L’Algérie s’apprête à accueillir du 6 au 8 décembre prochains, au Centre International de Conférences Abdelatif Rahal, l’un des rendez-vous technologiques les plus stratégiques du continent : la 4èmeᵉ Conférence africaine des startups (ASC 2025).
Placée sous le haut patronage du président Abdelmadjid Tebboune, cette édition ne se contente pas d’exposer des innovations, elle ambitionne de propulser Alger au rang de capitale continentale de l’économie de la connaissance, comme l’a souligné, jeudi, à Alger, le ministre de l’Economie de la connaissance, des Start-up et des Micro-entreprises, Noureddine Ouadah, lors d’une conférence de presse consacrée à la présentation de cet événement sous ses différents facettes.
Le thème retenu, « Raising African Champions », reflète une volonté de transformer ce congrès en plateforme politique, économique et symbolique capable de redessiner la trajectoire technologique africaine. Le discours du ministre de l’Économie de la Connaissance, des Start-up et des Micro-entreprises s’inscrit précisément dans cette perspective : projeter l’Algérie au cœur d’un élan africain fondé sur la jeunesse, la coopération Sud–Sud et l’innovation comme instruments de souveraineté. L’événement sert ainsi de laboratoire de gouvernance où se rencontrent États, investisseurs, incubateurs et jeunes entrepreneurs. L’ASC 2025 marque une nouvelle étape par son ampleur et la qualité de ses participants. L’événement prévoit d’accueillir plus de 25 000 visiteurs, plus de 300 experts et plus de 40 délégations ministérielles, confirmant ainsi l’objectif de l’Algérie de devenir un pôle d’attraction pour l’écosystème africain des startups. Au cours du sommet ministériel, deux textes structurants seront présentés : le « Projet de Déclaration d’Alger sur le développement des startups en Afrique » et le « Projet de cadre de référence des meilleures politiques publiques pour le développement des startups en Afrique ». Ces documents, dont la vocation est d’être examinés et enrichis par les ministres africains, seront ensuite transmis à l’Union africaine pour adoption. L’Algérie s’appuie sur le succès des éditions précédentes, qui avaient déjà abouti à l’adoption de la Déclaration d’Alger, notamment sur le développement des startups et de l’Intelligence Artificielle lors de la 3e édition en 2024.
Financement et partenariats : catalyseurs de croissance
Le volet financement et partenariat sera particulièrement mis en avant. La conférence organisera la « Rencontre Investisseurs & GP/LP », une plateforme unique réunissant les principaux gestionnaires de fonds de capital-risque et les investisseurs institutionnels. Par ailleurs, le « Sommet Ministres-Champions » mettra en dialogue les ministres et les dirigeants des grandes startups africaines pour un débat stratégique sur les meilleures voies à suivre pour bâtir un écosystème continental. Pour concrétiser les investissements, l’événement proposera une « Deal Room » numérique, conçue pour connecter directement les startups et les investisseurs potentiels. Ces initiatives s’inscrivent dans la dynamique du Fonds africain de financement des startups et des jeunes innovateurs, officiellement lancé lors de la Foire commerciale intra-africaine (IATF 2025) et qui ciblera le financement des startups ayant participé au programme « AU Youth Startup Program ».
Événements sectoriels et synergies ministérielles
L’ASC 2025 sera enrichie par une série d’événements parallèles co-organisés avec différents ministères pour adresser l’innovation dans des secteurs stratégiques. Un événement en partenariat avec le ministère de la Poste et des Télécoms se tiendra à l’occasion de la Journée africaine des télécoms et des TIC, réunissant les ministres africains chargés des télécommunications. Un forum sur l’Agritech sera organisé avec le Ministère de l’Agriculture et du Développement Rural, afin de discuter des opportunités d’investissement dans l’innovation agricole. Un événement en collaboration avec le Ministère de l’Environnement et de la Qualité de la Vie sera consacré aux innovations vertes et aux solutions écologiques pour le développement durable. Une rencontre de haut niveau avec le secrétariat d’État chargé de la Communauté nationale à l’étranger mobilisera la diaspora africaine pour renforcer sa contribution à l’entrepreneuriat et à l’investissement sur le continent. D’autres activités parallèles incluront un forum fintech, un événement dédié à l’intelligence artificielle et le lancement de la compétition africaine de cybersécurité. Par ailleurs, un programme de soutien et de formation sera mis en œuvre pour les étudiants africains résidant en Algérie.
