Accueil MONDE Soudan : Arrestation d’opposants au putsch, fortes pressions à l’étranger

Soudan : Arrestation d’opposants au putsch, fortes pressions à l’étranger

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Les forces de sécurité soudanaises ont multiplié mercredi les arrestations de militants et de manifestants et quadrillé Khartoum pour tenter d’en finir avec l’opposition au coup d’État du général Abdel Fattah al-Burhane.

À l’étranger, l’Union africaine et la Banque mondiale ont fait monter la pression sur l’armée: la première a suspendu le Soudan de ses institutions et la seconde a cessé son aide, pourtant vitale pour ce pays pauvre plongé dans le marasme économique et miné par les conflits. Pourtant, l’armée a tenté de donner des gages en autorisant le retour mardi chez lui à Khartoum du Premier ministre renversé Abdallah Hamdok, détenu après le putsch lundi avec la plupart des civils qui composaient le pouvoir de transition. Même s’il reste « sous surveillance étroite » selon son bureau. Un signe d’ouverture en apparence seulement car au même moment, le musellement de l’opposition s’est renforcé. L’un des leaders du plus grand parti du Soudan, l’Oumma, a été arrêté de même que d’autres militants et manifestants qui bloquaient les principales avenues de Khartoum. Pour empêcher les manifestants de se regrouper, les forces de sécurité ont « enlevé toutes les barricades » de branchages, de pierres ou de pneus brûlés dans le centre-ville, a indiqué à l’AFP Hadi Bachir. « Et elles arrêtent tous ceux qui sont à leurs abords. » Dans la nuit, elles ont tiré des grenades lacrymogènes sur les manifestants, après que quatre manifestants ont été tués et plus de 80 blessés lundi par des tirs des troupes selon des médecins.

Manifestation du «million»
En défi au tour de vis, les militants ont appelé sur les réseaux sociaux à une « manifestation d’un million de personnes » samedi pour réclamer le transfert complet du pouvoir aux civils. Pour tenter d’expliquer son coup de force, le général Burhane a prétexté mardi le risque de « guerre civile » né selon lui d’une autre manifestation contre l’armée il y a une semaine. Visiblement pas convaincus, les ambassadeurs occidentaux ont répété que pour eux « M. Hamdok est toujours le Premier ministre et son gouvernement le pouvoir constitutionnel », et ont demandé à pouvoir le rencontrer en personne. M. Hamdok, qui était le visage civil de la transition post-dictature au Soudan, a seulement parlé au téléphone avec le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken mardi. Alors que le Soudan venait tout juste de retrouver sa place dans le concert des nations après la mise à l’écart du général Omar el-Béchir en 2019, il risque d’être de nouveau isolé. Et la communauté internationale a choisi de frapper les généraux au porte-feuille. Les États-Unis, qui avaient retiré seulement fin 2020 le Soudan de leur liste des pays soutenant le « terrorisme », a suspendu une part de son aide. Et l’Union européenne a menacé de suivre. Moscou en revanche estime seule que le coup d’État était « le résultat logique d’une politique ratée », alors que le Conseil de sécurité de l’ONU n’a pas pu se mettre d’accord sur une déclaration commune sur le putsch.

«Grosse erreur»
Les manifestants soudanais disent qu’ils ne quitteront pas la rue avant la réinstitution d’un pouvoir civil, alors que depuis l’indépendance, il y a 65 ans, le pays a quasiment toujours vécu sous la férule de l’armée. Fin 2018 et 2019 déjà, font-ils valoir, ils avaient campé pendant des mois jusqu’à forcer l’armée à démettre le président Omar el-Béchir. Plus de 250 personnes ont péri dans la répression de la révolte. Deux ans après, « le mouvement de protestation a appris de ses erreurs et est maintenant plus sophistiqué », affirme l’International crisis group (ICG). « Essayer d’en finir avec les manifestations par la force serait une grosse erreur des militaires ». Car, fait valoir le centre de recherche, les militants prodémocratie ont désormais « un réseau de comités locaux à travers tout le pays qui peuvent s’organiser efficacement, même sans internet ». La preuve? Des manifestations ont également lieu dans d’autres villes du pays, sporadiques et également régulièrement dispersées par les forces de sécurité, selon des témoins. C’est toutefois à Khartoum, et de loin, que la situation est la plus tendue. L’aéroport, en plein centre-ville est donc encerclé par manifestants et forces de l’ordre, doit rouvrir officiellement dans l’après-midi mais aucune compagnie ne s’est jusqu’ici risquée à annoncer la reprise de ses vols vers ou depuis la capitale soudanaise où l’internet est toujours coupé.

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