En plus de l’impact désastreux de la pandémie du Covid-19 sur l’opération pédagogique, les mouvements de grèves et de contestations récurrents plongent davantage le secteur de l’Éducation nationale dans le cycle des perturbations. Alors que la qualité de l’enseignement en Algérie a prouvé ses limites depuis belle lurette, l’école algérienne ne cesse, en effet, de faire face à des problèmes interminables. Cette année, la situation s’est empirée avec l’avènement de la pandémie du Covid-19 qui a contribué à lever le voile sur ce qui était jusqu’ici caché. L’impact a été, le moins que l’on puisse dire, désastreux sur la scolarité des élèves, qui sont depuis le début de l’année scolaire, perdus dans des programmes chamboulés et des enseignants complètements dépassés par les changements inadaptés et mal-étudiés par le ministère de l’Éducation nationale. D’ailleurs, les résultats des élèves du premier trimestre sont là pour le prouver. Seulement 30% des lycéens en 1re année auraient eu la moyenne de 10/20. Pour les terminales, ce taux ne dépasserait pas les 22%. Concernant le cycle moyen, les résultats des élèves en classes de 1re année seraient catastrophiques. 59% n’auraient pas obtenus la moyenne de 10/20, et qui, il faut il le rappeler, ont accédé au pallier moyen sans passer l’épreuve de 5ème année primaire. Toujours selon ses informations, la majorité de ces élèves auraient des moyennes de moins de 7/20. Pour les syndicalistes du secteur ce sont les décisions «unilatérales» du ministère de l’Éducation qui sont à l’origine de ces résultats catastrophiques. En raison de la pandémie, le ministère a, en effet, décidé de ne pas rattraper le troisième trimestre et de rabaisser les moyennes de passage des élèves en classes supérieurs à la fin de l’année 2019/2020, ce qui a porté un coup fatal sur leur niveau.
LA GROGNE DES ENSEIGNANTS GAGNE DU TERRAIN
En plus du Covid-19, et des conséquences qu’il a impliquées, le secteur de l’Éducation n’a pas été épargné encore une fois par les actions de contestations et les grèves des travailleurs. Outre la coordination nationale des enseignants du primaire, qui depuis le début de l’année, organise des grèves et des rassemblements périodiques, le Conseil national du personnel enseignant du secteur ternaire de l’éducation (Cnapeste), a annoncé également le recours à la contestations le 12 et 13 avril prochains pour réclamer la prise en charge de ses revendications restées en suspens. Le syndicat menace, par la même, d’aller vers des actions d’envergures dans le cas où le Men persiste à ignorer ses doléances. Et parce que la plateforme de revendications du Cnapeste a plusieurs points en communs avec les autres formations syndicales, il faudra s’attendre à ce que la grogne gagne plus de terrains pour s’élargir aux autres corps du secteur qui réclament essentiellement l’amélioration de leurs conditions socioprofessionnelles.
APPELS À L’URGENCE DE LA REFONTE DU SYSTÈME ÉDUCATIF
Si beaucoup de pédagogues et d’experts appellent à l’urgence de la révision profonde du système éducatif, c’est qu’il y a réellement péril en la demeure. Ahmed Tessa, qui est pédagogue praticien et ancien normalien, fait partie de ces nombreuses voix qui ne cessent de clamer l’amélioration de l’enseignement et de la formation à travers la refondation du système éducatif. Lors de l’une de ses interventions devant la presse en janvier 2020, il avait reproché au système éducatif en vigueur un fonctionnement inadapté car privilégiant des paradigmes dépassés. Selon Tessa, le programme scolaire algérien «fonctionne avec le même paradigme que l’école coloniale du 19e et 20e siècle qui se résume à la transmission de connaissance et sa restitution. Dans l’une de ses contributions, Tessa considère que la descente aux enfers de l’école algérienne avait commencé depuis des décennies, et que cela était particulièrement de la responsabilité de l’État. Cependant, à côté de la responsabilité des décideurs politiques, Tessa évoque «le rôle néfaste de certains segments de la société qui, profitant de l’angoisse des parents et du désarroi de leurs enfants scolarisés, en proposant des produits nocifs qui, à la longue, deviennent des poisons qui contrarient fortement le développement et l’épanouissement des enfants.
Ania Nait Chalal