La commune de Bab-El-Oued est située au Nord de la capitale, Alger. Elle est délimitée au Nord-Est par le front de mer, à l’Ouest par le quartier de Bologhine (ex-Saint –Eugène) et la colline de Baïnem, au Sud-Ouest par le quartier de Frais-Vallon, et à l’Est par la Casbah. Bab-El-Oued est en contrebas de Bouzareah. Selon les statistiques que nous avons pu avoir de Akli Taskrat, secrétaire général de la commune, qui nous a reçus dans son bureau au siège de la commune de Bab-El-Oued, celle ci compte près de 64 000 habitants et est dotée de quatre lycées, dont les plus en vue est le mythique, grand Lycée Emir-Abdelkader, qui a vu un nombre important de ses élèves, plus tard, briller, par leurs compétences dans divers domaines professionnels, et aussi les Lycées de filles, Frantz-Fanon, Okba et Said-Touati, alors que pour le primaire et le moyen, la commune compte 22 établissements. Le budget de l’Assemblée populaire communale (APC) se situe entre 30 et 31 milliards de centimes, selon notre interlocuteur. Deux marchés de légumes et fruits sont à Bab-el-Oued, mais leur renommée dépasse de très loin les frontières de la commune il s’agit du mythique marché des Trois-horloges et celui de Nelson ou Atlas, Affichant des prix accessibles, aux petites et moyennes bourses. même si celui des Trois-horloges, davantage que son rival, à l’entrée de Bab-el-oued, en venant du Boulevard 1er Novembre, de la place des martyrs ou de la Rampe Lounis-Arezki, (ex-Rampe Vallée) , les deux sont pris d’assaut, par les clients, dès les premières heures de la matinée, surtout ceux habitant les quartiers de Bab-el-Oued et ses environs.
« Enfin, les travaux de réfection… mais qui avancent à pas de tortue »
En dépit de nombreux travaux d’aménagement entrepris à travers la commune mythique, le cœur de la Capitale, comme tiennent à le souligner les Algérois, Bab-el-Oued peine, à ce jour, à se débarrasser de nombreux problèmes qui défigurent, ce qu’ont été ses quartiers, notamment au lendemain de l’indépendance, au début des années 80, en plus de la mauvaise gestion locale, des différentes assemblées qui se sont succédé, depuis, outre le laisser aller de nombreux de ses habitants et les traces des passants qui défilent en longueur de journée, à la commune des trois horloges et de mille et une histoires. Ses habitants, les Babelouédiens, comptent depuis le lancement des travaux de réfection et des coups de peinture, ayant désertés, depuis très longtemps, plus de 30 ans les belles façades des immeubles de Bab-El-Oued, datant de la période coloniale, les heures et les jours, pour voir enfin les rues, les boulevards, les bâtisses et les espaces publics du cœur battant d’Alger, « redevenir rayonnants, comme jadis » nous a confié, Ammi Hamid, qui vit à Bab-el-Oued, depuis le milieu des années 60. Regrette, que le rythme des travaux avance à pas de fourmis, surtout que beaucoup reste encore à faire. C’est une aussi une course contre la montre, après des années d’abandon des pouvoirs publics, pour que les rues et les boulevards de Bab-El-Oued, retrouvent complètement leur splendeur d’avant. Après cette opération de lifting, Ammi Hamid insiste pour lancer son appel aux habitants et les nombreux passants qui rythment la vie quotidienne de sa commune, à faire «preuve de civisme et d’amour pour ce quartier, que les grands du chaâbi ont chanté» et de nous fredonner, l’extrait de la chanson « Allôo, Allô» du défunt el-Hachemi Guerouabi, chantant « netmana, n’chouf dik el djena, Bab-El-oued, ktir lem’hane (j’espère voir, ce paradis, qui est Bab-El-Oued, avec embuches (Ndlr)», pour exprimer son amour éternel à Bab-El-Oued.
