Parmi les exposants approchés par Le Courrier d’Algérie au deuxième jour du Salon international du textile, cuir et habillement, un des fils de l’entreprise familiale de production de cuir « Tannerie Mitidja ». Dans son témoignage, Abdel Raouf a précisé que « cette entreprise engrange entre 4 et 5 millions de dollars de bénéfices par an, en exportant ses produits vers l’étranger, notamment l’Europe », soulignant que « le cuir algérien est très prisé par les étrangers pour sa qualité supérieure ». Pour l’histoire, notre interlocuteur nous dira également que cette entreprise date d’avant la révolution. «Nous avons ouvert notre usine de production en 2001, mais en réalité, cette activité remonte à 1948. Cette année-là, mon arrière-grand-père était le premier exportateur de laine et de peau brute vers la France et la Turquie», annonce-t-il avec fierté.
« Nous produisons un cuir 100% bio »
Au cours de notre entretien, Abdel Raouf nous a fait part d’une nouveauté. « Notre nouveauté, c’est notre cuir 100% bio. C’est une première en Algérie, un produit que nous avons réalisé en collaboration avec l’ONAAPH, l’Office national d’appareillages et d’accessoires pour personnes handicapées. Les prothèses fabriquées avec du cuir, quand elles sont bio, elles ne sont pas irritables pour la peau, ce qui est bénéfique pour le bien être des handicapés. Le cuir bio n’est pas traité avec des produits chimiques, mais uniquement avec des produits cent pour cent naturels, ce qui en fait un produit référentiel », a confié le jeune producteur. Autre confidence, et non des moindres, celle de la collaboration entre Tannerie Mitidja et la célèbre maison française de maroquinerie de luxe et de prêt-à-porter. « Nous exportons beaucoup plus en Italie, mais aussi en Turquie et au Portugal. À ce sujet, je peux vous faire part exclusivement d’une information, c’est que nous collaborons actuellement avec une grande marque, qui n’est autre que Louis Vuitton. En quelque sorte, nous travaillons avec un intermédiaire Italien qui traite uniquement et directement avec cette maison prestigieuse », nous a confié Abdel Raouf. Non sans évoquer certaines contraintes liées à la profession, notre interlocuteur nous dira aussi : « Nous rencontrons certains problèmes, à savoir celui du coutelage au niveau des abattoirs, car le cuir est parfois endommagé. Ce qui fait qu’un produit de premier choix devient de cinquième ou sixième choix, alors quand on exporte le cuir en Italie, par exemple, on refuse notre produit ».
« Nous produisons la chaussure militaire pour l’ANP »
Poursuivant son témoignage, l’intervenant nous a fait part d’une autre nouvelle importante, en rapport avec la chaussure militaire. En effet, outre l’exportation et la coopération avec l’étranger, c’est au niveau local que la Tannerie Mitidja s’est distinguée depuis l’année dernière, notamment à travers la collaboration avec le ministère de la défense nationale (MDN). « Durant les années précédentes, les fournisseurs de chaussures militaires, qu’il s’agisse des privés ou de l’État, ne produisaient pas un produit de bonne qualité, ne respectaient pas les délais de livraison et ne fournissaient pas la quantité souhaitée par l’armée. Durant les trois dernières années, ces fournisseurs n’ont jamais pu satisfaire la demande de l’ANP, alors qu’ils étaient plusieurs unités. Mais depuis que nous travaillons avec l’Établissement d’habillement et de couchage (EHC) de Kherrouba, l’ANP ne s’est jamais plainte. Nous ne sommes qu’une seule unité, mais notre produit a été félicité par l’ANP, on nous a même dit que jamais ils n’avaient reçu un tel produit avec une telle qualité haut de gamme. Question qualité et quantité, nous sommes à jour et respectons les délais à la lettre. Sachez aussi que l’EHC, depuis que nous collaborons ensemble, fournit des chaussures au normes internationales, question poids, qualité et solidité »
MOHAMED TAMZALI, REPRÉSENTANT DE LA MULTINATIONALE TEXCOMS WORLDWIDE
« L’Algérie a tout pour devenir un grand producteur »
Autre exposant accosté en marge du salon, le représentant de l’entreprise multinationale, à savoir Texcoms Worldwide. De père tunisien, de mère turque et d’origine kabyle, Mohamed Tamzali a aimablement répondu à nos questions, lors d’un bref entretien durant lequel il nous a présenté l’entreprise Texcoms et ses objectifs à travers sa présence au salon. « Texcoms Worldwide est un acteur de premier plan sur le marché du textile. Nous fournissons un large éventail de solutions pour les opérations textiles existantes, ainsi que pour les entreprises émergentes et les investisseurs potentiels.
Nous sommes performants dans la réhabilitation d’usines textiles, en plus de commercialiser des machines textiles et de fournir des matières premières telles que la fibre, le fil et le tissu. Nous nous appuyons sur l’expérience combinée de nos professionnels et de notre excellente main-d’œuvre, et assurons une performance constante », a expliqué d’emblée notre interlocuteur. Apportant plus d’explications sur les différentes compétences de cette multinationale, son représentant n’a pas omis de vanter les différents services qu’offrent Texcoms. Et d’ajouter : « Notre entreprise possède la capacité interne d’installer, de mettre en service et d’entretenir une large gamme de machines textiles. Notre expertise dans le commerce de fils et de tissus se caractérise par sa capacité à être au bon endroit, au bon moment, et à trouver le bon produit au bon prix pour sa clientèle mondiale, sans compromettre la qualité. Notre gestion efficace des usines de textile est indispensable dans les conditions actuelles du marché. Rester pertinent dans le temps et naviguer dans le paysage concurrentiel du marché nécessite un partenaire de connaissances de confiance ».
« Seuls 10% de la demande locale est couverte, il faudra plus pour exporter »
Avant d’aborder en notre compagnie le but principal de la présence de Texcoms à la foire internationale du textile, le témoignant, et pour ce qui est de la localisation de l’entreprise, a souligné qu’elle « regroupe plusieurs pays, à savoir l’Indonésie, le Brésil, Dubaï, la Tunisie, l’Égypte et le Vietnam. Intermédiaires entre le client et le fournisseur, elle possède une grande base de données. Avec trois sièges, un en Tunisie, un autre en Indonésie et un troisième en Egypte, c’est en Égypte que se trouve son plus grand potentiel d’activités, en raison de sa grande population et de son économie qui progresse de plus en plus ».
Enfin, concernant les perspectives d’investissement ici en Algérie, Mr. Tamzali a apporté son analyse, en expliquant qu’il était dommage qu’un pays avec de si grands moyens ne parvienne pas à produire de manière optimale.
« C’est la première fois que nous venons en Algérie, nous sommes venus étudier les marchés potentiels. Votre pays a de grandes capacités, mais le problème, c’est qu’elle ne sait pas comment exploiter ses potentialités et ses ressources. Comme la lenteur administrative. Si par exemple je ramène une somme d’argent en cash pour la transférer, ce sera compliqué. Les procédures sont vraiment compliquées. C’est vrai que l’Algérie veut se lancer dans l’exportation, mais comment voulez-vous réaliser cet objectif lorsqu’on sait que malgré tous les moyens que ce pays possède, dans le secteur du textile, il ne couvre actuellement que 10% de la demande locale. Rien ne manque ici, vous avez même les infrastructures nécessaires, les moyens et les compétences » , a-t-il expliqué.
Propos recueillis par Hamid Si Ahmed