L’histoire semble bien une éternelle répétition, et les producteurs de pomme de terre l’apprennent à leurs dépens : encore une fois, ils se retrouvent dans l’obligation de jeter l’excédent de leur production sur les axes routiers pour exprimer leur impuissance face à un marché versatile. Aussi face à un sérieux problème de stockage. Aussi face aux difficultés d’écouler leurs récoltes à l’international… Avant-hier, des quantités considérables de ce tubercule jonchaient un passage de l’autoroute Est-Ouest à hauteur de la localité de « Sonda », dans la wilaya de Bouira, perturbant ainsi sensiblement le trafic routier. Les producteurs de la localité d’El Esnam, située à la sortie est de la ville ont, en effet, fait appel à ce moyen extrême pour sensibiliser les Autorités quant à leur détresse. Il est à rappeler que ce n’est pas la première fois que les producteurs de la pomme de terre se retrouvent à jeter leurs récoltes pour exprimer leur ras-le-bol. En 2018, les agriculteurs de la même wilaya ont procédé, pour les mêmes doléances, à la fermeture de la route N°5 à l’aide de leurs récoltes. Les protestataires ont, par ce geste, tenu à dénoncer un manque flagrant des espaces de stockage qui, en plus de sauver les récoltes, auraient fait que les prix soient maintenus à des prix raisonnables. Ils ont également décidé de ne pas procéder au lancement de la campagne de la récolte pour cause justement de la baisse des prix qui sont descendus sous la barre « dangereuse » de 30 DA. Spécialistes et opérateurs avaient effectivement déjà mis en avant le danger auquel la filière serait exposée en cas où les prix venaient à descendre sous cette barre.
Toutes Ces promesses qu’on ne tient pas…
Pourtant, une lueur d’espoir avait brillé, vers la fin de l’année passée, pour les producteurs de cette localité. En effet, ceux-ci ont été conviés, le 30 décembre, à une réunion qui promettait beaucoup. Présidée par le directeur de la régulation des produits agricoles auprès du ministre, M. Mohamed Kherroubi, la réunion a vu la présence du président et du vice-président du Conseil national interprofessionnel de la filière pomme de terre, du président de l’Association des producteurs de pomme de terre de la wilaya de Bouira, M. Messaoud Boudhane et du président de l’UNPA, M. Hamadache Aoudia. Les agriculteurs, qui se croyaient écoutés, avaient alors énuméré leurs problèmes, à commencer par ceux ayant trait à la commercialisation et à la chute des prix. « Un prix qui ne couvre même pas les frais engagés pour la culture de ce tubercule », avaient-ils expliqué. Ils avaient assuré, comme déjà cité, qu’en deçà de 30 dinars le kilogramme, le producteur se verrait endetté. Et les solutions proposées étaient toutes bien considéré, et assez bien réfléchies : que les producteurs s’organisent dans un cadre d’offices ou de coopératives et que des entreprises de transformation de pomme de terre soient créées. Il était aussi question de faire l’inventaire des chambres froides existantes au niveau de la wilaya dans le but d’engager les conventions avec les producteurs de pomme de terre, avec un prix négocié pour que personne ne soit lésé. « Nous voulons des solutions concrètes et pas des promesses sans suite ! », crieront les producteurs dans moins d’un mois après. Et d’ajouter : « Si la situation demeure ainsi, cela signifie une fin programmée à notre activité et à notre filière, car nous ne pouvons pas écouler notre marchandise à un prix aussi dérisoire, qui ne couvre même pas la moitié des dépenses ! ». Et pour cette fois-ci aussi, une commission – il est fort à parier qu’elle ne sera pas la dernière ! – sera dépêchée en pompier. Elle est composée de M. Mohamed Kherroubi, directeur central de la régulation de la production agricole au ministère de l’Agriculture, d’Ahcène Guedmani, président du Conseil national interprofessionnel de la filière de la pomme de terre, de Benallal Sahraoui, directeur général de l’Office national interprofessionnel des légumes et viandes (ONILEV) et du directeur général de FRIGOMEDIT, un organisme étatique de distribution et d’exportation.
Hamid F.