Pour certains, il s’agit de vraies légendes de notre football ayant, chacune en son temps, tutoyé les cimes. Et le CR Zaouia, un quartier sans histoire et sorti presque de nulle part, vient de signer un fabuleux exploit en Coupe d’Algérie avec une présence en demi-finales, se propose, bien malgré lui, de rouvrir de vieilles blessures pour d’ex- sociétaires de l’élite disparus depuis longtemps des radars. À l’image notamment du couple d’Oum El Bouaghi, en l’occurrence l’USM Aïn Beïda et l’US Chaouia dont l’explosif derby finira dans une indescriptible pagaille. En queue de poisson. Des violences inouïes.
Azouaou Aghilas
Cinq étages en dessous
Quoi qu’il adviendra lorsque l’auguste dame fera ses choix à l’occasion de l’avant-dernière étape avant d’inviter celui qui saura au mieux user de ses charmes (et si elle décidait à nouveau d’opter pour la surprise en avançant la main dans la main avec cet iconoclaste club amateur, représentant la Mitidja, en compagnie du sigle phare, son aîné l’USM Blida qui doit patienter avant d’être fixé sur son avenir dans cette épreuve-reine qui ne reconnaît pas souvent la sacro-sainte logique, et pourquoi pas, en cas de qualification face à la JSK, devoir croiser le fer avec un client risquant de profiter d’un derby inédit pour, à nouveau, briller et brouiller bien des cartes et s’inviter en finale) pour la séduire, il est clair maintenant que le CR Zaouia, que personne n’attendait à pareille fête et à un stade aussi avancé, restera, pour la postérité, comme l’incontestable révélation de cette édition 2017-2018. En disposant, avec le mérite que l’on sait (dans les prolongations après avoir été mené au score), du leader de la Ligue 2 «Mobilis», l’AS Aïn M’lila pour ne pas la nommer et qui caracole en tête du second palier de l’élite depuis pratiquement le coup d’envoi de l’exercice en cours et qui avance doucement mais sûrement vers une accession plus que dans ses cordes une saison seulement après être passé au travers des mailles d’un palier (la Division Nationale Amateur, DNA en abréviation ) d’où l’on ne revient que très difficilement, pour certains un véritable cimetière d’authentiques (et les noms de ces illustres noms rayés de la carte de notre ballon rond ne manquent pas) champions, ce petit quartier de la ville des «Roses», difficile à situer sur une carte, s’il s’est chargé de confirmer tous les attraits qu’exerce une compétition à nulle autre pareille et toujours prête à faire les choix les plus imprévisibles en signant (il peut espérer mieux et pourquoi pas une victoire finale) une invraisemblable présence dans le carré d’as, et fait les choux gras d’une presse sportive (et pas seulement) aussi bien sous le charme que surprise par tant d’allant, de talent et d’insolence, ne semble pas, au plus fort de la folie populaire qui s’est emparée de son public, mesurer la portée de ce singulier pied de nez à la logique que seule, encore une fois, le trophée aux grandes oreilles (il ne s’agit certes pas de la LDC européenne, mais celle-là sait également son pouvoir sans limites) permet.
Moments de … gloire !
Pendant ce temps-là, à l’est du pays, se jouait de véritables mélodrames mettant en présence, dans l’équivalent de notre 3e division (la DNA où activent bien d’illustres sigles) d’anciennes grosses pointures perdues à jamais dans les méandres d’un véritable labyrinthe d’où il n’est jamais évident de revenir. Retrouver la lumière.
Pendant qu’un véritable talent (encore un et pas le dernier on peut le parier) sacrifié sur l’autel du bricolage, le revenant Redouane Bouziane Hadj Sadok (ils ne sont pas nombreux ceux qui se souviennent de ce jeune joueur de 18 ans à qui on promettait monts et merveilles après s’être imposé dans le fameux jeu de télé-réalité Soccastar en 2005 avec, pour grosse récompense, une place dans la prestigieuse académie de Newcastle qui devait lui ouvrir les portes de la Premier League anglaise mais qui n’aura jamais la chance de voir ses espoirs concrétisés en raison d’ une étrange histoire de visa avant de figurer carrément dans la longue liste des promesses à jamais perdues) faisait plier l’ASAM et envoyait son équipe dans la cour des grands dans la plus populaire des compétitions, l’USM Annaba (ça ne vous dit rien ?) signait un succès étriqué et sur la plus petite des marges (1-0).
