Caracas s’est transformée, vendredi, en tribune internationale. Depuis la capitale vénézuélienne, Nicolás Maduro a lancé un avertissement frontal au gouvernement américain… mais aussi directement au peuple des États-Unis. Derrière son discours, une escalade inquiétante : mouvements militaires américains dans la mer des Caraïbes, options d’intervention discutées à la Maison-Blanche et rhétorique belliqueuse qui ravive les souvenirs des opérations extérieures les plus controversées de Washington. Le président vénézuélien n’a pas mâché ses mots. « Voulez-vous une nouvelle Ghaza en Amérique du Sud ? », a-t-il lancé, dénonçant ce qu’il perçoit comme une tentative de préparer l’opinion américaine à une possible agression. Pour Maduro, la situation actuelle rappelle les scénarios les plus sombres du XXIᵉ siècle : bombardements massifs, violations du cessez-le-feu, destruction d’infrastructures civiles et approvisionnement militaire américain constant à des armées alliées. Dans son adresse aux citoyens américains, il a insisté sur un basculement notable de l’opinion aux États-Unis : « Pour la première fois, les sondages montrent que les jeunes considèrent ce qui se passe à Ghaza comme un génocide. » Une évolution profonde que le dirigeant vénézuélien cherche à transformer en pression politique interne contre toute aventure militaire en Amérique latine.
Un parallèle assumé avec les guerres de Washington
Le chef d’État a élargi son avertissement, déroulant une litanie de conflits qui ont marqué l’histoire moderne des États-Unis : Afghanistan, Vietnam, Libye… autant de noms devenus synonymes de dérives interventionnistes, d’occupations coûteuses et de conflits sans issue. « Voulez-vous recommencer tout cela ? Ou connaître un scénario encore pire que Ghaza ? » a-t-il insisté, affirmant que le Venezuela défendra sa souveraineté « par le droit international, la paix, et la mobilisation populaire ». Cette mobilisation, Maduro l’a d’ailleurs déjà enclenchée : 4,5 millions de personnes seraient intégrées dans une structure de défense civile et militaire en prévision d’un affrontement armé. Une démonstration de force interne qui vise autant à dissuader Washington qu’à resserrer les rangs à l’intérieur du pays. À la Maison-Blanche, le ton reste volontairement flou. Interrogé sur un éventuel recours à la force, Donald Trump a éludé : « Je ne peux pas vous dire cela, mais il y a des idées. » Une phrase qui entretient le suspense, pendant que la presse américaine évoque des « options militaires actualisées » présentées par des hauts responsables du Pentagone. Dans la foulée, Washington a annoncé le déploiement de navires de guerre et d’un sous-marin au large des côtes vénézuéliennes. Officiellement, il s’agit de lutter contre les cartels de la drogue — un argument déjà utilisé dans d’autres contextes pour justifier une présence militaire durable. Le secrétaire à la Défense, Pete Hegseth, est allé plus loin: l’armée américaine serait prête à « toutes les opérations », y compris une action de changement de régime.
Une tension régionale aux répercussions globales
Cette montée en pression s’accompagne d’incidents en mer. Les frappes américaines contre des embarcations dans les Caraïbes et le Pacifique — suspectées de transporter de la drogue — ont entraîné la mort de plusieurs passagers, déclenchant un débat international sur des « exécutions extrajudiciaires ». Pour Caracas, ces opérations constituent déjà une violation de souveraineté et une mise en scène de prétextes destinés à préparer une intervention plus large. La question dépasse cependant le seul Venezuela. Maduro affirme que « c’est toute l’Amérique latine qui est visée », dénonçant une stratégie américaine d’endiguement géopolitique dans l’hémisphère sud. En liant le destin de Caracas à celui de Ghaza, il place aussi le débat sur un terrain plus sensible : celui du droit international, de la protection des populations civiles et des limites de la puissance militaire américaine.
M. S.










































