Un rapport, publié par le journal économique hébreu « Calcalist », intitulé « Une image terrifiante », met en lumière l’isolement international imposé à Israël depuis le début de la guerre contre Ghaza. Ce document, traduit par le Centre palestinien d’études israéliennes (Madar), détaille l’aggravation de cet isolement jour après jour.
Les compagnies aériennes disparaissent des écrans des vols de l’aéroport international de Lod, des gouvernements refusent de vendre des armes à Israël, des artistes annulent leurs concerts, des collaborations académiques sont interrompues brutalement, et des entreprises mondiales d’infrastructures décident de se retirer de projets en Israël. Malgré cette situation alarmante, le gouvernement israélien persiste à mener une guerre qu’il justifie à peine, tout en se plaignant d’un monde « entièrement contre elle ». Le rapport souligne que cet isolement prend souvent des formes « grises », non déclarées, justifiées parfois par des préoccupations sécuritaires mais, dans bien des cas, sans explication apparente. Les citoyens israéliens eux-mêmes ressentent les effets de cet isolement, que ce soit sur leur situation financière, leur liberté de déplacement, ou leur image à l’international. Selon l’article, cette situation ne date pas du 7 octobre 2023. Le rapport évoque la rhétorique israélienne récurrente autour de l’« antisémitisme », présenté comme une vieille hostilité envers Israël, ainsi que les appels continus du mouvement BDS depuis 2005 à imposer un boycott global à l’État hébreu. Cependant, les répercussions de la tentative de réforme judiciaire entamée en janvier 2023 ont renforcé ces initiatives, éloignant Israël des démocraties mondiales. Les événements du 7 octobre 2023, invoqués comme prétexte par Israël pour lancer une guerre totale contre la population palestinienne de Ghaza, ont perdu leur impact. À présent, l’attention internationale se concentre sur les accusations de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, accusations pesant sur Israël depuis plus d’un an. En parallèle, le gouvernement israélien, déterminé à poursuivre la guerre, s’enferme dans une stratégie de victimisation au lieu de chercher des solutions à cet isolement croissant. Dan Katarivas, président du Conseil supérieur des chambres de commerce binationales en Israël, s’inquiète des conséquences des nouvelles sanctions internationales. Il met en garde contre la montée d’un boycott « silencieux », amplifié par les mandats d’arrêt de la Cour pénale internationale contre Benjamin Netanyahou et Yoav Galant. Katarivas note que l’image d’Israël, à l’échelle mondiale, est désormais associée à des accusations de crimes de guerre, un fait qui pourrait pousser des fonds d’investissement, comme ceux de la Norvège, à éviter toute implication en Israël. Un autre exemple de boycott silencieux évoqué est le refus de la société Apple de diffuser la troisième saison de la série israélienne « Téhéran ». Ces actes isolés illustrent une dynamique plus large, où Israël risque d’être perçue comme un État paria. Katarivas estime que la réponse gouvernementale actuelle est inadéquate, soulignant que, contrairement aux années 1990, où le gouvernement israélien avait réussi à contrer le boycott arabe, la situation actuelle découle d’un mouvement populaire et non étatique, rendant la tâche bien plus complexe. L’université israélienne, fortement dépendante des échanges internationaux, est également touchée par ce phénomène. Plus de 300 chercheurs israéliens ont été victimes de boycotts académiques depuis le début de la guerre contre Ghaza, que ce soit par l’annulation de conférences, la suppression d’articles, ou le refus de financements internationaux. Ces mesures s’ajoutent aux manifestations dans les universités européennes et américaines dénonçant les politiques israéliennes, ainsi qu’à une détérioration générale de la coopération scientifique. Emmanuel Nachshon, ancien diplomate et actuel président du Comité des chefs d’universités en Israël, avertit que sans relations internationales, les universités israéliennes perdront leur raison d’être. Ce constat rejoint les préoccupations de nombreux observateurs, qui voient dans cet isolement croissant une menace existentielle pour Israël. Enfin, des voix critiques, comme le chroniqueur Ben Dror Yemini, dénoncent les politiques israéliennes actuelles, notamment l’impunité accordée aux colons qui poursuivent leurs violations des droits des Palestiniens. Cependant, ces critiques restent limitées, alors que la communauté internationale semble de plus en plus déterminée à faire pression sur Israël pour mettre fin à ses politiques de guerre et d’occupation.
