Pour Barack Obama, l’Etat islamique, qui s’est emparé de pans entiers de territoire en Syrie et en Irak, est un «cancer». Si les États-Unis, qui bombardent les jihadistes en Irak depuis deux semaines, entendent vaincre l’État islamique, comment pourraient-ils s’y prendre ?
Intensifier les frappes aériennes ?
En deux semaines, le Pentagone a procédé à 93 frappes contre des cibles dans le nord de l’Irak pour protéger le personnel américain et aider les peshmergas kurdes et l’armée irakienne. Mais si Washington entend venir à bout de l’État islamique, les bombardements aériens devraient s’intensifier.
«Ce qu’il faut, c’est une intense campagne de bombardements. L’utilisation de la force aérienne doit ressembler à une tempête et non à une ondée», explique à l’AFP le général David Deptula, retraité de l’armée de l’Air, qui a notamment participé à l’invasion de l’Afghanistan en 2001. «C’est une opération de grande envergure, 24 heures sur 24 heures, 7 jours sur 7. La pression des forces aériennes doit être constante pour pouvoir stopper l’avancée (des jihadistes), les paralyser et les mettre hors service».
Selon lui, le Pentagone pourrait reproduire sa stratégie appliquée en Afghanistan, lorsqu’il bombardait les talibans depuis les airs, permettant à l’Alliance du Nord de progresser au sol.
Des troupes de combat au sol ?
Les États-Unis ont environ 850 soldats en Irak pour épauler les peshmergas et les forces irakiennes et protéger les Américains. Mais, deux ans et demi après le retrait du dernier soldat américain, Barack Obama exclut d’envoyer des troupes de combat au sol. «La stratégie à long terme va consister à envoyer des troupes au sol pour combattre l’Etat islamique — des troupes irakiennes et kurdes», a encore souligné vendredi Ben Rhodes, le conseiller adjoint à la sécurité nationale du président américain.
Intervenir en Syrie ?
Les jihadistes font fi de la frontière entre l’Irak et la Syrie. Comme l’a dit le chef d’état-major interarmées américain, le général Martin Dempsey, l’État islamique «peut-il être vaincu sans que l’on s’attaque à sa branche installée en Syrie? La réponse est non». Ben Rhodes a d’ailleurs laissé la porte ouverte à l’option syrienne, puisque «nous ne nous sentons pas limités par les frontières». Pour Anthony Cordesman, du Center for International and Strategic Studies, Washington n’aurait pas de mal à justifier une intervention en Syrie. «En invoquant la Charte des Nations unies, on peut clairement prouver que le gouvernement syrien ne protège pas la Syrie et que (Washington) est en état de légitime défense», après l’exécution du journaliste américain James Foley, dit-il à l’AFP.
Quels alliés ?
Les Etats-Unis ne sauraient venir à bout de l’Etat islamique à eux seuls, pour la seule raison que les conflits en Irak et en Syrie impliquent à divers degrés tous les voisins de ces deux pays: la Turquie, l’Iran, le Liban et les pays du Golfe. Certains jugent ainsi que la Turquie, alliée de Washington au sein de l’Otan, laisse les candidats au jihad passer trop facilement en Syrie. Du coup, Zalmay Khalilzad, qui a été ambassadeur des États-Unis en Irak, juge dans The National Interest que Washington «devrait promouvoir une coopération englobant l’Iran, la Turquie et l’Arabie saoudite».
Les alliés européens de Washington ont quant à eux cautionné la semaine dernière les livraisons d’armes aux combattants kurdes. Pour justifier leur combat, les Etats-Unis ne manquent pas, comme l’a fait le général Dempsey jeudi, d’évoquer les risques que représente le retour dans leur pays européen d’origine des jihadistes.
Quel rôle pour les Irakiens sunnites ?
Les Arabes sunnites représentent environ 20% de la population irakienne et se sentent stigmatisés par le pouvoir chiite, poussant certains à tolérer les exactions de l’État islamique. Depuis la nomination de Haïdar al-Abadi à la tête du gouvernement, Washington n’a de cesse de l’appeler à répondre aux doléances de toutes les minorités. L’idée est de pousser les sunnites à rejeter les jihadistes en leur «donnant du pouvoir et en partageant les revenus» du pétrole avec eux, explique Cordesman.