BEO, mythique par ses histoires qui se racontent encore, pour en écrire d’autres
En cette saison estivale, même si le bleu de la mer attire plus que tout le regard des habitants, vacant à leurs occupations, sur le grand Boulevard du Commandant Abderrahmane-Mira, en descendant du Boulevard Abderrahmane Taleb, pour aller sur l’avenue Colonel-Lotfi, ou ceux préférant les hauteurs de Bab-El-Oued, les retraités, dans leur majorité, ont les croise, car ils n’ont pour loisirs que leurs rencontres, dans les espaces verts. Ces lieux qui sont témoins de leurs histoires racontées et leurs exploits, pour certains et les anecdotes de la vie pour d’autres, en attendant chacun son tour pour, enfin, jeter le double six de leur jeu préféré, unique distraction qui s’offre à eux, les dominos. Les activités culturelles, cinéma, concert de musique, notamment chaâbi, pièces de théâtres ainsi que les spectacles pour enfants, dans les salles ou en plein air, manquent cruellement à Bab-El-Oued, alors que des salles, celles ayant échappé au bradage, comme ce fut le cas de la Salle Le Maghreb (ex-Marignan), « sous les décombres depuis plus de vingt ans» déplorent les citoyens, notamment ceux qui n’ont pas oublié que c’était là, le plus grand écran de cinéma de l’Algérie, « alors que c’est encore possible de le récupérer, il suffit qu’il y ait de la bonne volonté chez nos responsables.». Un jeune homme, qui nous a raconté des histoires et des faits tenus de son défunt père, sur la vie jadis, dépassaient les frontières de nos salles de ciné, pour être non seulement présent mais également décrochant des prix de renoms. C’était du temps , de Keltoum, de Larbi Zekal, Rouiched, Mustapha El-Anka, Sabah Essaghira dans « Leila et les autres» ou Sid-Ali Kouiret , qui ne se lassait pas de se promener à Bab-El-Oued, lui qui a marqué par son jeu d’acteur, le film « Le retour de l’enfant prodigue » de Youcef Chahine, qui a vu la participation de celle qui est devenue par la suite, « la diva de la chanson arabe, Majda El-Roumi. La Salle Atlas « ex-Majestic», sur la rue Mohamed Seghir Saâdaoui, sauvée certes du mauvais sort qui s’est abattu sur d’autres salles de cinéma de Bab-el-Oued, et d’autres à travers le pays, a été rénovée, avec près de 800 millions de dinars, selon les déclarations, en 2007, de M Serraï, responsable au ministère de la Culture, lors de la réouverture de cette salle, pour abriter les festivités de la manifestation, « Alger, capitale de la culture arabe 2007» . Construite, en 1920, sur une superficie de près de 1500m², la salle Atlas, était considérée, des années durant, comme l’une des dix plus grandes salles de cinéma du monde, avec une capacité de 3500 places, outre sa spécificité propres à elle, à ce jour, étant est dotée d’un toit ouvrant. Connaissant, depuis sa réouverture, un programme riche et varié, tout le monde s’accorde à dire qu’elle ne peut à elle seule suffire, à répondre aux attentes, des mordus du cinéma et de d’autres spectacles, comme les pièces de théâtres et les sketchs. Les pouvoirs publics, dont la tutelle en charge de faire rayonner notre culture avec toute sa diversités, « doivent se pencher sérieusement » sur la question, pouvoir donner vie également aux nuits et jours des communes d’Alger, dont Bab-el-Oued, « comme c’était le cas, dans les années 60 et 70 » s’en rappelle une grand-mère en haïk, rencontrée non loin du lycée, Frantz-Fanon. Hormis les programmes pour enfants, devenus des rendez-vous, que les bambins babelouédiens et ceux venus de la Casbah, de Bologhnine et d’ailleurs, ne ratent pas, durant les week-end, des quatre saisons de l’année, la salle abrite, occasionnellement des activités, une tendance qui persiste à l’Atlas, comme ailleurs. Nombreux parmi ceux que nous avons rencontrés, nous parlent de cette commune mythique de la Capitale. Pour les plus âgés, ils se souviennent, des jours où ils ne rataient pas l’occasion de voir se défiler, à chaque lever du rideau rouge grenadine, de la salle Atlas, les filmes qui se projetaient, ou les artistes qui défilaient pour transmettre des moments de bonheur à écouter de la musique, chaâbie, du grand maître El-hadj M’hamed el Anka, ou El-Hachemi Guerouabi, ou ceux encore vivant, ayant assisté à la diva sud-africaine, et l’ algérienne de surcroît, la défunte Meriem Makiba, chantant « Ana Houra Fi el Djazaïr (Je suis libre en Algérie », sur la scène de la Salle Atlas. Ou les sketches dont les plus jeunes n’ont vu que des extraits sur le petit écran, alors que leur grands-parents et parents étaient aux premières loges pour voir les sketchs des défunts comédiens et uniques, dans leurs genre, l’inspecteur Tahar et son apprentis, et des années après d’autres se sont dépêché à la salle Atlas pour assister au spectacle de l’ONB, enflammant une salle pleine à craquer. Et des années auparavant, à guichet fermé, la poésie du Palestinien engagé Mahmoud Darwiche retentissait dans cette salle, au début des années 80, lors du spectacle du chanteur libanais engagé, Marcel Khalifa avec sa troupe El-Mayadeen, et tant d’autres artistes nationaux et étrangers qui se sont produits à l’ex-Majestic …Riche en nombre de salles de ciné, dont bon nombre ont été abandonnées, jusqu’à s’ébranler, intéressant d’autres pour édifier à leur place encore des centres de commerce, ou transformées en salles de fêtes, plus rentables en argent, pour ceux qui ne pensent pas à la nourriture de l’esprit de l’Algérien, les anciens regrettent les jours et les nuits, quand les salles de ciné de Bab-El-Oued, projetaient des Films, et abritaient des spectacles de qualité. Le temps ou le cinéma algérien, qui était à l’honneur en Algérie, parvenait au Monde, le temps où les plus grands réalisateurs ne perdaient pas l’occasion de venir en Algérie, comme le raconte si bien Ahmed Bedjaoui, l’animateur de l’émission de Télé Ciné-Club, « un rendez vous, avec le petit écran, que les Algériens ne rataient pas », se rappelle, un des citoyens.
