Accueil ACTUALITÉ Crise économique : l’Algérie dans le rouge ?

Crise économique : l’Algérie dans le rouge ?

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Tout le monde s’accorde à dire que les indices économiques de l’Algérie se sont versés dans le rouge, en raison de la chute des cours du pétrole qui ont affecté la santé économique des grandes puissances du monde.

De sombres perspectives sont en effet à relever dans l’évolution des équilibres macro-financiers internes et externes du pays. Plusieurs institutions financières et énergétiques internationales ont recommandé, ces derniers jours, à l’Algérie d’accélérer ses réformes économiques, afin d’éviter le pire dans le contexte de la baisse des revenus pétroliers. Les signaux rouges annoncés par les Institutions de Bretton Woods (la Banque mondiale et le FMI), concernant la situation macroéconomique de l’Algérie et ses perspectives, à court et moyen terme, font craindre le pire. Ainsi, dans une récente tribune sur la situation économique en Algérie, le chef de Mission pour l’Algérie au FMI relève que «l’économie algérienne aborde un tournant décisif». Selon Jean-François Dauphin, qui a effectué un voyage en Algérie en juillet dernier, «le repli des cours du pétrole fait craindre pour les perspectives économiques de cette nation tributaire de l’or noir». «Pour mieux saisir les effets de ce choc, souligne-t-il, il faut se rappeler que le secteur des hydrocarbures a représenté plus de 95% des exportations, deux tiers des recettes budgétaires, et un tiers du PIB». Et de relativiser : «Heureusement, le pays avait des volants de sécurité en place, sous forme d’épargne budgétaire, de réserves internationales, et d’un faible niveau d’endettement, ce qui lui a permis dans un premier temps d’absorber le choc». Tout en louant les réformes mises en place par le gouvernement, «en instaurant notamment une diminution progressive des subventions énergétiques coûteuses et inéquitables, en améliorant le climat des affaires, et en adoptant un nouveau code des investissements», Jean-François Dauphin estime, néanmoins, que «le pays peut encore réduire sa dépendance à l’égard des recettes pétrolières et diversifier son économie».

Une situation financière qui ne cesse de se dégrader
Le FMI qui a recommandé une série de mesures à l’Algérie ne manque pas de rappeler que le recours à l’endettement extérieur peut aider le pays. Cependant, un retour à l’endettement extérieur semble inévitable, puisque l’Institution de Bretton Woods prévoit une dette extérieure brute de 15 milliards de dollars en 2018. Du côté des spécialistes, on estime que la position financière extérieure du pays, qui ne «cesse de se dégrader», suite à la baisse des prix du pétrole, «devrait rentrer dans une phase presque déficitaire à partir de la fin de l’année 2018». Ainsi, il convient de rappeler que les réserves de change s’établiront, selon les prévisions du FMI, à quelque 60 milliards de dollars, soit un solde en devises qui ne couvrira que 13 mois d’importation (au rythme du volume des importations actuelles). Pour un économiste de l’université de Tizi Ouzou, «le FMI prévoit un niveau de réserves de change de 51 milliards de dollars pour 2020, soit seulement une capacité permettant de couvrir 10 mois d’importation». Mais le pire est à craindre. En effet, ces soldes prévisionnels sont calculés en se basant sur un éventuel redressement des prix du pétrole qui s’établiront à 65 dollars en 2017, 70 dollars en 2018 et 80 dollars en 2020. Mais d’ici là le redressement des cours du baril ne constituera plus une solution et les recettes pétrolières ne seront plus en mesure de faire face aux grands déficits budgétaires.

Les perspectives de la BM sont réalistes
Pour sa part, le professeur Abderrahmane Mebtoul, économiste et expert, est revenu sur les chiffres fournis avant-hier par la Banque d’Algérie, relatifs aux réserves de change et qui contredisent les prévisions de la Banque mondiale. Alors que la Banque d’Algérie a assuré que le niveau des réserves de change à fin 2018 sera «nettement supérieur» à celui des «60 milliards de dollars» avancé par la BM, en raison des effets de la consolidation budgétaire sur ces réserves, Mebtoul a regretté que la Banque centrale n’a pas expliqué comment celle-ci compte réaliser ces objectifs. En effet, rappelant que les données de la BM reposent essentiellement sur les chiffres de la Banque d’Algérie, l’expert s’est interrogé “quelles sont les mesures préconisées pour maintenir les réserves de change à plus de 122 milliards de dollars, à la fin 2016. Ainsi, il n’a pas manqué à appeler à plus de précisions quant aux mesures engagées par la BA. Côté solutions, l’expert a affirmé que trois mesures doivent être prises en urgence. Tout d’abord, il soulignera l’impératif d’aller vers des réformes profondes. Pour lui, dans la mesure où les réserves de changes vont s’établir à 122 milliards de dollar, l’exécutif est appelé à investir dans de vraies réformes qui assurent un développement durable.
En deuxième lieu, Mebtoul a signalé l’importance d’aller vers des subventions ciblées. Et enfin, l’économiste préconise de recourir à un endettement ciblé. Néanmoins, l’effondrement de la monnaie algérienne face à l’euro risque de s’aggraver encore davantage d’ici 2018 ou 2019, prévient le professeur Mebtoul. Il fait remarquer que «dans la mesure où les réserves de change tendaient vers zéro à l’horizon 2018-2019, en cas de non relèvement de la production et de la productivité, et si les cours du pétrole se maintiennent à moins de 40/50 dollars, l’euro sur le marché officiel sera côté à 200 dinars sur le marché parallèle», ce qui se répercutera davantage sur les ménages et les importations en général. Le risque de se retrouver dans une situation économique très précaire, en raison d’une monnaie très faible va procurer aux Algériens d’atroces misères.
Estimant que le rapport de la BM est bon, l’économiste a appelé à plus de réalisme. Comme l’a très bien dit le FMI : «C’est la dernière chance pour l’Algérie».
Lamia Boufassa

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