D’intenses négociations sont enclenchées, mardi au Yémen, sous la supervision de l’ONU pour décider du sort de la ville portuaire de Hodeida (Nord-uest) afin d’éviter une confrontation militaire entre les éléments du mouvement armé «Ansarulah» (houthis) qui assurent son contrôle et les forces progouvernementales soutenues par Riyadh qui s’en rapprochent.
L’envoyé spécial de l’ONU pour le Yémen, Martin Griffiths qui a entamé samedi dernier une visite à Sanaa pour convaincre les Houthis de se retirer de Hodeida sans se battre et de remettre le port à l’ONU, a exprimé sa «profonde préoccupation quant aux conséquences d’une telle confrontation militaire». «Je suis très inquiet concernant l’impact d’une telle attaque sur le processus politique que l’ONU est déterminée à faire avancer», a affirmé le médiateur britannique qui a achevé mardi une visite de quatre jours au Yémen.
Des sources yéménites ont confirmé qu’une proposition de transfert du port de Hodeida sous la supervision directe des Nations unies a été faite aux houthis afin d’assurer l’acheminement des aides humanitaires. Toutefois, ils ont posé des conditions, jugées «impossibles» à satisfaire, ont estimé des responsables du gouvernement yéménite, afin d’obtenir en échange leur retrait de cette ville sur la mer Rouge. Lors d’une rencontre lundi à Sanaa avec M. Griffiths, un responsable politique houthi, Mehdi al-Mashat, a annoncé que «des négociations étaient en cours et que les Houthis étaient prêts à avancer si l’autre camp faisait preuve de «bonne foi».
«Nous tendons la main de la paix chaque fois que les autres parties montrent qu’elles sont sérieuses», a dit M. Mashat. Il a appelé l’ONU à «jouer son rôle pour alléger la crise humanitaire provoquée par l’agression» menée, selon lui, par les forces progouvernementales soutenues par l’Arabie saoudite.
Selon des sources politiques yéménites, parmi des conditions posées par les Houthis pour un éventuel retrait du port de Hodeida figurent le paiement des salaires des fonctionnaires civils et militaires dans les territoires contrôlés par les Houthis, la réouverture de l’aéroport de Sanaa aux vols commerciaux, la levée totale du siège des ports yéménites et l’arrêt des raids aériens de la coalition saoudienne.
Des «conditions inflexibles»
Il y a d’autres conditions, selon ces sources, notamment des excuses pour la mort d’un chef du mouvement armé «Ansarulah», Saleh al-Samad, tué dans une frappe de la coalition en avril dans la province de Hodeida.
«Les Houthis ont adopté une position inflexible et posé des conditions qui bloquent les efforts visant à parvenir à une solution», a déclaré un haut responsable yéménite aux médias locaux. «Pour l’heure», a-t-il ajouté, le médiateur de l’ONU «a échoué dans ses efforts pour convaincre les Houthis de se retirer de Hodeida sans se battre et de remettre le port à l’ONU, en raison des conditions posées par les rebelles».
Parallèlement à ces pourparlers, le porte-parole de la coalition a affirmé lundi soir que l’alliance sous le commandement saoudien s’était rapprochée un peu plus de Hodeida. «L’armée yéménite appuyée par des forces de la coalition sont à neuf kilomètres de Hodeida», a annoncé le colonel saoudien Turki al-Maliki en citant l’objectif de «libérer» la ville portuaire.
«Nous recevons des renforts et retirons des mines avant d’autres opérations», a-t-il menacé.
Devant cette situation préoccupante, l’envoyé spécial de l’ONU a invité toutes les parties au conflit à faire baisser les tensions, notamment à Hodeida», point d’entrée d’une bonne partie des importations et de l’aide humanitaire. «Outre les conséquences humanitaires d’une bataille qui peuvent être évitées, je suis aussi très inquiet concernant l’impact d’une telle attaque sur le processus politique» que l’ONU est «déterminée à faire avancer», a dit M.Griffiths qui s’exprimait mardi à l’aéroport de la capitale yéménite Sanaa à l’issue de sa visite. M.Griffiths a également réclamé la réouverture de l’aéroport de Sanaa au trafic commercial fermé en 2015 après un blocus décrété par la coalition sous commandement saoudien.
Le médiateur onusien a appelé «toutes les parties» au conflit à créer «un environnement favorable à la reprise de négociations politiques».
Ce conflit a fait près de 10.000 morts, plus de 55.000 blessés et provoqué, selon l’ONU, «la pire crise humanitaire du monde».