L’incapacité et l’incompétence des élus handicapent l’ essor des potentialités de Bab-El-Oued
Autres manques ressentis après nos nombreuses discussions avec des habitants des quartiers de Bab-El-Oued, de divers horizons et tranches d’âge, les activités et la vie qui doivent être promues dans les espaces publics existant, à travers cette commune. De l’espace mitoyen au Marché Atlas (ex-Nelson), pouvant abriter des activités, notamment culturelles, concerts chaâbi, ateliers de dessins, de lecture de contes pour enfants ou spectacles de magie pour les bambins, qui dans leur majorité, n’ont pas fait des kilomètres pour pouvoir profiter des vacances, en ont bien besoin, ainsi que leurs parents. Un cadre exprime ses regrets de voir qu’ailleurs, citant notre voisin tunisien, « ce genre d’espace est aménagé et bien géré par les collectivités locales, alors que chez nous, ici, les responsables locaux se contentent d’animer quelques espaces et dont leur gestion est en deçà des normes et des attentes des citoyens ». Pour un des élus rencontrés au siège de l’APC de Bab-El-Oued, « les idées ne manquent pas pour rendre notre commune plus attrayante à travers diverses activités ». Selon le vice-président des affaires sociales, Laïchi Abderrahmane, « le travail de l’assemblée fait défaut à cause des divergences entre ses membres (entre les élus de la majorité et de l’opposition :NDlr) ». De l’autre côté, les citoyens, dont ceux ayant voté pour cette nouvelle assemblée, dont le président est d’obédience du Front des forces socialistes (FFS), ils déplorent d’entendre de la part des élus « nous allons faire, nous pensons faire, nous ne pouvons pas à défaut de moyens ou de prérogatives, ceci ou cela», alors que beaucoup de choses, selon eux, peuvent être faites, « sans remuer ciel et terre » selon l’expression d’un jeune rencontré au quartier des Trois-Horloges, à notre sortie de l’APC. Pour ce jeune « est-il sorcier d’organiser des tournois réguliers tout au long de l’été, de beach-volley, de foot, même de natation» au niveau des plages de Bab-El-Oued. Et à son ami de s’étonner de voire des écrans géants dressés, ailleurs, pour diffuser des spectacles de groupes de musique de renom ou des matchs du mondial de Russie, alors qu’ « à notre niveau les élus n’innovent en rien » si ce n’est, nous ajoute-t-il, « de temps en temps, ils dressent une scène à la placette el-Kettani, pour inviter, dans la plupart des cas, des chanteurs qui n’ont que le nom; quant à leur musique, c’est plus du vacarme que des notes musicales agréables à entendre, pourtant ce sont pas les bons groupes y compris amateurs qui manquent notamment à BEO .» souligne-t-il. Plus loin, une mère déplore l’absence d’activités théâtrales, « alors que c’est possible de les programmer même en plein air, à la placette El-Kettani, par exemple, pour bousculer un peu les activités routinières en ces lieux qui n’offrent que les même jeux à nos enfants qui ne cachent pas leur lassitude de se retrouver toujours avec les même décors et ambiance», nous confie-t-elle.
