Les habitants de Ghardaïa vivent cette année le Ramadhan dans un contexte inédit marqué par un changement remarquable de leurs habitudes ancestrales accompagnant le mois de jeûne, induit par le confinement sanitaire partiel lié à la pandémie du nouveau Coronavirus (Covid-19).
Habituellement vécu par la population dans les pures traditions ancestrales qui renforcent la cohésion sociale dans la solidarité, le partage et la générosité, la population Ghardaouie, dans toute sa diversité sociologique, accueille le mois sacré dans une ambiance inédite marquée notamment par l’absence du Ftour (repas de rupture du jeûne) en famille élargie et des prières collectives et surérogatoires (Tarawih) dans les mosquées. D’un avis unanime, le Ramadhan 2020 sans son ambiance nocturne familiale, combinée à son atmosphère spirituelle, a été sapé par le confinement nocturne, en vue de lutter contre la propagation de la pandémie de Covid-19. «Il est difficile de vivre le Ramadhan sans la prière des Tarawih considérée comme le charme de ce mois sacré, et dans le confinement sanitaire que nous acceptons avec patience pour lutter cont re le coronavirus», a soutenu Hadj Bakir, un habitant du Ksar de Melika. Pour Mahfoud, fonctionnaire issu du Ksar de Béni-Isguen, ce mois de Ramadhan et surtout le confinement, lui donnent l’opportunité d’effectuer ses prières à temps, précisant qu’il compte tirer le maximum de ce mois sacré qui ne ressemblera à aucun autre. Les habitudes des habitants pendant ce mois religieux, ont presque radicalement changé, notamment avec l’interdiction de déplacement nocturne, a-t-il ajouté. En raison des contraintes liées à la propagation du Covid-19, les Ghardaouis observent le Ramadan avec une sensation de nostalgie du bon vieux temps, des retrouvailles nocturnes et des habitudes ancestrales qui accompagnent ce mois sacré. La population Ghardaouie observe à sa façon ce mois sacré, partagée entre spiritualité et joie de vivre, afin de revivifier, surtout pour les repas de rupture de jeûne, des rituels anciens gardés à travers les siècles. Sur un autre plan, des plats traditionnels locaux dont les recettes se transmettent de mère en fille depuis des temps anciens, ne sont plus proposés à la dégustation entre voisins ou famille élargie, lors de chaque célébration marquant le dixième jour, la nuit de mi-Ramadan et la leilat El-Qadr (nuit du destin, la veille du 27ème jour), confinement sanitaire oblig e. En effet, la nuit du dixième jour du Ramadhan est majestueusement rehaussée par El-Baghrir (crêpes) au miel, la nuit de mi Ramadan par la préparation d’un couscous garni à la viande de chamelon, tandis que la nuit du 27ème jour de Ramadhan est célébrée par la préparation de Chekhchoukha arrosée d’une sauce à base de dattes. Selon la tradition, ces mets appétissants, une fois préparés, sont distribués pour les passants et les amis, et échangés entre familles de différents quartiers. Les visites nocturnes entre proches, voisins, familles et amis tout au long du mois sont fréquentes.
Des traditions ancestrales que Covid-19 a interrompues hélas
«Dans les différents ksour de Ghardaïa, les portes des maisons demeurent ouvertes puisque les visites entre voisins sont ininterrompues», raconte Mahfoud, soulignant que le Ramadhan est traditionnellement une occasion pour propager les valeurs de partage, de solidarité et de regroupement familial, dans une ambiance de spiritualité et de convivialité, que la pandémie de COVID-19 a interrompue hélas. Pour maintenir les liens et l’attachement des membres de la famille en ce mois sacré marqué par le confinement et la limitation des déplacements, les ménagères se sont mises à l’heure de la technologie où des recettes aux saveurs ramadhanes ques sont échangées désormais par SMS et via Facebook. De même que l’on recourt aux SMS pour souhaiter un bon Ramadhan entre différentes composantes de la population. A l’instar des différentes régions du pays, les mosquées disséminées dans la wilaya de Ghardaïa sont fermées. «Ce qui me manque le plus, c’est surtout cette sortie, après le ftour, vers la mosquée pour accomplir la prière des Tarawih, une prière que nous n’avons pas la chance de faire tous les jours et qui nous permet de renouer avec la spiritualité», a regretté Hadj Abdelkader du quartier Theniet El-Makhzen, soulignant qu’»être privé de cette prière en groupe fait mal au cœur». Ramadhan à Ghardaïa se vit dans la pure tradition de l’abstinence, de la simplicité, et malgré les contraintes liées à la pandémie du nouveau Coronavirus, la plupart de ses habitants restent tout de même convaincus de la nécessité du respect total des mesures de distanciation sociale et du sens de responsabilité pour lutter efficacement contre le Covid-19. La vigilance est le mot d’ordre des habitants de la région où commandes à distance et limitation au maximum des déplacements restent, pour eux, des moyens efficaces pour contribuer à la lutte contre la pandémie. Les Ghardaouis, à l’instar de l’ensemble des Algériens, sont appelés à rester chez eux ap rès la rupture du jeûne, en application de l’interdiction des déplacement nocturnes durant le Ramadan entre 19h00 et 7h00, dans le cadre des mesures de confinement sanitaire partiel.