L’Algérie commémore le 77e anniversaire du 8 mai 1945, jour qui symbolise la répression sanglante perpétrée dans les régions de Sétif, Guelma et Kherrata, par les forces coloniales françaises, aidées par les milices des colons, contre la population algérienne qui réclamait son droit légitime à la liberté et à l’indépendance.
Le 8 mai 1945 avait marqué la victoire contre la barbarie nazie. Depuis, la même date porte également la marque de la barbarie colonialiste en Algérie. Le 8 mai 1945, les colonialistes français ont démontré qu’ils ne reconnaissaient pas les droits des Algériens. Plus de 45 000 Algériens ont été tués dans le massacre perpétré par l’armée coloniale. Les Algériens avaient décidé de sortir dans des marches pacifiques suite à la chute de l’Allemagne nazie après la deuxième Guerre mondiale, scandant des slogans pour une Algérie libre. Dans le défilé, le mot d’ordre qui dominait était «el istiqlal», l’indépendance. Ce jour-là, à Sétif, le jeune Saâl Bouzid a été tué parce qu’il a refusé de lâcher le drapeau algérien qu’il tenait à la main. Les cortèges dispersés se reformaient sans cesse et à chaque fois la police et la gendarmerie françaises ouvraient le feu. Des manifestants tombaient. Les manifestations se sont étendues à d’autres villes du pays. Une féroce répression s’est abattue alors sur les Algériens. Les exécutions collectives et individuelles visaient à semer la terreur parmi la population. Avant d’être fusillés, «les hommes qui vont mourir sont contraints de creuser les fosses de ceux qui viennent d’être tués», écrit Henri Alleg (La guerre d’Algérie, tome 1). Il rapporte un témoignage bouleversant: «les légionnaires prenaient les nourrissons par les pieds, les faisaient tournoyer et les jetaient contre les parois de pierre où leur chair s’éparpillait sur les rochers». Les corps de prisonniers exécutés par rangées, dans le dos, étaient précipités du haut d’une falaise. Des corps sont brûlés dans les fours à chaux. Des groupes de prisonniers enchaînés sont écrasés sous les roues des chars des légionnaires. L’historien français Benjamin Stora lui-même qualifie cette tuerie massive de «massacre». « Les massacres du 8 mai 1945 en Algérie sont un marqueur idéologique fort », a-t-il dit. Et ce marqueur persiste dans des cercles français notamment décisionnels. Rappelons que l’ambassadeur de France en Algérie, au cours d’une visite à Sétif le 17 février 2005, avait parlé de «tragédie inexcusable». Il y a de très nombreux récits liés à ces évènements sanglants et douloureux, qui témoignent des crimes commis par les colonialistes français, jamais égalés dans l’horreur.
La commémoration des Massacres du 8 mai 1945 est l’occasion de rappeler ce que fut le véritable visage de la colonisation française, qui a commis, 132 années durant, des crimes contre l’humanité et contre les valeurs civilisationnelles. Les dispositions du code pénal français qui définissent les crimes contre l’humanité s’appliquent aux massacres du 8 mai 1945, mais la France ne veut pas le reconnaître. Ce qui s’est passé le 8 mai 1945 et les jours qui suivirent, à Sétif, Kherrata, Guelma et d’autres localités du pays, fut la preuve irréfutable que l’Indépendance ne sera jamais un cadeau que les colons et le pouvoir politique français leur offriront sur un plateau d’argent. Il faudra l’arracher et en payer un prix très élevé. Le président de l’Association des anciens du ministère de l’Armement et des Liaisons générales (MALG), Daho Ould Kablia, a fait observer que les massacres du 8 mai 1945 avaient créé « le déclic et une prise de conscience pour la lutte armée », rappelant les différentes étapes pour l’aboutissement du premier novembre 1954. Depuis l’an dernier, le 8 mai est célébré comme Journée nationale de la Mémoire, instituée par une décision prise par le Président Abdelmadjid Tebboune. Une chaîne télévisée nationale spécialisée en Histoire, appelée à être un support pour le système éducatif dans l’enseignement de cette matière, a été également lancée il y a un an.
M’hamed Rebah