Un exploit de marcher sans trébucher, être supporteur de clubs de foot sans avoir la peur au ventre, mais les bonnes actions pérennes des citoyens
ne manquent pas à Bab-El-Oued
Un jeune homme rencontré, à proximité du marché de légumes et de fruits Atlas, ex-Nelson, venu acheter le bon pain, d’une des boulangeries les plus anciennes, celle de Bou-Lahmabal, regrette que l’espace mitoyen du marché soit laissé à l’abandon, quand parfois les bambins et les adolescents se donnent à cœur joie pour une partie de foot ou des tours de vélo. Sport populaire, les amoureux du ballon, à Bab-El-Oued, grands et petits, hommes et femmes, sont des supporteurs des deux plus grands clubs de l’Algérois, El Mouloudia et l’USMA, et d’autres ,en nombre beaucoup moindre, ont opté pour les couleurs rouge et blanc du Club de Belouizdad, CRB. Un héritage historique et également familial, comme nous le dit le jeune Mohamed rencontré sur le boulevard Mira, non loin du siège, portant les couleurs Rouge et Noir de l’USMA, qui a grandi, et étant aujourd’hui un père de famille, a vu étant enfant, son père et ses oncles, être des mordus supporteurs , des grands footballeurs de l’époque, Betrouni, jouant au Mouloudia, l’habile dribleur Kouci au CRB, et bien après Hadj Adlène à l’USMA . Le temps comme se rappelle, Rachid, ou aller au stade «était un moment de détente, de joie et de bonheur, avec peu de moyens» pas comme, aujourd’hui, poursuit-il « où le supporteur pénard assiste aux matchs avec la peur au ventre, avec la violence à laquelle nous assistons de nos jours sur nos stades » déplore-t-il. Pour les citoyens rencontrés, au Trois-Horloges, quartier mythique de Bab-el-Oued, ou bien ceux et celles, abordés, non loin, du siège de la CNAS ex-Monoprix leurs souvenirs d’enfance et de leur jeunesse demeurent des repères indétrônables, à ce jour, pour nous raconter, ce qu’étaient leurs sorties et balades à Bab-El-Oued, des moments de joie et de détente, que les bambins et les jeunes d’aujourd’hui ne peuvent vivre et connaître, à cause des mutations qu’a connu la société algérienne en général et les habitants de cette commune en particulier. Rien que de marcher sans se soucier qu’on peut trébucher, sur des trottoirs impraticables et subir, plus de deux semaines durant, une jambe en plâtre, , nous raconte une dame rencontrée sur le Boulevard Mira, « est un exploit en lui-même » nous lance-telle. Jadis petite, l’âge ou tomber est inévitable, « je m’en souviens pas de l’avoir vécu », alors que « l’année passée, à mon âge, je suis tombée, en marchant sur un trottoir refait de manière bâclée, j’ai dû rester deux semaines, avec plâtre à ma jambe droite». De nos jours, quand je prend ma petite fille, à titre d’exemple, pour déguster une glace, en ces jours de chaleur, chez Bensari, un des plus anciens à BEO et même sur la place d’Alger, situé sur l’Avenue Colonel-Lotfi, non loin de l’Etablissement primaire, Amina, ex-Franklin, « je l’ennuie avec mes expressions, attention en marchant, à chaque deux pas, de peur qu’elle subisse ce que j’ai vécu l’année dernière » nous confie-t-elle. Pour Nadia, parcourir les rues et des boulevards à Bab-El-Oued n’est plus aussi agréable que quand elle le faisait étant toute petite. Les amas d’ordures entassées dans les petites ruelles comme les grandes allées, « me répugnent, la gestion par les services concernés est déplorable, outre le manque de civisme chez des citoyens, et même les vendeurs des étalages informels qui laissent derrière eux un amas d’emballages, de cartons et de plastique» nous raconte-elle.
Poursuivant, elle insiste sur « le travail pénible des employés de Net-Com, qui avec des équipes réduites, ne peuvent passer et repasser à longueur de journée et de nuit » avant de se rappeler, le temps “ousortir les ordures ménagères était à une heure bien fixe” et de nous dire « c’était à partir de 20 heures, et tout le monde était réglé et c’était bien mieux » conclut-elle. La mauvaise gestion des élus locaux et des pouvoirs publics en général, « font que les choses ne s’améliorent pas à ce niveau» selon Ami Said qui, lui, nous raconte le temps où l’eau ne coulait pas dans les robinets comme aujourd’hui, alors que « le grand nettoyage des rues et des boulevards se faisait, par les services de la commune chaque semaine, le week-end ». D’autres habitants n’attendent pas, pour voir leur quartier embelli et propre. Les jeunes et habitants du boulevard Abderrahmane -Taleb, ont pris l’habitude retrousser les manches, une fois par mois à deux mois, pour arroser les plantes, on y trouve même du Jasmin, son parfum parvient jusqu’aux balcons des habitants ou les passants, empruntant les escaliers de ce Boulevard qui mène vers la Rue Mizon ou le Lycée Okba et Sidi-Abderrahmane. Des jeunes et moins jeunes, parfois sous les regards ou la participation, des anciens, munis des moyens du bord, comme le tuyau d’eau, qui sort du balcon d’un premier étage, pour arroser les plantes et la verdure, nettoyer les escaliers et les allées, par la même occasion, quand d’autres s’emploient à arracher et balayer les mauvaises herbes pour pouvoir en planter d’autres, des fleurs et du géranium. Un travail collectif volontaire de ces jeunes, l’expression de l’amour qu’ils ont pour leur quartier, en particulier et Bab-El-Oued en général, et espèrant que d’autres fassent de même….
