Deux polémiques agitent les candidats sur la place des musulmans aux États-Unis et l’influence supposée de la Russie sur la campagne électorale. La démocrate Hillary Clinton et le républicain Donald Trump, les deux adversaires de l’élection présidentielle américaine, se sont écharpés dimanche à propos de l’influence supposée de la Russie sur la campagne électorale et de la place des musulmans aux États-Unis. Des accusations de liens entre le milliardaire et Moscou et ses propos à l’emporte-pièce sur les musulmans alimentent ces derniers jours une polémique, depuis que Hillary Clinton et Donald Trump ont été investis par les conventions de leurs partis pour l’élection du 8 novembre.
L’ancienne chef de la diplomatie américaine sous le premier mandat de Barack Obama (2009-2013) a accusé dimanche son adversaire républicain d’avoir prêté « allégeance absolue aux objectifs de la politique étrangère russe ». Des propos de Donald Trump la semaine dernière sur la Russie et sur des emails d’Hillary Clinton et de responsables démocrates – déclarations qu’il a qualifiées ensuite de « sarcastiques » – nourrissent un procès en incompétence. Les démocrates ont même accusé le candidat républicain d’avoir encouragé « une puissance étrangère à espionner son opposant politique ».
L’annexion de la Crimée au coeur de la polémique
Moscou est soupçonnée à Washington d’avoir cherché à peser sur la campagne en faveur de Donald Trump en orchestrant une fuite de 20 000 messages de cadres du Parti démocrate. Ces courriels, publiés par WikiLeaks avant la convention démocrate, mettent au jour la méfiance et le mépris de démocrates à l’égard de Bernie Sanders, l’ancien concurrent d’Hillary Clinton pour la primaire.
Sur Fox News, Hillary Clinton a jugé Donald Trump coupable d’avoir « encouragé les Russes à pirater les comptes emails » et de faire « l’éloge de manière très excessive du (président Vladimir) Poutine ». Elle s’est interrogée sur « l » influence russe sur (leur) élection ». La semaine dernière, Barack Obama n’avait pas écarté cette possibilité. Le Kremlin avait catégoriquement démenti toute ingérence dans la politique américaine. La polémique a en particulier porté dimanche sur la question de la Crimée, dont l’annexion par la Russie en 2014 à la suite d’un référendum non reconnu internationalement a entraîné une forte dégradation des relations entre Moscou et les Occidentaux. « Le peuple de Crimée, d’après ce que j’ai entendu, préfère être avec la Russie », a déclaré Donald Trump. Cette question de la reconnaissance ou de la non-reconnaissance de l’annexion a fait l’objet d’un échange pendant une interview du candidat républicain sur ABC. Commentant des accusations occidentales selon lesquelles Vladimir Poutine pourrait menacer l’Ukraine, Donald Trump a déclaré : « Il ne va pas entrer en Ukraine, OK ? Vous pouvez être sûr de ça. » « Eh bien, il y est déjà, non ? » a rétorqué l’interviewer. « Il y est, d’une certaine manière », a dit Donald Trump.
Passe d’armes avec le père d’un soldat musulman tué
Un conseiller d’Hillary Clinton pour la politique étrangère a jugé les propos de Donald Trump « effrayants ». « Si Trump ne maîtrise pas les faits de base sur le monde, il maîtrise les éléments de langage de Poutine sur la Crimée », a déclaré ce conseiller, Jake Sullivan. Lorsqu’elle pilotait la diplomatie américaine, Hillary Clinton avait mené le « reset » (« redémarrage ») des relations Washington-Moscou. Mais les rapports entre les deux puissances s’étaient de nouveau dégradés par la suite. John Kerry, l’actuel secrétaire d’État, milite depuis des mois pour coopérer avec les Russes sur la Syrie. Donald Trump, lui aussi, voudrait que les anciens ennemis de la guerre froide se réconcilient. Il s’est d’ailleurs vanté sur ABC d’être « trait(é) avec un grand respect » par le président Poutine. L’homme d’affaires a cependant déclaré n’avoir « jamais rencontré » le chef de l’État russe. Mais « si notre pays s’entendait bien avec la Russie, ce serait une bonne chose », a-t-il dit, évoquant en particulier la lutte contre le groupe État islamique.C’est d’ailleurs une nouvelle fois à propos de l’islam et de la place des musulmans aux États-Unis (1 % de la population) que Donald Trump et Hillary Clinton se sont affrontés dimanche. Donald Trump a multiplié ces derniers mois les déclarations provocatrices sur les musulmans, lesquels seraient interdits d’entrer aux États-Unis. Il s’en est pris ce week-end au père d’un soldat américain musulman tué en Irak en 2004 qui l’avait durement critiqué lors de la convention démocrate. En réponse, Khizr Khan, un Américain originaire du Pakistan, a accusé sur CNN Donald Trump d’avoir une « âme noire » et de manquer d’« empathie ». En campagne dans l’Ohio, Hillary Clinton a renchéri : M. Khan « a fait le plus grand des sacrifices. Et qu’entendons-nous de Donald Trump ? Rien d’autre que des insultes et des commentaires désobligeants sur les musulmans. » Elle a été soutenue par le chef de la majorité républicaine au Sénat, Mitch McConnell, qui, sans condamner nommément Donald Trump, l’a clairement désavoué : « Interdire à l’ensemble des fidèles d’une religion de voyager est simplement contraire aux valeurs de l’Amérique. »