Mohammed VI est horrifié à l’idée de voir le mouvement de protestation contre la candidature de Abdelaziz Bouteflika, pour un cinquième mandat, se propager au Maroc, surtout que la région du Rif est toujours en ébullition. Pour éviter «ce risque», il a chargé des enseignants universitaires, connus pour leur grande proximité avec le Makhzen, de défendre les pseudo-avancées politiques et démocratiques du Maroc.
L’académicien et intellectuel Abdelhak Azzouzi fait actuellement le tour des universités pour défendre «l’exception» marocaine. Il vient ainsi de soutenir, toute honte bue, que «le Maroc est le seul pays du Maghreb à avoir réalisé des progrès importants en matière d’ouverture politique, de consécration de la paix sociale et de renforcement des institutions». Azzouzi, qui a animé au début de la semaine une conférence scientifique à l’Académie du royaume du Maroc à Rabat sur la thématique «La Constitution et l’exception marocaine : une étude comparative», a souligné que «l’institution monarchique a réussi, durant ces vingt dernières années, à moderniser l’héritage politique exceptionnel de l’histoire contemporaine du Maroc, à l’adapter aux évolutions internes et régionales et à se doter d’un sens proactif en matière de gestion des affaires publiques», omettant cependant de dire que si le Maroc est secoué ces deux dernières années par de gigantesques mouvements de protestation, c’est bien parce que justement le système politique marocain est aussi bien bloqué que corrompu jusqu’à l’os.
Faisant preuve d’un incroyable déni de réalité, cet universitaire organique, abondamment repris par l’agence officielle MAP, va même jusqu’à soutenir que «l’expérience marocaine a avancé sans soubresauts contrairement à ce qui s’est passé dans d’autres pays», oubliant de dire que le brasier du Rif n’est pas encore éteint et que la région était pratiquement en désobéissance civile pendant près d’une année. Abdelhak Azzouzi a même essayé de faire croire à son auditoire qu’au Maroc ce sont les partis politiques qui gouvernent et non Mohammed VI et son cabinet qui lui sert de gouvernement parallèle. En tout cas, les militants marocains des droits de l’Homme et la rue marocaine pensent tout à fait le contraire de ce que développe Abdelhak Azzouzi. La preuve, beaucoup demandent à être contaminés par la révolution pacifique des Algériens. Les appels invitant les Marocains à se soulever contre l’injustice et pour la démocratie se multiplient d’ailleurs sur les réseaux sociaux marocains.
M. B.