Une des séquences phares du film la Bataille d’Alger, tournée au pied des escaliers du Bd Abderrahmane-Taleb
Le plus bruyant et le plus populaire des quartiers de la Capitale, ne désemplit pas, notamment en ces jours d’été, jusque tard dans la nuit. Les manèges et jeux d’enfants ayant occupé, depuis le début des vacances scolaires, la grande place d’El-Kettani attirent chaque jour et nuit que Dieu fait, des dizaines d’enfants, pour voler des petits moment de bonheur et de joie, que leur offrent ces unique distractions, qui pour beaucoup, s’en lassent, au bout d’une ou deux semaines, eux qui leur enfance les poussent à chercher tout le temps, le nouveau et la créativité. Deux objectifs, que ni les responsables locaux, ni les associations ont réussi à élaborer un plan et un programme, spécifique et riche en la matière, alors que c’est possible, au vu des potentialités que recèlent, Bab-El-Oued et les autres communes voisines. La petite plage longeant, le front de mer, grouillent d’enfants, accompagnés de leurs parents, pour n’avoir que la mer comme seule distraction. Alors qu’il suffit, d’organiser des tournois, sur place, aux petits et adolescents, enfants, de ramassage des plus belles petites pierres, de dessins sur sable, de jets de boule, ou de quelques mètres de course à la nage, pour ceux qui se débrouillent déjà, comme un poisson dans l’eau, le tout sous, le regard et l’attention des adultes, qu’ils soient, parents, responsables locaux, des services de la jeunesse et des sports ou de représentants d’associations…. «Serais-ce trop demander ? » s’est interrogé, un père de famille, accompagnant sa petite fille et ses deux garçons, parasol à la main, une glacière dans l’autre, pour leur offrir des moments en mer, après qu’ils aient réussi à décrocher de bons résultats scolaire.
Déplorant qu’il ne peut leur offrir, davantage, en allant quelque part en vacances, à l’est ou à l’ouest du pays, lui qui a des frais et des engagements financiers à assurer, pour pouvoir leur offrir un espace plus grand, lui qui vit dans une pièce cuisine, une maison, dans le cadre de l’AADL. Un autre nous dit, en parlant de la plage aménagée, du front de mer de Bab-El-Oued, non loin, de la piscine d’El-Kittani, qu’«avant c’était l’insécurité totale » et de laisser sortir, un soupire de soulagement avant de nous ajouter que « c’est un bon signe que la plage retrouve ses habitants, les familles des quartiers de Bab-El-Oued et même celles venant de la Casbah et d’ailleurs». Et à un autre que nous rencontrons, pas loin des jardins longeant le Boulevard Aberrahmane Taleb, la soixantaine, de nous raconter, que gosse, ne dépassant pas la hauteur des balcons, se rappelle, le tournage d’une des séquences du film de « la Bataille d’Alger » du réalisateur italien, Gillo Pontecorvo, sortie pour rappel, pour la première fois, sur les écrans en septembre 1966. Il s’agit de la séquence où un policier des autorités coloniales, poursuit-il, a été la cible d’une action d’un fidaî, qui après avoir tiré sur lui, marcha comme si de rien n’était, pour ne pas attirer l’attention, cacha son arme, dans un panier d’ordures, accroché à un arbre, pour par la suite, enjamber le jardin, mitoyen des escaliers, menant, arrivé en haut, à la Rue Maison ou vers la Rampe Lounis Arezki, sain et sauf. « c’est un très beau souvenir que je garde au fond de moi, et peut être, que c’est ça qui a laissé pousser en moi, l’amour du cinéma, d’ici et d’ailleurs, je me souviens que nos après-midi et nos soirées, en étant après jeune, les passais, entre le cinéma Les Variétés, Atlas, Le Maghreb (ex-Marignan), Tamgout (ex-Plaza) , des films étaient projetés, dont ceux que l’animateur inoubliable de l’émission Télé, Ciné-Club, Ahmed Bedjaoui ne se lassait pas de leur consacrer des émissions avec parfois des invités de renom», se rappelle ce passionné du septième art . Pour un autre habitant de cette commune, il est urgent pour les pouvoirs publics de procéder à la reprise en main de l’ensemble des salles de cinéma, d’Alger et d’ailleurs, dont celles de Bab-El-Oued, qui ne le sont pas encore. Hamid tient à nous rappeler, ceux qui ont oublié comme ceux qui ne le savent pas que « Le Maghreb comptait le plus grand écran de cinéma d’Algérie, si ce n’est pas aussi d’Afrique » et de nous ajouter que « le cinéma Tamgout était connu, pour être la salle de ciné qui projetait, en première, tout nouveau grand film. » et poursuit-il « la salle de ciné, les Variétés, son atmosphère et son apparence représentaient l’identité même du cinéma en général », a-t-il tenu à nous souligner, avant de nous lancer «quel gâchis !»
