C’est aujourd’hui que le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, se rendra en Chine dans le cadre d’une visite d’État, à l’invitation de son homologue chinois, Xi Jinping.
Depuis 2014, date à laquelle l’Algérie est devenue le premier pays arabe à établir un partenariat stratégique global avec la Chine, l’axe Alger-Pékin n’a cessé d’évoluer vers un partenariat stratégique et diversifié intense. Et pour preuve, en 2018, à l’occasion du 7e forum sur la coopération sino-africaine, l’Algérie avait annoncé officiellement son adhésion à l’initiative chinoise de la nouvelle route de la soie, un défi géostratégique de taille. Intervenant un mois après le voyage du président Tebboune en Russie, et à quelques semaines de la tenue du sommet des BRICS, qui aura lieu du 22 au 24 août à Johannesburg, en Afrique du Sud, cette virée en terre chinoise démontre bel et bien que l’Algérie est devenue un partenaire privilégiée pour la Chine, et que les deux pays partagent une vision commune. Une réalité approuvée par bon nombre d’experts et d’analystes, à l’instar de Smaïl Debeche, président de l’Association d’amitié Algérie-Chine. Décryptage…
« Finaliser le Plan quinquennal de coopération stratégique globale »
Invité pour s’exprimer sur le contexte qui entoure ce voyage de Abdelmadjid Tebboune à Pékin, le Professeur-enseignant en sciences politiques et relations internationales, estime que ce n’est « qu’après que le président Tebboune se soit assuré que l’Algérie a apporté les changements et mesures nécessaires, notamment sur les fondements de l’investissement, le cadre juridique et les nouvelles technologies, qu’il a envisagé d’aller en Chine ». Concernant l’objectif principal de cette visite, Debeche nous dira qu’ « à vrai dire, le chef de l’État ira finaliser ce qui a été déjà convenu entre les deux pays lors de la rencontre au mois de décembre 2022, et la signature du deuxième Plan quinquennal de coopération stratégique globale 2022-2026 ». Selon notre interlocuteur, parmi les points importants qu’aborderont les deux chefs d’État, « l’exploitation des mines algériennes, la coopération énergétique, les infrastructures de base, les routes, les chemins de fer, les ports, les transferts de technologie, l’énergie solaire… etc». « Tous ces secteurs seront mis sur la table lors de cette rencontre entre les deux Présidents », a ajouté l’intervenant. Pour ce qui est de l’état d’esprit dans lequel Tebboune a planifié cette visite, Smaïl Debeche affirme que le président de la République « s’est orienté vers une politique économique hors hydrocarbures, et durable. Cela, compte tenu de son expérience personnelle dans les affaires économiques, il connaît donc parfaitement les priorités de l’heure, et ce qui correspond le mieux à l’intérêt national. Une nouvelle économie beaucoup plus axée sur l’exportation, le développement agricole et la coopération dans le domaine de la technologie ».
« Alger et Pékin, des défenseurs de la légalité internationale et de la souveraineté des États »
Dans son intervention, le lauréat du « Prix de l’Amitié Arabe-Chine » et du « Prix spécial du livre de Chine », a affirmé que ce déplacement en Chine traduit la convergence de vue entre Alger et Pékin, notamment sur le principe de la légalité internationale, soit la cause sahraouie et la cause palestinienne. Une reconnaissance pour ce rôle de leader de l’Algérie dans le règlement des conflits au niveau régional, de par son rôle central dans la consécration de la stabilité. « Il est clair dans la politique du chef de l’État qu’il a placé l’intérêt national avant toute chose, et qu’il compte entretenir les relations du pays avec l’étranger selon ce principe et les priorités de notre politique étrangère. Car il faut savoir que l’Algérie défend sa propre vision dans l’état actuel des relations internationales, que ce soit au niveau régional, au Moyen Orient, ou autre. Qu’il s’agisse de la crise en Ukraine, de la Palestine ou du Sahara occidental, il est clair que l’Algérie défend avant tout l’application du droit et de la légitimité internationale, elle est contre toute atteinte à la souveraineté des pays. Donc que ce soit avec la Chine ou un autre pays, comme les États- Unis, le président de la République s’est fixé comme objectif de trouver des terrains d’entente sur toutes ces crises et conflits », a déclaré l’orateur.
« Abdelmadjid Tebboune milite pour un monde multipolaire et la diversification des partenariats »
Concernant les voix qui se sont élevées et qui affirment que le rapprochement de la Russie, puis de la Chine, signifie un éloignement du partenaire européen et occidental, le responsable estime qu’« il ne faut pas verser dans cette logique », car selon lui, « le chef de l’État n’a, à aucun moment, favorisé les relations de l’Algérie avec tel pays au détriment d’un autre pays. Sa vision est en adéquation avec les valeurs d’un monde multipolaire ». En effet, on se rappelle bien que Tebboune n’a cessé d’affirmer que « l’Algérie n’est dépendante d’aucune orbite diplomatique ». « C’est vrai que l’Algérie vise à adhérer à des organisations, comme les BRICS et l’Organisation de coopération de Shanghaï, mais cela ne veut pas dire non plus que l’Algérie tourne le dos à d’autres opportunités de partenariat », a-t-il expliqué, ajoutant sur le déploiement diplomatique en cours de l’Algérie et l’impact qui en résulte : « Cette reconnaissance internationale de la diplomatie algérienne impose à l’Algérie de diversifier ses relations extérieures. C’est ce qu’a fait le Président, même l’Iran a invité Abdelmadjid Tebboune à une visite d’État. Tout cela démontre bien cette nouvelle notoriété que notre diplomatie a acquise, selon une stratégie basée sur les principes de paix et de prospérité internationale. Et tout cela, avec comme unique objectif de servir les intérêts du pays ».
« La Chine est consciente que l’Algérie est une porte d’entrée vers l’Afrique »
Pour ce qui est des motivations chinoises d’approfondir leur coopération avec l’Algérie, le président de l’Association d’amitié Algérie-Chine a souligné que cet intérêt à l’égard de l’Algérie s’explique par le fait que « la Chine conçoit l’Algérie comme étant un pays qui dispose d’infrastructures de base, consciente aussi de son influence régionale sur le Sahel et l’Afrique de l’Ouest. Notre partenaire chinois a bien constaté que nous étions en pleine réforme des cadres juridiques et structurels dans notre stratégie de production et de commercialisation. Notamment par nos efforts de faciliter les échanges en créant des zones de libre-échange. Donc, la Chine est en mesure d’introduire l’Algérie dans l’équation de son déploiement en Afrique. En quelques sortes, l’Algérie est un élément déterminant dans la politique économique chinoise vis-à-vis de l’Afrique ». Et de conclure sur l’opération de charme réussie par le chef de l’État : « Depuis l’élection du Président Tebboune, la promotion des investissements occupe une place prépondérante. Il existe une parfaite concordance avec la vision prônée par la Chine, dans le cadre, notamment, du projet de la Route de la Soie ».
Hamid Si Ahmed