En l’espace de 24 heures, le spectre de la famine et la brutalité des bombardements israéliens ont fauché au moins 34 vies palestiniennes, dont plusieurs enfants, selon les derniers chiffres du ministère de la Santé du territoire assiégé.
Les hôpitaux, déjà submergés, reçoivent un flot incessant de victimes, reflet d’une guerre totale qui conjugue destruction, privation et désespoir. Parmi ces victimes, 29 personnes, qualifiées de «martyrs de la quête de subsistance », ont été abattues ou mortellement blessées alors qu’elles tentaient de recevoir de l’aide humanitaire. Cent vingt-sept autres ont été blessées dans ces mêmes circonstances. Depuis le début de la guerre, 1 807 Palestiniens ont été tués et 13 021 blessés en cherchant de la nourriture ou des secours. À ces drames s’ajoutent cinq décès dus à la famine au cours des dernières 24 heures, parmi lesquels un enfant. La crise alimentaire, aggravée par un blocus total et la destruction systématique des infrastructures, a déjà causé la mort de 222 personnes, dont 101 enfants, depuis le 7 octobre 2023. Le ministère de la Santé dénonce une politique assumée de « guerre par la faim », combinée à des frappes quotidiennes sur des zones densément peuplées. Depuis le début de l’offensive, le bilan humain global s’élève à 61 499 morts et 153 575 blessés. Cette famine n’est pas accidentelle, soulignent les autorités sanitaires : elle découle directement du blocus total imposé par Israël depuis le 2 mars, avec la fermeture des points de passage et l’interdiction quasi totale d’entrée de l’aide humanitaire. Les rares convois autorisés ne couvrent qu’une fraction des besoins vitaux, tandis que des centaines de camions d’assistance restent bloqués à la frontière. Les organisations humanitaires affirment que la privation alimentaire est utilisée comme une arme de guerre délibérée. Les points de distribution d’aide sont régulièrement bombardés, contraignant les civils à risquer leur vie pour un sac de farine ou quelques boîtes de conserve. Sur le terrain, les bombardements se poursuivent sans relâche. À Khan Younès, dans le sud de l’enclave, sept Palestiniens ont été tués lorsqu’un drone israélien a ciblé une habitation. À Ghaza-ville, neuf personnes, dont six enfants, ont péri depuis l’aube dans le quartier de Zeïtoun. L’aviation et l’artillerie israéliennes ont également pilonné l’est du camp de Bureij, les quartiers de Zeitoun et de Shujaïya, ainsi que les abords du rond-point Halabi à Jabalia, provoquant de nombreux blessés. L’hôpital Al-Awda à Nuseirat a annoncé avoir accueilli, en 24 heures, cinq corps sans vie, dont celui d’un enfant, et 26 blessés à la suite de tirs sur des rassemblements de civils près d’un point de distribution d’aide au sud de Wadi Ghaza et dans plusieurs zones du centre du territoire. Sept blessés ont dû être transférés à l’hôpital Al-Aqsa pour des soins d’urgence. La liste des victimes ne se limite pas aux civils ordinaires. Les journalistes, eux aussi, sont pris pour cibles.
À l’aube, un drone israélien a frappé la tente des reporters installée devant le complexe médical Al-Chifa à Ghaza-ville. L’attaque a coûté la vie aux journalistes Anas Al-Sharif et Mohammed Qreiqa, ainsi qu’aux photographes Ibrahim Zaher et Mohammed Nofal. Le journaliste Mohammed Sobeh a été grièvement blessé. Ces attaques délibérées contre les travailleurs de l’information visent à étouffer la vérité sur ce qui se passe dans l’enclave et à empêcher la documentation des crimes commis. Les témoignages recueillis par les équipes médicales dressent un tableau accablant : des familles entières survivent avec un repas tous les deux jours, des enfants s’évanouissent dans les files d’attente, et les plus faibles meurent avant même que l’aide n’arrive. Les médecins, eux aussi, travaillent dans des conditions extrêmes, souvent affaiblis par le manque de nourriture et exposés aux bombardements qui frappent parfois les hôpitaux. Pour les habitants de Ghaza, la mort peut venir de deux façons : par la faim ou par les bombes. Le blocus empêche non seulement l’entrée de nourriture, mais aussi celle des médicaments, du carburant et des équipements médicaux. Les frappes, elles, détruisent ce qui reste des infrastructures et ciblent aussi bien les habitations que les lieux censés être protégés par le droit international.
Sur la scène internationale, les appels à un cessez-le-feu et à l’ouverture des corridors humanitaires se multiplient, mais restent sans effet concret. Les organisations de défense des droits humains parlent d’un crime de guerre à grande échelle, et certaines voix évoquent un « génocide par la faim », en référence à la combinaison d’attaques militaires et de privation délibérée de nourriture. Ghaza vit aujourd’hui dans une double détresse : sous les frappes et sous la faim. Les files d’attente pour l’aide humanitaire sont devenues des zones de danger mortel, les foyers manquent de tout, et les bombardements continuent de décimer familles, enfants et travailleurs humanitaires. À chaque nouvelle journée, la liste des morts s’allonge, tandis que la communauté internationale observe, souvent impuissante, parfois silencieuse, ce qui s’apparente de plus en plus à une tragédie humaine programmée.
M. S.