Les jardins et les placettes grouillent de monde en l’absence d’activités culturelles et sportives, pérennes et de qualité
Nombreux sont ceux qui se rappellent l’état des parcs et squares de Bab-el-Oued, du jardin de Prague (ex Marengo) qui si nous empruntant ses chemins nous arrivons à deux pas de Sidi Abderrahmane, et des jardins tout au long du Boulevard Taleb Abderahmane, qui s’étendent de quelques mètres du bleu de la mer, jusqu’à en haut, non loin, du rond point, où se dresse fièrement, le buste de Simón José Antonio de la Santísima Trinidad Bolívar en hommage à ce révolutionnaire de la République bolivarienne de Venezuela. Leur entretien fait défaut, si ce n’est des fois quand ses habitants s’en occupent. Les services des autorités locales, en charge, pointent deux à trois fois, par an, pour plus couper les quelques branches des arbres ou le gazon, dépassant de trop le niveau de la terre. Souvent des odeurs nauséabondes se dégagent de certains coins de ces jardins, abritant durant les nuits des SDF ou des malades, décidés à tourner le dos, à la vie que nous connaissons, souvent par la force des choses et le cours des circonstances qu’ils ont eu à vivre, jusqu’à perdre la raison. Mais Bab-el-Oued ne veut et voudrait pas tourner son dos à ce qui la fait vivre, notamment sa dimension méditerranéenne, qui s’offre à elle par son front de mer, longeant sa partie nord. Cette mer, que les yeux des Babelouédiens ne s’en lassent pas de la voir, la regarder et la contempler souvent, et elle leur rend, bien, en allégeant, leurs blessures, douleurs et chagrins, en hiver comme en été. Elle est au pied de celui qui l’approche pour mieux communier avec elle comme celui qui est loin, de loin, accoudé au balcon des immeubles des quartiers, ayant une vue sur mer, et ils sont nombreux. L’attachement des habitants de Bab-el-Oued à la mer et son bleu, est perpétuel si ce n’est vital, pour la majorité des générations qu’a connue cette commune mythique de la Capitale. Même si dans un passé non lointain, bon nombre de ses enfants, grand et petits, ont été happés par El-Hemla, submergeant de nulle part, un certain novembre de l’an 2001, et charriant tout ce qui était sur son passage, avant qu’elle s’ébranle, au fin fond d’une mer fortement agitée, les habitants et les millers de familles endeuillées par cette tragédie, ont su petit à petit faire preuve de courage, pour renouer avec le cours de la vie. Et ce fut encore le cas, bien avant, cette catastrophe naturelle, durantla décennie noire du terrorisme, lesquels ont assombri les jours, comme les nuits de Bab-el-Oued et l’ensemble du pays, le temps ou «la saveur du vivre ensemble a pris son envol» comme le chante, Meskoud « El-benna Daret Djenhine», et quelques années auparavant les évènements d’Octobre 88, à Bab-el-Oued en particulier, et à travers les régions du pays, en général. Bab-el-Oued, décidée à ne pas tourner le dos, aux simples choses qui font la saveur de la vie, de tous les jours. Les petits moments agréables du vivre ensemble, se manifestent à vue d’œil, là où nos pas nous prennent à travers ses rues et ses boulevards. Qu’il s’agisse des kaâdates (rencontres :ndlr) entre hommes dans les cafés, les jardins ou à quelques pas des immeubles de leurs quartiers. Ceux ayant sur leurs mains et visages les traces des années vécues, se racontent des histoires, commente l’actualité et font et défont le monde, avant de décider d’aller, déguster un morceau de Garantita, non loin des Trois horloges ou se faire une partie de cartes ou jeu de dominos, seuls loisirs qui s’offrent aux retraités de Bab-el-Oued. Et non loin d’eux, des bambins bruyants tentent de jouer au football ou le milieu de terrain de l’équipe de Croatie, Modrvic qu’ils viennent de découvrir, au Mondial de Russie, quand d’autres se contentent de faire des tours en vélo, heureux de montrer qu’ils sont champions à manier, les deux roues, sur un circuit, plein de trous et de bosses , en l’absence d’entretien des sols des jardins et des espaces publics. Accoudé sur le mur du front de mer, un mordus de la pêche, depuis son jeune âge, tente, avec sa canne à pêche, de s’offrir lui et sa petite familles, des poissons au déjeuner ou au diner, comme ça lui arrive souvent, nous a-t-il affirmé. Quand j’avas vingt ans, nous raconte-t-il, « comme chantait, El Merhoum El-Hachemi, je venais pêcher et je contemplais, avec grand plaisir le bleu turquoise, de cette mer, et de nos jours, ce n’est plus le cas », déplore-t-il « à cause de la pollution, cette couleur ne s’offre plus à moi, après l’avoir été des années durant et même le poisson se fait de plus en plus rare », dit-il. Poursuivant dans son récit, il nous confie que « le gris de la saleté et la pollution ont déteint sur le bleu comme sur la couleur des vagues devenues, plus marron, une couleur qui a pris le dessus sur le bleu de jadis», nous dit-il.
