Des dizaines de moudjahidine, de fils de chouhadas et de moudjahidine, ainsi que d’autres citoyens, ont rallié, dans la matinée du vendredi dernier, le lieudit « Ighzer n’Souk », à quelques encablures du village Maâmar, dans la commune et daïra de Draâ El Mizan, à 40 km au sud du chef-lieu de wilaya de Tizi-Ouzou, pour se recueillir devant la stèle qui y est érigée à la mémoire du commandant Ali Bennour et de l’infirmier-major de l’ALN, Ramdane Oukil. Ce recueillement, suivi d’une waâda (offrande) en l’honneur de plus d’une centaine de personnes venues de plusieurs régions du pays (Alger, Bouira, Béjaïa, Boumerdès, Tizi-Ouzou…), a été organisé pour commémorer le 59e anniversaire de la mort de ces deux vaillants maquisards, blessés gravement lors d’un accrochage en cette zone, avant d’être lâchement achevés, le 21 octobre 1959, à l’issue d’atroces, mais vaines, séances de tortures par des parachutistes français. Etaient présents notamment d’anciens officiers de l’ALN, tels Djoudi Attoumi, écrivain et ancien secrétaire du colonel Amirouche, Mohand Ou-Ramdane Hachour, SG de l’ONM de Tizi-Ouzou, Si Ouali Aït Ahmed, président de l’association « Tagrawla 1954-1962 », El Hadj Youcef Belkacemi, Ramdane Sana, président de l’association des grands invalides de guerre, Mohand Saïd Chaalal, dit « Sportif », Slimane Bennour (frère du chahid), Akli Lamri de Assi Youcef (Boghni), Si El Ouahab de Dellys, Hocine Chettabi, Mohand-Tahar Yala, les responsables du Musée régional du moudjahid de Tizi Ouzou, etc. Certains de ces anciens maquisards ayant connu l’un ou les deux martyrs, ont donné de précieux témoignages sur le parcours et les circonstances de la mort des deux chahids. L’on a appris ainsi de Si Mohand Ou-Ramdane Hachour que Ramdane Oukil était un brillant étudiant qui a rejoint l’ALN dans la zone 4 de la Wilaya III, pour y devenir un infirmier major, tandis que Si Ali Moh n-Ali Bennour a gravé des échelons en passant de capitaine à chef de la zone 4, puis commandant, grade auquel il a été élevé par le colonel Amirouche, à l’issue de sa réunion, le 4 mars 1959, à Ath Ouabane, avec les officiers et djounouds de la wilaya III. Le même orateur ajoute : «C’est à mon arrivée à Ath Ouabane avec ma section, de retour des Aurès, avec des habits tout usés, que j’ai appris la terrible nouvelle de la mort du commandant Ali Bennour et de Ramdane Oukil. Je discutai avec Dda L’Bachir Yaha, (le père d’Abdelhafid Yaha), qui me disait qu’il n’y a plus d’organisation, la wilaya III était gravement éprouvée par l’opération « Jumelles ». J’y ai retrouvé Boubchir et nous y avions pu ainsi, avec le groupe d’Ath Ouabane, rétablir le contact avec la zone 4, puis le lieutenant de Si Mohand Oulhadj, appelé Belaouche…». Par ailleurs, Hocine Bennour, le fils du martyr, dénoncera l’état délabré de la stèle de ces deux chahids, ainsi que le manque de considération de la part des responsables concernés à l’égard du chahid, qui n’a même pas de titre de « cadre de la nation », comme c’est le cas aussi pour beaucoup d’autres, tels Mohand El Hadj de Tafoughalt, de Ali Hamou… Alors que tous les chefs de zones dans la wilaya, on les a immortalisés par des baptisations en leurs noms de rues et de structures publiques à Tizi Ouzou, pour Ali Bennour, niet ! Et dire que quasiment toute sa famille (frères, pères, neveux, oncles…) est tombée au champ d’honneur les armes à la main… Allez comprendre quelque chose !», s’offusqua le fils du chahid. Présent sur place, le chef de daïra de Draâ El Mizan rassurera qu’il œuvrera de toute son énergie, comme il l’a déjà fait par le passé, si ce n’est le manque de finances, notamment pour la restauration de la stèle, promettant d’immortaliser sous peu dans sa région le nom de ce vaillant martyr, «un novembriste, comme son père et ses frères, un des chefs de groupes du déclenchement du 1er Novembre 1954, un des adjoints de Si Moh Touil (Hocine Hamouche), etc.», précisera Si Ouali Aït Ahmed, invitant à organiser une journée d’études au Musée régional pour que toutes ces personnes y apportent leurs témoignages sur ce glorieux martyr. A noter qu’Ali Moh n-Ali, que tout le monde appelait « Ammi Ali » par respect à son âge et son caractère de juste et de profondément humain, avait été entraîné dans le mouvement national par son père, Mohamed Ben Ali (1896). Les deux, seront rejoints successivement au maquis par les trois fils et frères Rezki, Rabah et Slimane, le seul en vie. Le père Bennour et trois de ses enfants, tomberont, les armes à la main, durant l’Opération Jumelles (juillet-décembre 1959). Ils étaient âgés respectivement de 63 ans, de 32 ans, de 30 ans et de 28 ans. Ramdane Oukil, l’infirmier compagnon d’armes dans la même zone, tué le même jour et au même endroit avec son chef, Ali Bennour, avait juste 26 ans. Dans l’après midi, une waâda (déjeuner de couscous viande) a été offerte par la famille Bennour à Tadmaït, à la mémoire des chouhadas et en l’honneur des dizaines de personnes présentes.
S. Yermèche