En pleine guerre d’extermination menée par l’armée israélienne contre la population de Ghaza depuis le 7 octobre 2023, la famine vient d’arracher à la vie deux nourrissons. Leur décès, survenu jeudi à Khan Younès à cause du manque de lait et de nutrition infantile, symbolise l’effondrement total des conditions sanitaires et humanitaires dans le territoire palestinien assiégé.
Leurs corps, inanimés, ont été portés par leurs familles depuis l’hôpital Nasser pour une inhumation sobre mais déchirante, marquée par la colère et l’impuissance. Un drame qui vient s’ajouter à une litanie de morts liées à la faim : plus de 244 personnes, principalement des enfants et des personnes âgées, sont décédées faute d’accès à la nourriture et aux médicaments. Le secteur médical de Ghaza tire la sonnette d’alarme. Les responsables hospitaliers évoquent une catastrophe sanitaire imminente, aggravée par l’interdiction quasi totale d’entrée des aides humanitaires. Plus de 17 000 enfants sont actuellement en situation de malnutrition aiguë, selon les autorités médicales locales, alors que les opérations chirurgicales sont annulées par manque de fournitures, de médicaments et de personnel. Le ministère de la Santé à Ghaza a annoncé, hier, une mise à jour tragique du bilan : 56 331 morts et 132 632 blessés depuis le début du génocide, avec 103 nouveaux martyrs et plus de 200 blessés rien qu’au cours des dernières heures. Ces chiffres ne cessent d’augmenter à mesure que l’armée israélienne poursuit ses bombardements sur les écoles, les camps de déplacés, les maisons et les points de distribution d’aide.
L’aide humanitaire, traquenard mortel
Depuis mars dernier, l’entité israélienne a fermé les principaux points d’entrée des aides vers Ghaza, imposant une famine planifiée. L’entreprise « humanitaire » israélo-américaine, prétendument chargée de distribuer l’aide, a, en réalité installé des « zones tampons » dans le sud et le centre du territoire où des milliers de Palestiniens affamés sont abattus alors qu’ils tentent simplement d’atteindre un sac de farine. Un bilan glaçant du bureau de presse gouvernemental de Ghaza révèle que cette soi-disant initiative humanitaire a causé 549 morts, plus de 4 000 blessés et 39 disparus parmi les civils affamés. Ces scènes se répètent : à Khan. Younès, à Rafah, à ElQods Street…
Les files d’attente devant les points de distribution se terminent souvent dans le sang. Des témoignages de soldats israéliens, publiés par le journal israélien Haaretz, confirment que des ordres ont été donnés pour tirer à vue sur les civils non armés approchant des centres d’aide. « Les centres de distribution sont devenus des champs de tir », a admis un militaire. Un autre soldat a même déclaré : « On tire sur eux avec toutes les armes possibles, comme s’ils étaient une force ennemie ».
Bombardements en série et carnages quotidiens
Parallèlement à la famine, les bombardements israéliens se poursuivent sans relâche. Ce vendredi matin, 50 Palestiniens ont été tués dans des frappes successives sur Ghaza. Huit d’entre eux, dont cinq enfants, ont péri lors du bombardement d’une école abritant des déplacés à Saftaoui, au nord-ouest de la ville. Leurs corps, brûlés et déchiquetés, ont été extraits des décombres de l’école Oussama Ben Zaid. Dans le camp de réfugiés de Bureïj, au centre du territoire, six autres Palestiniens ont été tués, tandis qu’un raid sur le quartier de Tuffah, à l’est de la ville de Ghaza, a causé la mort de dix personnes supplémentaires. Les hôpitaux de la bande de Ghaza – notamment le complexe Al-Ahli et le centre médical Al-Shifa – débordent de corps mutilés et de blessés en détresse. À Jabalia, un missile a ciblé une maison familiale, tuant un père et sa nièce. À Rafah, au sud, un médecin et sa famille ont été exterminés dans une tente de fortune. Les hélicoptères, drones et obus d’artillerie frappent sans discontinuer. Des explosions ont même été rapportées près des hôpitaux, des mosquées et dans les rares marchés encore actifs.
L’UNRWA dénonce une famine planifiée
L’Agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens (UNRWA) a lancé un appel urgent à la levée immédiate du blocus israélien, estimant que le droit à l’alimentation est fondamental et que l’accès humanitaire est actuellement entravé de manière délibérée. « Nous devons pouvoir acheminer de l’aide à grande échelle. L’aide humanitaire n’est pas une faveur, c’est un droit humain », a déclaré l’agence dans un communiqué. Le responsable des secours médicaux de Ghaza estime, quant à lui, que sans pression internationale immédiate, un grand nombre d’enfants mourront dans les jours à venir. Il réclame l’intervention des organisations internationales, notamment pour assurer la livraison de lait infantile, de médicaments et de matériels chirurgicaux.
Un génocide en direct, sous les yeux du monde
La résistance palestinienne, de son côté, continue de riposter. Les brigades Al-Qassam, Saraya El-Qods et d’autres factions armées ont mené des opérations contre des positions israéliennes à Khan Younès et dans le nord de Ghaza. Mais le déséquilibre est total. Tandis que les Palestiniens tentent de survivre, les puissances internationales ferment les yeux. La journaliste australienne Antoinette Lattouf, licenciée pour avoir dénoncé ce crime de famine, vient d’être réhabilitée par la justice. « Depuis 2023, Israël utilise la faim comme une arme de guerre. C’est planifié, ce n’est pas accidentel », a-t-elle déclaré à sa sortie du tribunal.
Une impunité internationale persistante
Face à ces crimes répétés, l’inaction du Conseil de sécurité de l’ONU, paralysé par les vétos occidentaux, constitue une complicité de fait. Des appels à la création d’une commission d’enquête internationale se multiplient, notamment de la part du Réseau des ONG palestiniennes. Le monde entier assiste à un génocide en direct, avec ses enfants squelettiques, ses mères mutilées, ses civils affamés fusillés pour un sac de farine. Malgré les manifestations massives dans de nombreuses capitales du monde, le cours du génocide se poursuit, implacable. Le retour à la situation d’avant le 7 octobre semble désormais illusoire : l’illusion s’est brisée, les crimes sont documentés, et les peuples n’oublieront pas. À Ghaza, de l’enfant au vieillard, ils meurent debout, affamés mais libres, fidèles à leur patrie : la Palestine.
M. Seghilani