«Les sirènes de nos écoles retentissaient du temps de la 2e Guerre mondiale»
A la grande place d’El Kettani, de Bab El Oued, qui longe le bleu de la mer, se dressent d’autres quartiers, Beaux-fraisiers, Notre Dame d’Afrique, Rue Mizon, qui à la tombée de la nuit, c’est à leur tour, après la mer, d’éblouir les regards, des passants ou ceux sortis sur les balcons respiraient l’air marin, en brillant de mille et une lumières, des maisons allumées, offrant ainsi une belle toile, de lumières scintillantes, A’mi Hamid, un père de famille, rencontré, sur les lieux, avec ses trois enfants, un ancien habitant de Bab-el-Oued, ne cache pas son désarrois, même s’il respire « un ouf » de voir enfin de nombreux travaux d’aménagement. Pour lui la persistance de l’absence d’une vie pérenne d’activités culturelles, dans sa commune, le désole, lui qui jadis, enfant, puis jeune, en a profité pleinement, du sport, du cinéma, des activités inter-quartiers. Non loin du jardin de Prague, Ex-Maringo, qui a vu, le défunt, grand maitre du Chaäbi, Amer Ezzahi, assis, dans une de ses allées, passé de longs moments paisibles et de méditations, laissant son ouï, qui lui parvenait des hauts des arbres, les chants d’oiseaux, lui fredonnant à leur tour, Ya El-Meknine Ezzine, une femme, marchant doucement, nous l’abordons, et raconte, un de ses beaux souvenirs, dans ce jardin. Etant petite écolière, nous raconte-t-elle, au primaire Amina, ex-Franklin, je me rappelle, poursuit –elle « de la fête de fin d’année scolaire organisée, dans ce jardin, pour les meilleurs élèves des écoles primaires de Bab-el-Oued, et c’était un bonheur pour les petits et les grands.» C’était une belle journée, se rappelle-t-elle, « filles et garçons, bien habillés avec nos modestes tenues, étions heureux d’être honorés pour avoir eu de bonnes notes en classe et de bons résultats scolaires », et tout le monde était présent, parents, staff administratif des différentes écoles primaires de BEO et les professeurs, « durant tout le temps de la fête en cet après-midi, il y a avait des chansons interprétées, en arabe et en français, par des chorales, d’écoliers et écolières, des danses , algéroises, kabyles, et autres, des skectchs » et de s’arrêter pour de nous lancer « dommage, que ce n’est plus pareil, aujourd’hui avec nos enfants, pourtant c’est très facile à organiser avec de la bonne volonté, outre que c’est très instructif et pédagogique et ça permet ainsi à l’école de renouer avec ses missions essentielles » et d’insister, avant d’aller vaguer à ses occupations , à lancer un appel, aux responsables du secteur. « Il est « urgent de procéder au changement dans nos écoles des sirènes qui agressent, l’écolier comme l’adulte, en leur annonçant la sortie des classes ou la recréation » déplorant « la disparition du son de la cloche, dring drang, pour qu’il soit remplacé par des sirènes qui retentissaient durant la Deuxième Guerre mondiale, ailleurs »
Karima Bennour
Le marché mythique des Trois Horloges vit ses derniers jours
N’ayant pas perdu sa renommée, des années durant, depuis l’indépendance à nos jours, les habitués du marché des Trois horloges de Bab-el-Oued devront, dès l’année prochaine, selon nos informations, faire leurs courses quotidienne, ailleurs, dans les hauteurs de Bab-el-Oued, là où les pouvoirs publics, ont aménagé, l’espace qui devra accueillir, les étalages des commerçants transférés, de ce qui sera, la place de l’ex-marché des trois horloges. Celle-ci sera transformée, en espace public, avec un jardin, après la démolition de ce marché mythique de Bab-El-Oued et aussi d’Alger. La vétusté de son toit et de ses allées, entre les étalages et les escaliers qui s’y trouvent, se sont usés par les traces du temps, en l’absence des années durant des opérations d’ entretien, par les pouvoirs publics, en premier certes, mais aussi, par les commerçants exerçants, à l’intérieur comme à l’extérieur du marché mythique des Trois Horloges, que leurs aiguilles s’arrêteront de tourner pour lui, le jour, où son activité sera déplacée, plus haut, à BEO. « Le marché avait droit un lifting pour encore pouvoir perdurer et être le lieu attirant le plus grand nombre des habitants de BEO et ceux qui passent par là », nous dit une femme, habituée à faire sses courses, ici, et qu’elle regrettera autant l’ambiance qu’il dégage que la proximité du lieu, par rapport à elle et d’autres, Pour notre interlocuteur, le SG de la commune de BEO, « l’opération de son transfert est une décision irréversible des pouvoirs publics » avant de nous indiquer que l’espace « sera transformé en espace public avec jardin», nous a-t-il déclaré.
