L’ONU demande aux autorités locales en France qui appliquent encore des arrêtés anti-burkinis de les « annuler immédiatement ». Elle a salué mardi à Genève la décision du Conseil d’Etat français de vendredi dernier.
Ces mesures prises par plusieurs municipalités constituent « une réaction stupide », a estimé devant la presse le porte-parole du Haut Commissariat aux droits de l’homme Rupert Colville. « Cela ne contribue en rien à lutter contre le terrorisme ».
Vendredi, le Conseil d’Etat, plus haute juridiction administrative en France, avait suspendu l’interdiction de tenues considérées comme non appropriées par la ville de Villeneuve-Loubet. « Nous appelons toutes les autorités locales ayant adopté des interdictions similaires à les annuler immédiatement », a indiqué M. Colville.
« Humiliante et dégradante »
Les limites à la liberté de manifester sa religion ou ses convictions, y compris par le choix de tenues vestimentaires, ne sont autorisées que de manière restreinte, selon les standards internationaux. Les mesures prises pour des raisons de sécurité publique doivent être indispensables et proportionnées. Selon le Haut Commissariat, ces arrêtés alimentent « l’intolérance religieuse et la stigmatisation des personnes de confession musulmane ». Ils pourraient augmenter les tensions. « De même, on ne peut prétendre que l’interdiction d’une tenue de bain est nécessaire pour un motif d’hygiène ou de santé publique ». Et M. Colville de souligner que l’autonomie des femmes à prendre des décisions est « sapée » par de telles décisions de municipalités. L’application des arrêtés a parfois été « humiliante et dégradante », ajoute-t-il encore.
Arrêté suspendu à Cannes
Le même jour, le tribunal administratif de Nice a suspendu l’arrêté « anti-burkini » pris par la ville de Cannes, comme le demandaient des associations de défense des droits de l’Homme, a indiqué le tribunal.
L’arrêté de Cannes, pris le 28 juillet, interdisait l’accès aux plages et à la baignade à toute personne n’ayant pas une « tenue correcte, respectueuse des bonnes moeurs et de la laïcité ».
Le juge des référés, qui avait pourtant rejeté par le passé des demandes similaires, a ainsi suivi la position du Conseil d’Etat, plus haute juridiction administrative française, qui a suspendu vendredi un arrêté de ce type pris par le maire de Villeneuve-Loubet (Alpes-Maritimes).
Il estime que ces dispositions « ne reposent ni sur des risques avérés de troubles à l’ordre public, ni sur des motifs d’hygiène ou de décence ». Elles « méconnaissent la liberté d’aller et venir, la liberté de conscience et la liberté personnelle, et sont propres à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité de l’arrêté », ajoute le juge.
Cet été, une trentaine de maires, pour la plupart de droite, ont pris des arrêtés dits « anti-burkini », au nom de risques de troubles à l’ordre public. Malgré la décision du Conseil d’Etat, des maires ont décidé de maintenir leurs textes, poussant des associations à déposer des recours devant les tribunaux administratifs de Nice et de Toulon (Var) pour faire suspendre des arrêtés toujours en vigueur à Nice, Menton, Roquebrune-Cap-Martin et Fréjus (Var).