«Nous assistons à l’effondrement du Yémen», a averti, jeudi, le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon, en lançant devant le Conseil de sécurité un appel à agir pour éviter que le pays ne plonge dans le chaos. «Nous ne pouvons pas nous contenter d’assister impuissants» à cet effondrement, a-t-il ajouté devant les ambassadeurs du Conseil, qui ont ensuite entamé des consultations à huis clos sur la crise yéménite. À la sortie de ces consultations l’ambassadeur britannique Mark Lyall Grant a indiqué que son pays allait travailler avec la Jordanie à mettre au point un projet de résolution «dans les prochains jours».
Il a fait valoir «un large soutien» au sein du Conseil pour que celui-ci adresse «un message d’unité et de fermeté». Mais des diplomates redoutent que la Russie ne se montre réticente à faire pression sur les miliciens chiites houthis qui ont pris le contrôle du pays.
Ban a souligné les «défis» auxquels fait face le Yémen dont «une crise politique dangereuse», des «tensions sécessionnistes croissantes dans le Sud» et «une grave crise humanitaire» qui touche désormais 16 millions de personnes. Tous ces défis constituent «une menace pour la paix et la sécurité régionale et internationale», a-t-il affirmé. Il a appelé «toutes les parties prenantes au Yémen à entamer des négociations et à coopérer de bonne foi» afin de «rétablir dès que possible une autorité gouvernementale légitime». Il a invité les Etats membres à soutenir les efforts de médiation de son conseiller spécial Jamal Benomar, l’émissaire de l’ONU au Yémen.
«Nous devons tout faire pour aider le Yémen à éviter le précipice et à restaurer le processus politique», a-t-il martelé. Jamal Benomar a, lui aussi, tiré la sonnette d’alarme par vidéo-conférence depuis Sanaa, où il s’efforce de relancer des négociations après la prise du pouvoir par les Houthis «La transition politique est en plein désarroi», a-t-il reconnu. «L’impasse politique actuelle ne peut se régler que par la négociation», a-t-il plaidé.
«Guerre civile»
Il a évoqué les risques d’une nouvelle sécession du sud du pays et d’une «résurgence d’Al-Qaïda dans la péninsule arabique». S’il n’y a pas d’accord politique dans les prochains jours, a-t-il estimé, «il y a aussi une réelle possibilité d’effondrement du riyal», la monnaie locale, ce qui mettrait le pays en défaut de paiement et incapable de payer les salaires sans relancer la planche à billets. «Des dizaines de milliers de personnes pourraient se retrouver sans emploi», a-t-il averti. «Le Yémen est à la croisée des chemins: soit il plonge dans la guerre civile, soit il trouve un moyen de remettre la transition sur ses rails», a affirmé M. Benomar. «Cela dépend de la volonté politique des dirigeants yéménites». Malgré les difficultés, a-t-il ajouté, «l’ONU ne quittera pas le pays et réaffirme son engagement à aider le Yémen».
«En dépit de tous les obstacles, les Yéménites peuvent encore réussir» leur transition démocratique entamée il y a quatre ans, a-t-il conclu. Pour l’instant le Conseil s’est borné à publier vendredi dernier une déclaration exprimant son inquiétude et à brandir une vague menace de sanctions si les négociations ne reprennent pas.