Qualité plutôt que quantité : la stratégie des champions africains
L’édition 2025 marque également une rupture méthodologique : la qualité prime désormais sur la quantité. Alors que l’édition 2020 avait réuni près de 500 startups, celle-ci se recentre sur environ 200 projets triés sur le volet, privilégiant les entreprises solides, capables de lever des fonds et d’avoir un impact concret sur leurs sociétés. L’Algérie montre ainsi sa volonté de maturité : l’enjeu n’est plus de multiplier les chiffres, mais de consolider des champions africains crédibles, exportables et capables de transformer leur environnement économique. Cette orientation est renforcée par une ouverture assumée aux investissements, notamment à travers le Sommet des investisseurs GP10. Des objectifs clairs sont fixés, dont celui de financer une trentaine de startups africaines à l’issue de l’IATF. La création en étude d’une zone technologique libre africaine à Alger, destinée à fluidifier les échanges de savoirs, de capitaux et de technologies, démontre la profondeur de cette vision. Elle placerait Alger dans le sillage des hubs africains les plus performants, tout en ajoutant une vocation panafricaine affirmée.
Rwanda : invité d’honneur et partenaire stratégique
Le choix du Rwanda comme pays invité d’honneur marque l’un des temps forts de cette édition. Sans être érigé en modèle absolu, Kigali s’impose comme l’un des écosystèmes numériques les plus avancés du continent, résultat d’un travail constant et méthodique. Le Rwanda s’est distingué par une progression cohérente dans la numérisation de l’État, la consolidation de ses institutions, l’efficacité de sa gouvernance et une stratégie de long terme dans des domaines clés. Le pays a investi dans l’intelligence artificielle, les infrastructures numériques, les plateformes publiques digitalisées et des partenariats structurants, notamment avec la Chine. Cette trajectoire repose sur une discipline de mise en œuvre et un alignement serré entre innovation et besoins socio-économiques, qu’il s’agisse d’agriculture connectée, d’e-santé, de fintech, de cybersécurité ou de services citoyens. C’est cette avance technologique, construite progressivement et en réponse directe aux besoins du pays, qui fait du Rwanda un invité d’honneur stratégique pour l’Algérie. Les deux nations avancent sur des chemins différents mais parfaitement complémentaires : l’Algérie met en mouvement ses forces industrielles, ses infrastructures et ses capacités d’investissement, tandis que le Rwanda apporte une agilité numérique et institutionnelle qui enrichit le dialogue continental. Ensemble, ils élargissent la portée du Congrès africain des startups et renforcent son ambition : faire émerger une Afrique capable de produire ses propres leaders technologiques et de développer une souveraineté numérique pleinement assumée.
Une Afrique numérique souveraine
La présence du Rwanda en Algérie donne une dimension géopolitique nouvelle à l’ASC 2025. Elle incarne une volonté partagée de coopération, d’échange d’expériences et de mise en valeur des réussites africaines. Le ministre l’a rappelé : toute entité opérant légalement en Algérie — nationale, africaine ou issue de la diaspora — est reconnue comme partie prenante de l’écosystème. Cette ouverture s’accompagne d’un appel clair adressé aux médias pour renforcer la visibilité des startups, contextualiser les enjeux technologiques et contribuer à un récit panafricain ambitieux et positif. L’événement s’inscrit également dans la continuité de la Feuille de route d’Alger adoptée par l’Union africaine en 2022, qui sera actualisée pour intégrer les avancées et expériences récentes. En rassemblant jeunesse, coopération Sud–Sud et économie de la connaissance, l’ASC 2025 devient bien plus qu’un rendez-vous annuel : un moment où convergent vision politique, expertise technologique et créativité entrepreneuriale.
Alger et Kigali, côte à côte, esquissent une Afrique numérique souveraine, sûre de ses forces et résolue à écrire elle-même son avenir. L’ASC 2025 devient ainsi un moment de convergence entre ambition politique, expertise technologique et créativité entrepreneuriale. Alger et Kigali, en se donnant la main, tracent les contours d’un futur numérique africain souverain, confiant et capable d’écrire lui-même son destin.
Manel Seghilani













































