Son visage hagard, rincé par la pluie, a symbolisé la débâcle espagnole, vendredi dernier, face aux Pays-Bas (5-1) : Iker Casillas a encaissé cinq buts pour la première fois de sa carrière avec la Roja, qui peut s’inquiéter de la faillite de son gardien et capitaine emblématique. «San Iker» avait été l’un des héros de la finale du Mondial-2010 en Afrique du Sud, écœurant l’attaquant néerlandais, Arjen Robben, d’une parade du bout du pied avant de soulever la première Coupe du monde de l’histoire du football espagnol.
Quatre ans plus tard, le portier de 33 ans (155 sélections) a vu son avenir se brouiller au Real Madrid comme en équipe nationale, où le match de vendredi au Brésil vient alimenter l’idée qu’il ne présente plus les mêmes garanties qu’autrefois. De fait, Robben a pris une éclatante revanche en battant Casillas à deux reprises à l’Arena Fonte Nova de Salvador, notamment sur le cinquième but, où on a vu le portier, groggy, ramper en vain vers le ballon après un crochet de l’intenable attaquant du Bayern Munich. Même si Casillas a évité un score plus lourd sur plusieurs parades, il n’est pas exempt de tout reproche: sortie à contre-temps qui permet à Robin Van Persie de le lober pour égaliser (44), intervention aérienne hasardeuse sur le troisième but néerlandais (64) et relance au pied ratée qui offre à Van Persie le quatrième sur un plateau (72).
Saison en clair-obscur
«Je dois demander pardon pour le match que nous avons tous fait en général et moi en particulier», a dit le gardien espagnol après la rencontre. «ça n’a pas été mon meilleur match, parce que je n’ai pas été à la hauteur.» Cette déroute est en effet la pire qu’ait connue Casillas sous le maillot de la Roja, effaçant une défaite 4-0 face au Portugal en amical à Lisbonne en novembre 2010. «Je pense qu’il est perturbé, qu’il se sent mal, comme n’importe qui d’autre dans l’équipe, a jugé, samedi, Sergio Ramos. Mais je le vois aussi super motivé et très convaincu du fait que tout reste possible.» «Nuit noire» pour Casillas, a titré Marca samedi matin. En tout cas, ce match sombre vient alourdir une année en clair-obscur pour le portier, relégué sur le banc des remplaçants par Carlo Ancelotti en Liga et qui n’a disputé cette saison qu’une vingtaine de matches avec son club, remportant néanmoins la Coupe du Roi et la Ligue des champions comme titulaire.
«Il a agi en capitaine»
Déjà, sa sortie aérienne ratée en finale de la C1 face à l’Atletico (4-1 a.p.), qui avait permis à Diego Godin d’ouvrir le score, avait fait couler des sueurs froides au Real, comme dans le camp espagnol. Problème pour l’Espagne, Del Bosque n’a pas vraiment d’alternative en l’absence du Barcelonais Victor Valdes, gravement blessé à un genou: Pepe Reina (31 ans, Naples) est surtout important dans la vie du groupe et le jeune David De Gea (23 ans, Manchester United) ne compte qu’une sélection avec les A. Ecarter «San Iker» ou le confirmer dans ses fonctions en espérant le sursaut du champion ? Telle est le dilemme de Del Bosque, dont le tempérament diplomate et conservateur laisse penser qu’il choisira la deuxième solution. D’autant que le gardien, aussitôt après la rencontre, a réaffirmé son ascendant sur le groupe en prenant ses responsabilités, a expliqué le sélectionneur en conférence de presse. «Quand je suis entré dans le vestiaire, il était en train de parler avec tout le monde, dans un silence très solennel, en s’auto-accusant de certaines choses et en jetant les bases de la réhabilitation dont nous avons besoin. Il a agi en capitaine», a conclu Del Bosque.