Alors que le pape François a refusé, tout amalgame entre islam et terrorisme, expliquant que les catholiques pouvaient être aussi violents que les musulmans et déclarant que l’Europe était en train de pousser une partie de sa jeunesse vers le terrorisme, le Premier ministre français relance le débat sur la place de l’Islam en France.
Un Islam qu’il souhaite aux couleurs de la France s’engageant à suspendre provisoirement les financements extérieurs de mosquées et de lieux de culte mais aussi le recours aux imams étrangers. Ainsi et tandis que le chef de l’église chrétienne ne cesse de répéter «Il n’est pas vrai et il n’est pas exact [de dire] que l’islam c’est le terrorisme», en France peu de responsables sont aussi courageux alors qu’une partie de la droite et l’extrême droite dans un bel ensemble et pour des préoccupations évidentes font sciemment l’amalgame entre Islam et terrorisme. Pour canaliser le débat et évi ter que l’opposition s’en empare, le Premier ministre français, Manuel Valls, constate que «l’islam a trouvé sa place dans la République». Il estime que «face à la montée du djihadisme», il y a «urgence» à «bâtir un véritable pacte» avec la deuxième religion de France, à travers une «Fondation pour l’islam de France».
«L’islam a trouvé sa place dans la République (…) contrairement aux attaques répétées des populismes, à droite et à l’extrême droite», qui ont mis cette religion au «cœur de leur rhétorique du bouc émissaire», déclare Valls. Et d’assurer : «Ce rejet insupportable de l’islam et des musulmans, ces paroles, ces actes, tout comme les paroles et les actes antisémites, antichrétiens, doivent être combattus –et ils le sont– avec la plus grande force.
Mais, le chef de gouvernement français appelle à «un devoir de lucidité face à la montée de -l’islamisme- du djihadisme mondialisé avec sa vision apocalyptique, qui prend «en otage de nombreux musulmans de France». Ainsi, il explique dans des formules chocs que «tous les salafistes ne sont pas des djihadistes… mais presque tous les djihadistes sont des salafistes. Cette mécanique infernale pousse des individus par centaines, parfois très jeunes –hommes, femmes, de culture musulmane ou convertis de fraîche date– à prendre les armes et à les retourner contre leur pays», insiste-t-il. Soulignant la «mobilisation sans précédent des pouvoirs publics» dans la lutte contre «la radicalisation», il juge que la France «doit montrer au monde entier la démonstration éclatante que l’islam est compatible avec la démocratie».
Valls, qui s’est dit «favorable» à une interdiction temporaire du financement étranger des mosquées, rappelle qu’il y a plus de dix ans une fondation -la Fondation pour l’islam de France- a été créée pour réunir en toute transparence les fonds nécessaires».«Son échec est total. Il ne doit pas nous décourager.
Il faut reconstruire une capacité de financement française», estime-t-il. «Il y a urgence à aider l’islam de France à se débarrasser de ceux qui le minent de l’intérieur. Pour cela, il nous appartient de bâtir un véritable pacte avec l’islam de France, donnant à la Fondation une place centrale», ajoute le chef du gouvernement français. Les interventions répétées du Premier ministre français qui visent aussi à faire taire les fortes critiques à l’égard des relations privilégiées que la France entretient avec des monarchies du Golfe qui financent le terrorisme ou laisse faire notamment pour ce qui est du soutien de Daech, interviennent au moment où une quarantaine de politiques et d’intellectuels français musulmans lancent un appel à «agir contre l’islamisme radical». Dans cet appel, intitulé «Nous, Français et musulmans, sommes prêts à assumer nos responsabilités» une quarantaine de personnalités, dont le philosophe Abdennour Bidar, l’essayiste Hakim El Karoui et la sénatrice socialiste de Paris Bariza Khiari se disent «concernés par l’impuissance de l’organisation actuelle de l’islam de France, qui n’a aucune prise sur les événements». Préconisant de «changer de générations» et de mener la bataille culturelle contre l’islamisme radical, auprès des jeunes et des moins jeunes, ils soulignent, eux aussi, qu’il est temps de réactiver la Fondation pour l’islam de France, qui n’a jamais fonctionné, et de lui donner la capacité de collecter des ressources. La relance de cette fondation devait être l’un des chantiers prioritaires du plan islam, annoncé au lendemain des attentats de janvier 2015 par le gouvernement. Une première version, la Fondation des œuvres de l’islam de France (FOIF), créée en 2005 par Dominique de Villepin, à l’époque ministre de l’Intérieur, s’est soldée par un échec.
Manuel Valls, tout en refusant «toute tentation néo concordataire, qui serait une insulte à la laïcité, juge qu’il faut revoir certaines règles pour tarir les financements extérieurs et accroître en compensation les possibilités de levées de fonds en France. «Tout devra être mis sur la table, avec les musulmans de France et leurs instances représentatives», précise-t-il. Car, prévient le Premier ministre, si l’islam n’aide pas la République à combattre ceux qui remettent en cause les libertés publiques, il sera de plus en plus dur pour la République de garantir ce libre exercice du culte. Il faudra un engagement massif et puissant. D’abord, des musulmans. Et je les appelle à agir dans leur famille, leur quartier. Le débat est lancé et tout porte à croire qu’il occupera une place centrale lors de la campagne électorale et dès la rentrée politique en France.
M. Bendib