K. B.
L’Association « Espoir » pour les personnes aux besoins spécifiques
Des exploits par la simple volonté de ses membres
Avec simplement de la bonne volonté et les moyens du bord et de ceux qui les soutiennent bénévolement pour alléger le quotidien, dificile des personnes, aux besoins spécifiques, L’association l’Espoir de Bab-El-Oued mène des actions multiples et diverses, pour faire reculer le désespoir chez cette catégorie de citoyens, à travers l’ancrage de la culture du vivre ensemble, dans une dynamique collective, pour améliorer les conditions de vie des personnes aux besoins spécifiques. Sa présidente, détentrice de plusieurs titres, notamment championne du Monde, semi-Marathon 21 km d’Allemagne (2004/2005), Etats-Unis 1999, en parcourant les 42 km, sur sa chaise roulante et championne d’Afrique, en sprint, en 2002, pour ne citer que ces exploits, réalisés avec la bonne volonté et le soutien de ceux qui croient, que c’est toujours possible, Nadia nous confie que « être conscients des droits et des devoirs, nous permet de briser en premier lieu les tabous, pour dire que nous existons et prouver qu’on est capables ». Même si les conditions sont souvent difficiles, reconnaît-elle, Nadia et ses compagnons de l’Espoir, jeunes et moins jeunes, hommes et femmes, leurs exploits ont dépassé les frontières de Bab-El-Oued et de la Capitale, « pour porter l’espoir qui nous anime, à d’autres personnes comme nous, à Djanet, Adrar, et d’autres wilayas à travers le pays. » Ses membres déplorent, à ce propos, que des citoyens, aux besoins spécifiques, de l’intérieur et du sud du pays, « vivent des conditions lamentables, en l’absence de réponses effectives et durables à leurs besoins et attentes » Ne manquant pas par la même occasion de nous exprimer leur étonnement d’avoir eu à rencontrer des familles qui cachaient » ont –ils affirmé, leurs enfants ou proches « à cause de la honte qui les habitait » et qu’après le passage des membres de l’association Espoir, « les choses ont commencé à changer à ce niveau et heureusement » , nous dit, Kayouche, un des membres infatigable de cette association. En parcourant le grand boulevard et certaines rues de Bab-el-Oued et même de Bologhine et Place des Martyrs, les passages réservés aux personnes handicapées qui se déplacent en chaise roulante, c’est eux , qui après un parcours de combattant, ont réussi à les installer avec le soutien de d’autres acteurs volontaires , chacun avec sa contribution, sans attendre une quelconque « aide financière de l’APC de BEO ou d’ailleurs ». et à la présidente de rebondir pour nous affirmer que l’association Espoir « ne perçoit de budget des pouvoirs publics et nous comptons continuer sur cette lancée et nous n’acceptons pas des dons financiers », nous dit-elle, avant d’exprimer ses « remerciements à tout citoyen et citoyenne, connu ou pas, pour d’abord leur soutien moral et les aides qu’ils nous ont fournis, pour nous accompagner dans notre belle aventure, de permettre à cette catégorie de personnes d’être et d’avancer sur les chemins de la vie » . C’est ce qui ressort de notre passage au local de l’Espoir, situé à deux pas du front de mer de Bab-El-Oued, à proximité, du lycée Frantz Fanon et l’espace où se déroule des parties de pétanques, où l’association organise de temps en temps des tournois, auxquels participent des femmes, dont des mamans d’enfants aux besoins spécifiques, notamment celles des quartiers populaires de Bab-El-Oued, dans l’espoir de décrocher , un autre titre que celui d’être las des tâches ménagères.
K. B.