En préférant le traitement social aux choix économiques, comme la préservation des postes d’emploi et l’effacement des dettes, se chiffrant en milliards de dinars des entreprises, par le Trésor public, l’Algérie a organisé la débâcle de son industrie. Plus de vingt ans d’erreurs sans jamais pouvoir dépasser le faible chiffre du PIB, actuellement établi à 5 %, croit savoir Adel Bensaci Président du Conseil national consultatif pour la promotion de la petite et moyenne entreprise (CNCP de la PME).
S’exprimant, hier, à l’émission « Invité de la rédaction » de la Chaîne 3 de la Radio nationale, l’expert a indiqué que le développement de l’industrie doit impérativement passer par le développement du secteur de la sous-traitance en précisant que les entreprises exerçant dans ce domaine existent et qu’il nous faut juste une réorganisation. Évoquant la loi sur la sous-traitance, l’invité dit qu’il y a un décret qui est sorti il y a trois semaines et qui est très positif, puisqu’ «il a répondu à nos attentes », donc aux doléances des PME. « Ce décret a octroyé un certain nombre d’avantages aux sous-traitants où qu’ils soient. On évoque plus, donc les zones Sud, Nord et Hauts-Plateaux, il suffit juste de justifier son activité de sous-traitance avec tel ou tel constructeur », a-t-il expliqué. Selon lui, cela va nous permettre de créer la zone franche Algérie,
« non seulement en avantageant les sous-traitants, mais aussi les constructeurs, puisque ces derniers vont indirectement en bénéficier », a-t-il fait remarquer. Concernant le tissu industriel actuel de l’Algérie, Adel Bensaci a estimé que contrairement aux années 90, on a la chance d’avoir un tissu et des équipements modernes. « L’Algérie a toutes les opportunités pour pouvoir rebondir. C’est une question d’organisation, fait-il rappeler, pour revenir à un management efficace et chiffré.
Selon l’expert, il y a aussi d’autres points très importants, notamment la préservation de l’entreprise et des emplois et cela passe impérativement par un bon management. « Il faudrait laisser faire nos managers, qui sont d’un très bon niveau, et sortir ainsi de la politique du management social », précise-t-il. La dépénalisation de l’acte de gestion pose, réellement problème, indique-t-il, estimant qu’«il faudrait mettre en place une stratégie qui permettra aux managers de répondre à des objectifs chiffrés, dont le principal est d’augmenter le chiffre d’affaires, les intrants et le taux d’utilisation des équipements, non le maintien de l’emploi à tout prix », conclut-il. « L’entreprise ne peut pas fonctionner avec les subsides de l’État, notamment l’effacement des dettes par le trésor tous les X années (…) On en a vu les limites, on parle de centaines de milliards de dinars quand même. Ce n’est plus acceptable et ce sera plus supportable par l’État », a-t-il décortiqué. Il a estimé que le maintien de coût élevé de l’emploi dans certaines entreprises publiques comme un véritable problème handicapant ces entreprises à se développer. «À mon avis, les entreprises disposent d’un tissu industriel suffisant pour faire face à une demande qui existe déjà. Maintenant il faut mettre en place une stratégie qui permettra au manager de répondre à des objectifs chiffrés, dont l’objectif premier serait l’augmentation du chiffre d’affaires et aussi augmenter les intrants et le taux d’utilisation des équipements et non pas le maintien de l’emploi à tout prix. Ce n’est pas possible. On n’est pas, excusez-moi pour le terme, dans des garderies pour grandes personnes. Ce sont des entreprises publiques qui se doivent de gagner de l’argent », a-t-il expliqué.
Pour l’expert, si l’on veut sortir du sous-développement on a besoin de 7 à 8 % de croissance annuellement de l’économie pour les dix prochaines années. Les entreprises algériennes sont résilientes et peuvent faire face au choc, soutien Adel Bensaci, mais, poin-t-il, il y a un manque de soutien de l’État. « Réellement, on sent la solitude des entrepreneurs. Le président de la République a demandé à ce qu’il y ait un soutien des banques et du secteur financier, malheureusement cela n’est pas fait, et on va perdre une bonne partie de notre tissu industriel si rien ne se fera », s’est-il désolé. « Les gens pensent que c’est parce qu’en 2020 il n’y avait pas eu des fermetures massives que ça va continuer comme ça. Non ; à un certain moment il y aura des limites (…) La problématique du manque de devise fera que l’Algérie va devoir compter dans l’avenir uniquement sur ses enfants », a-t-il fait observer.
Hamid Mecheri