« Un régime d’apartheid »
Avant le « Déluge d’Al-Aqsa », la députée américaine Rashida Tlaib persistait, dans ses interventions et déclarations, à qualifier Israël de régime d’apartheid. Beaucoup prenaient ces déclarations à la légère, les considérant comme le simple discours d’une militante passionnée, poussée par ses origines palestiniennes à exagérer ses critiques envers Israël. De nombreux partisans de la cause palestinienne, qu’ils soient arabes, musulmans ou simples défenseurs des droits humains, ne prêtaient pas une grande attention à cette accusation, se concentrant principalement sur l’occupation israélienne et ses pratiques sans mettre en lumière la politique de l’apartheid en place depuis la fondation d’Israël en 1948. Cependant, avec l’escalade de la guerre brutale menée par Israël contre Ghaza, le regard critique sur le comportement israélien s’est intensifié. Les chercheurs et observateurs à travers le monde ont rapidement compris que Rashida Tlaib avait raison dans son accusation d’apartheid. Le monde a découvert que les Palestiniens sont traités comme une classe inférieure, constamment surveillés par des caméras dans leurs maisons, rues et marchés, vivant dans des îles séparées, confrontés chaque jour aux humiliations des checkpoints et des contrôles militaires. Il a également été révélé qu’Israël sépare même les Palestiniens de leurs terres, comme celle des oliviers hérités de leurs ancêtres, les empêchant d’y accéder, transformant chaque saison de récolte en une épreuve remplie d’agressions et d’humiliations. En février 2018, Amnesty International a publié un rapport affirmant qu’Israël applique un système d’apartheid fondé sur la domination, constitutif d’un crime contre l’humanité. Ce système se caractérise par le morcellement des terres, la ségrégation, l’isolement, le contrôle, le vol de terres et de propriétés, ainsi que le déni des droits économiques et sociaux des Palestiniens. Ce rapport n’est qu’un des nombreux documents rédigés par des organisations de défense des droits humains au cours des dernières années, mais qui n’ont pas eu d’impact significatif sur l’opinion publique internationale, car ces informations n’ont pas atteint un large public. En été 2018, la Knesset a adopté la loi sur l’État-nation juif, définissant Israël comme l’État national du peuple juif, avec l’idée que le droit à l’autodétermination en Israël est exclusif aux Juifs. Dans une lettre publiée en mars 2019, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a déclaré : « Israël n’est pas un État pour tous ses citoyens, mais l’État national du peuple juif uniquement. » Cela signifie que, bien que les Palestiniens vivant en Israël aient la nationalité israélienne, ils n’ont pas les mêmes droits que les Juifs. Cette situation pourrait changer à l’avenir, et ceux qui osent affirmer cette vérité pourraient dire qu’Israël applique un régime d’apartheid, comme l’a fait l’Afrique du Sud avant que le monde n’agisse pour le démanteler. Les Palestiniens vivant dans les territoires occupés (Cisjordanie, Jérusalem-Est et Ghaza) sont dans une situation bien pire. Ils n’ont aucun droit, sont soumis à des attaques constantes de la part de la police, de l’armée et des colons. Un soldat ou un colon peut tuer ou blesser n’importe quel Palestinien pour la moindre raison, sans conséquence. Les maisons palestiniennes peuvent être démolies, leurs terres confisquées, et les personnes emprisonnées sans procès pendant des années, soumises à des tortures sévères. Tout cela se déroule depuis des décennies, mais l’Occident persiste à considérer Israël comme une oasis démocratique au milieu d’une mer de tyrannie. Ce point de vue est contesté par l’ONG israélienne B’Tselem, qui, grâce à son accès aux informations sur le terrain, décrit la région sous contrôle israélien (y compris la Cisjordanie, El-Qods et Ghaza) comme étant gouvernée par un principe unique : l’instauration d’une domination des Juifs sur les Palestiniens. Selon un rapport publié en janvier 2021, B’Tselem affirme qu’Israël applique un régime d’apartheid qui va au-delà de celui de l’Afrique du Sud. Alors qu’en Afrique du Sud, l’apartheid se basait sur la race, en Israël, il repose sur la religion, étroitement liée à la race, bien qu’il soit difficile de prouver scientifiquement que tous les Israéliens appartiennent à une même ethnie. Les actions israéliennes sont guidées par des préceptes talmudiques, considérés comme des lois absolues qui différencient le Juif du non-Juif, qu’il soit Palestinien ou non, garantissant ainsi la supériorité du Juif en toutes circonstances. L’historien et militant israélien Israël Shahak, dans son livre L’Histoire juive, la religion juive, le poids de trois mille ans, explique que ces préceptes permettent de justifier des massacres, y compris contre les civils qui, bien qu’apparaissant comme « bons » dans leur comportement, peuvent être tués selon la loi juive. Ainsi, la brutalité avec laquelle les soldats israéliens traitent les habitants de Ghaza, notamment en célébrant les meurtres de femmes, d’enfants et de personnes âgées, s’explique par ces enseignements religieux qui restreignent l’humanité à l’exclusivité des Juifs. Après le « déluge d’Al-Aqsa » et le début de la guerre d’extermination contre Ghaza, il est devenu difficile de comprendre comment un être humain peut se réjouir de la mort d’un nourrisson, d’une femme ou d’un vieillard. Mais cette incompréhension se dissipe lorsqu’on prend conscience des enseignements religieux racistes qui conditionnent les soldats israéliens, réduisant leur humanité à celle des seuls Juifs. Aujourd’hui, cette réalité est devenue claire pour une large part de l’opinion publique internationale. Ceux qui ont le courage de défier l’influence des lobbies sionistes ne se contentent plus de parler en silence ; ils crient haut et fort : « Israël est un régime d’apartheid ». Ceux qui manquent encore de courage, au moins, connaissent désormais cette vérité. Peut-être que l’avenir verra une transformation dans la perception de la communauté internationale, et qu’Israël sera de plus en plus contraint à répondre de son régime d’apartheid, comme l’Afrique du Sud a dû le faire avant de tomber sous la pression mondiale.
M.Seghilani