Des personnalités espagnoles de divers secteurs dont des hommes politiques avaient averti que l’Espagne était « le grand perdant » après la décision de l’Algérie, le 8 juin 2022, de suspendre le Traité d’amitié, de bon voisinage et de coopération entre les deux pays.
Ce jugement a été émis immédiatement après la décision de l’Algérie prise suite au revirement du Premier ministre espagnol, Pedro Sanchez, vis-à-vis du conflit au Sahara occidental, alors que côté officiel, à Madrid, on estimait et laissait croire à l’opinion publique espagnole que la question était sans importance. Mais, à mesure que les conséquences d’un tel acte se révélaient, le gouvernement espagnol s’est retrouvé isolé dans sa propre classe politique. Des mois après, les faits, appuyés sur des chiffres, donnent raison aux voix lucides qui avaient prédit que l’Espagne serait le grand perdant dans son conflit diplomatique avec l’Algérie. Les preuves sont fournies par les médias espagnols citant les données du secrétaire d’État espagnol aux Affaires étrangères. On apprend ainsi que les ventes des entreprises espagnoles à l’Algérie n’ont enregistré que 28,6 millions d’euros en juillet dernier et 66,6 millions en juin, avec deux baisses de 81,6% et 61,8% par rapport à l’année dernière, respectivement. Les mêmes sources font remarquer que les chutes sont encore plus importantes si on les compare aux records de ces mêmes mois en 2019, c’est-à-dire la dernière année marquée par des relations commerciales normales et non affectées par la pandémie : avec des baisses de 87,5 % en juillet (228 millions en 2019) et de 72 % en juin (240 millions il y a trois ans). L’Espagne a exporté 1 888 millions d’euros vers le pays du Maghreb en 2021, selon le secrétaire d’État au Commerce. En 2019, dernière année avant les limitations imposées par la pandémie, le chiffre est passé à 2 906 millions. D’après les médias espagnols, les ventes espagnoles vers l’Algérie accumulent deux mois de fortes baisses après la décision d’Alger de geler les prélèvements automatiques pour freiner le commerce bilatéral. Ils font constater que « le gouvernement admet que le blocus commercial de l’Algérie se poursuit après une baisse de 80% des exportations ». Les relations « ne sont pas normalisées » et il y a « un blocage dans certaines opérations », comme l’a reconnu lundi le ministre des Affaires étrangères José Manuel Albares, cité par les mêmes médias. On sait que Madrid a essayé de faire intervenir les instances de l’Union européenne en envoyant des informations à Bruxelles sur 81 problèmes commerciaux subis par des entreprises espagnoles, en prétendant qu’ils pourraient violer le traité entre l’UE et l’Algérie, selon des données jusqu’au 3 août. Il s’agit « d’incidents de paralysie des opérations dans l’une quelconque des phases de la procédure commerciale, de la préparation des commandes sans prélèvement automatique au blocage direct en douane et au règlement des paiements », d’après Madrid. Toujours selon les sources médiatiques espagnoles, les entreprises espagnoles présentes en Algérie ne cachent pas leur plus grande inquiétude face au coup porté à leurs affaires, qui est à l’origine du choc diplomatique entre l’Algérie et l’Espagne.
Les entreprises ont insisté ces derniers mois sur le fait que les exportations vers l’Algérie étaient effectivement bloquées et elles craignent que l’affrontement diplomatique ne s’éternise. Depuis quelques semaines, de temps à autre, des médias spéculent sur un retour rapide et miraculeux à la « normale » dans les relations entre l’Algérie et l’Espagne., toutes les occasions étant bonnes pour remettre au-devant de l’actualité cette illusion. A ce jour, aucune information officielle n’a été rendue publique à ce sujet par les autorités ou les institutions compétentes.
M’hamed Rebah