La guérilla des Farc a exprimé, vendredi, son «soutien unanime» à l’accord de paix négocié avec le gouvernement, donnant ainsi son feu vert à la signature d’un texte historique pour terminer un conflit qui déchire la Colombie depuis 52 ans.
«Les guérilleros et guérilleras (…) ont exprimé leur soutien unanime à l’accord final de La Havane», a déclaré Ivan Marquez, chef de la délégation des Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc, marxistes) aux pourparlers de paix, menés pendant près de quatre ans à Cuba et conclus le 24 août avec le gouvernement du président Juan Manuel Santos. «La guerre est terminée. Dites à Mauricio Babilonia qu’il peut libérer les papillons jaunes», a-il ajouté en référence à «Cent ans de solitude», le célèbre roman de l’écrivain colombien Gabriel Garcia Marquez, prix Nobel de littérature.
Ivan Marquez, membre du secrétariat de la guérilla, son instance dirigeante, a fait cette annonce au sixième et dernier jour de la Xe conférence des Farc, qui a réuni l’état-major et environ 300 délégués des différents fronts, chargés de se prononcer sur l’accord de paix ainsi que sur la reconversion de la rébellion en mouvement politique légal. Se tenant pour la première fois avec l’aval des autorités et en présence de la presse, cette «Conférence nationale guérillera» s’est ouverte le 17 septembre à El Diamante, lieu-dit perdu au cœur du Caguan (sud-est), le fief historique des Farc, issues en 1964 d’une insurrection paysanne, et qui comptent encore 7 500 hommes armés.
Leur commandant en chef, Rodrigo Londono, plus connu sous ses noms de guerre de Timoleon Jimenez ou Timochenko, devait recevoir le feu vert de la guérilla pour signer l’accord de paix lundi avec M. Santos, lors d’une cérémonie solennelle à Carthagène des Indes, sur la côte caraïbe (nord).
«Monter sur la scène politique»
Mais dès le début de cette réunion inédite dans le Caguan, Ivan Marquez s’était montré très optimiste, déclarant dimanche dernier : «Tout avance le vent en poupe.
La conférence s’avère être un succès extraordinaire». Il reste encore aux Farc à décider du nom de leur futur parti politique, ainsi que de sa direction.
Pour l’analyste Ariel Avila, «le thème de fond porte sur ce que sera la nouvelle organisation, sa structure, son nom». Si un changement des leaders est écarté, il se pourrait que l’état-major central soit élargi, passant d’une trentaine à plus de 40 membres, dont au moins une femme.
Le commandant Carlos Antonio Lozada, autre membre du secrétariat de la guérilla, a estimé que le chef suprême des Farc serait très probablement reconduit à la tête du mouvement. «Nul doute que Timochenko sera confirmé», avait-il déclaré jeudi à l’AFP. «Nous allons monter sur la scène politique et le principal défi sera de parvenir à une proposition qui regroupe et rassemble les différents secteurs de la société colombienne», a-t-il ajouté, jugeant que la clé du succès réside dans la proximité avec la population, une gageure après cinq décennies dans la clandestinité.
«Dans la mesure où nous pourrons avoir un contact direct avec la majorité du pays, nombre des mensonges qui ont été dits pour nous déprécier vont tomber», a-t-il affirmé.
Pour entrer en vigueur, l’accord signé par Timochenko et Santos devra aussi être approuvé le 2 octobre par référendum, mécanisme non obligatoire mais voulu par le chef de l’Etat afin de donner une légitimité plus large à la paix.
Afin de l’emporter, le «oui» devra recueillir au moins 4,4 millions de voix (13% de l’électorat) et le «non» un score plus faible. Le conflit armé colombien a, au fil des décennies, impliqué différentes guérillas d’extrême gauche, dont l’Armée de libération nationale (ELN, guévariste), encore active avec 1.500 membres, des milices paramilitaires d’extrême droite et les forces armées, faisant plus de 260.000 morts, 45.000 disparus et 6,9 millions de déplacés.