Dans la douleur, le onze du Seybouse, désormais drivé par Mouassa (un coach rompu à ce genre d’exercice, c’est-à-dire le challenge de l’accession) empochait trois autres unités et prenait le large en tête du groupe «Est» de la Division nationale amateur à l’issue de la 21e journée, les «Tuniques Rouges» comptant dans la foulée six points d’avance sur leur nouveau dauphin l’USM Khenchela qui ne dit peut-être pas grand-chose pour les plus jeunes mais qui a, en son temps, dans les années 70, connu quelques moments de gloire. Jusque-là, rien de bien spécial. Sauf que, bien plus bas au classement général provisoire, on retrouve (merci le CR Zaouia de remuer le couteau dans une plaie béante pour un certain Lyamine Baghloul, keeper inénarrable et héros malheureux d’une certaine finale perdue à l’arrache contre la grande JSK un certain an de grâce 1986) l’Entente de Collo aujourd’hui plongée dans les abysses et qui, signe des temps, enfile le costume peu recommandable de lanterne-rouge à un petit point de l’avant-dernier qui n’est pas inconnu également des gazettes. Une certaine USM Aïn Beïda qui lutte (grandeur et décadence, à l’exemple de nombreux autres dans les «poules» Ouest et Centre) pour un hypothétique maintien que son voisin de palier, l’US Chaouia du fantasque président Abdelmadjid Yahi et qui compte à son actif (excusez du peu) un titre de champion d’Algérie en 1993 et une super coupe d’Algérie en 1994, s’est chargée, à l’arrivée d’une explication heurtée (une fin de match particulièrement violente, de nombreux blessés et l’utilisation d’armes à feu ayant été signalés sur fond d’une fin de saison de tous les dangers) de rendre encore plus difficile.
Petits poucets et… grands gâchis
Le petit poucet CR Zaouia, sans crier gare, sans se poser de questions, a pu et su faire la différence dans l’extra-time à un moment (92emn) clef de la partie grâce justement à ce joueur ressorti finalement de nulle part qui se chargera de le porter sur ses épaules en s’imposant comme l’artisan principal (Hadj Sadok, son homme providentiel scorera successivement face au NC Magra et l’IRB Belkheir lors des deux précédents tours et peut logiquement aspirer, pourquoi pas, à un retour en Ligue1 dès la saison prochaine pour peu qu’on lui redonne une chance) d’un vrai conte de fées. Un exploit et la possibilité, le droit, de rêver à plus grand. Comme, par enchantement, animer le super show du «5 Juillet » en mai prochain devant les caméras du monde entier. Pour dire et rappeler que tout reste possible en football. Aussi sûrement que les chutes les plus imprévisibles ou les disparitions ne sont pas à écarter. L’USM Annaba, en passe de sortir de son cauchemar en se rapprochant de la Ligue 2, l’US Chaouia, l’USM Aïn Beïda, l’Entente de Collo, l’USM Khenchela, acteurs principaux d’un niveau de compétition virant au purgatoire (on parle, à bon escient, de véritable enfer ), ont-ils les moyens de conjurer les mauvais sorts même si les vieux démons du bricolage (une tradition à l’algérienne dans une discipline où tout le monde fait tout et n’importe quoi) ont la peau dure. S’imposent en maîtres absolus de lieux devenus, pour des raisons (violences récurrentes, scandales à répétition de corruption, pour ne citer que les principaux maux), infréquentables. Le CR Zaouia une simple leçon à méditer par les plus «grands» ? Nous dirons les futurs «petits» condamnés à leur tour à l’oubli. Allonger la liste des pertes et profits d’un football algérien au fond du trou. Dans la tourmente et en mal de repères. Un chapeau bas à tous les cendrillons qui viennent à chaque édition, à chaque tour qu’ils animent, nous rappeler combien les temps sont durs pour un ballon algérien plus du tout aussi rond et rebondissant toujours aussi mal. Surtout…
A. A.