Intitulé « Marocgate : à quoi joue le Maroc ? » la chaîne de télévision franco-allemande de service public, Arte, a diffusé un reportage sur le scandale de corruption au Parlement européen. Dans ce reportage, Arte remet en question certaines décisions prises par l’Union européenne (UE), comme dans l’affaire Pegasus, les accords de pêche avec le Maroc ou encore concernant le respect des droits humains dans le royaume.
La chaine TV s’interroge d’emblée sur l’étouffement par l’UE de l’affaire du logiciel « Pegasus » utilisé par le Maroc pour espionner des dirigeants étrangers dont des Européens. Le logiciel en question est un produit israélien vendu à très peu d’Etats. Le Maroc en a bénéficié et en a fait un usage excessif en termes d’espionnage, souligne le directeur du Centre d’étude sur le monde arabe à Genève, Hasni Abidi. « La justice a parlé de 100.000 personnalités qui ont été espionnées dont bien sûr des personnalités européennes, des parlementaires et des ministres », a-t-il ajouté, assurant que les Occidentaux ont tout fait pour étouffer cette affaire et que certains parlementaires proches des autorités marocaines se sont donnés à fond pour que le Parlement européen ne condamne pas les pratiques d’espionnages marocaines. S’agissant des accords de pêche avec le Maroc, Arte se demande à juste titre pourquoi l’Europe a ratifié ces accords qui sont pourtant contraires à la législation internationale et notamment l’autodétermination du Sahara occidental ?. « Les discussions étaient assez dures, assez âpres, notamment parce que cet accord inclut le territoire du Sahara occidental, or l’Union européenne s’aligne en principe sur les points de vue internationaux notamment les Nations unies. On sait que dans le cadre de ces négociations, il y a eu un lobbying assez intense pour influencer les membres de ce Parlement », se rappelle Saskia Bricmont, députée européenne du groupe des Verts et membre de la délégation européenne pour les relations avec les pays du Maghreb. Concernant le dossier des droits humains au Maroc, le réalisateur du reportage reconnait que le sujet est resté « longtemps tabou » à la chambre des eurodéputés. Mais le temps de l’impunité (du Maroc), estime Arte, est révolu depuis la mi-janvier, quand les parlementaires européens ont adopté avec une majorité écrasante une résolution condamnant les atteintes à la liberté d’expression au Maroc.
La récente position européenne épinglant le Maroc sur la question des droits de l’Homme constitue, aux yeux de Hasni Abidi, un tournant dans la pratique du Parlement européen à l’égard du Maroc. « Jamais auparavant, le Parlement européen n’a osé franchir ce cap, condamner publiquement et presque avec unanimité le Maroc », souligne-t-il, à ce sujet. La députée du groupe Renew et membre de la délégation pour les relations avec les pays du Maghreb, Nathalie Loiseau, a déclaré dans le reportage que si les faits sont confirmés au terme de l’enquête actuellement en cours à Bruxelles, cela portera préjudice à notre volonté de travailler avec le Maroc. Pour conclure, Arte, a qualifié cette affaire « d’embarrassante » car elle éclabousse le Parlement européen et jette le soupçon sur tous ceux qui travaillent avec le Maroc.
B. O.