Le patron de l’ONU a déclaré, à Haftar, « je quitte la Libye avec une profonde inquiétude et un cœur lourd» dira le SG de l’ONU, à l’aéroport, et d’ajouter « espérer toujours possible d’éviter une confrontation sanglante à Tripoli et ses environs». a-t-il précisé. Pour des experts, le chaos libyen se «prolongera pour s’achever par un alignement sur la politique imposée par des intérêts», notamment pétroliers et stratégiques, non ceux du peuple libyen, tant que les divergences minant le chemin de la prise en main de son destin persistent. Au Conseil de sécurité de l’Onu, Moscou s’est prononcé contre les tentatives de désigner de façon unilatérale les coupables dans l’actuelle crise libyenne et le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, a souligné que « les Libyens devaient décider eux-mêmes du sort de leur pays via un dialogue inclusif » a-t-il déclaré, hier, à partir du Caire. L’anarchie dans laquelle a été plongé le pays est loin d’être le simple fait des divisions et divergences entre libyens. Depuis 2011, chaque camp, chaque groupe, bénéficie plus ou moins, selon les obédiences de soutiens étrangers politique et financier, des pays occidentaux, arabes et autres précités, nourrissant sur le terrain libyen, les contentieux, les divergences et les rivalités, pour supprimer toute perspective de souveraineté.
Karima Bennour