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La double priorité politique et économique

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Par Ali El Hadj Tahar

Les promesses de dialogue du Président et la détermination affichée du Premier ministre de prendre le taureau par les cornes en matière économique ne suffisent pas à calmer les esprits chagrins. Si les questions d’ordre politique semblent être les préoccupations uniques des opposants au vote qui maintiennent leurs revendications et leurs défilés en dépit de la libération de plusieurs prisonniers, l’écrasante majorité du peuple a pour seul souci le panier et ce qui se passe aux frontières, notamment en Libye.
C’est avec le ventre noué que beaucoup de citoyens entament la nouvelle année, même si le pétrole fait quelques bonds en avant depuis trois mois et que l’assassinat du général iranien Qassem Soleïmani a encore dopé un baril qui désespère ses producteurs depuis sa chute en 2016. Le Brent, référence européenne, gagnait 3,9 % à 68,83 dollars à quelques minutes de sa clôture, vendredi passé à New York. La situation économique du pays est donc suspendue à la géopolitique en Orient, comme elle l’a été 20 années durant à une manne non renouvelable au détriment des secteurs de production qu’ils soient primaires ou secondaires, alors que l’industrie a accusé un recul dramatique pour tomber de 20% du PIB en 1990 à 5% aujourd’hui.
Bien informés de la situation financière du pays, les Algériens savent aussi que la production d’hydrocarbures nationale est en recul permanent depuis au moins trois années et que les réserves nationales déclinent, elles aussi, même si le pays est considéré comme l’un des plus grands champs mondiaux de gaz de schiste. Cependant, les Algériens voient d’un mauvais œil l’exploitation de ces ressources à cause de leurs conséquences avérées sur l’environnement et particulièrement sur les ressources hydriques, trop précieuses pour qu’ils acceptent de les sacrifier, comme l’ont montré les manifestations citoyennes des années passées.
Les Algériens savent, comme le leur rappellent de nombreux économistes, que les effets de la crise que traverse le pays depuis plus de deux décennies vont être durs si la situation ne s’améliore pas. La remontée du cours du pétrole pourrait être une petite bouée de sauvetage qui allongerait le sursis au cas où la courbe de la production hors hydrocarbures tarderait à grimper de manière sensible. Tous les ingrédients sont là, à la fois pour une aggravation ou, au contraire, pour une amélioration.
Dans le cas positif, dès que la machine sera mise sur les rails, elle ne tardera certainement pas de faire avancer le pays à un rythme de plus en plus rapide. Car tout est question d’hommes.
Depuis 1999, le seul et unique frein au développement était celui de l’accaparation du pouvoir par un « homme sans qualités », pour utiliser le titre d’un roman de Musil. Ce pouvoir a freiné le développement, car il est devenu l’un des plus corrompus de la planète, sinon le plus corrompu, considérant les sommes colossales détournées et évaluées en dizaines de milliards de dollars, entre 150 et 300, selon certains experts. Aujourd’hui, la majorité des citoyens veut du palpable, pas des droits abstraits de liberté, qui ne sont pas leurs premières préoccupations. Elle est donc suspendue aux promesses du Président relatives à l’amélioration du pouvoir d’achat. Pour ce faire, Djerad devrait activer les mécanismes nécessitant la révision de l’exonération de l’Impôt sur le revenu global (IRG) pour les revenus inférieurs à 30 000 DA et l’octroi des avantages salariaux et indemnitaires promis à certaines catégories professionnelles.
Ces promesses ont un coût, or ce sont les fonds qui manquent le moins. Le travailleur et le chômeur ont placé tous leurs espoirs en les changements opérés depuis le 2 avril, or rien n’a été prévu par la loi de finances 2020, tandis que l’élaboration d’une loi de finances complémentaire n’intervient traditionnellement que vers la fin du premier semestre.
Les Algériens qui ont attendu des années sans rien obtenir sauront certainement attendre lorsque convaincus que le gouvernail est entre de bonnes mains. Il est certain qu’il est entre de bien meilleures mains que celles qui ont mené le pays à la crise multidimensionnelle actuelle.
A. E. T.

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