Jair Bolsonaro, élu à la présidence du Brésil, a déclaré lundi qu’il voulait nommer le juge Sergio Moro, qui a fait condamner l’ancien président Lula à 12 ans de prison pour corruption, à la Cour suprême ou au poste de ministre de la Justice. Dans une interview accordée dans la soirée à la chaîne TV Record, le président élu a également exposé certaines des mesures qu’il entend prendre rapidement contre la corruption et la criminalité, les deux axes de sa campagne électorale. Le juge Sergio Moro, qui est âgé de 46 ans, dirige l’enquête «Lava Jato» (Nettoyage rapide), centrée sur des entreprises du BTP qui ont arrosé de pots-de-vin des responsables politiques et d’anciens cadres d’entreprises nationales en échange de contrats avec la compagnie pétrolière nationale Petroleo Brasileiro (Petrobras) et avec d’autres sociétés. C’est lui qui a condamné au printemps dernier l’ex-président Luiz Inacio Lula da Silva à douze ans de prison, peine assortie d’une période d’inéligibilité, et ordonné son incarcération. Lui encore qui s’est opposé cet été à sa libération. Président de 2003 à 2010, le chef de file du Parti des travailleurs (PT) a fini par renoncer à son ambition de briguer un nouveau mandat et a transmis le flambeau à Fernando Haddad, qui n’a pas pesé lourd dans les urnes face à Jair Bolsonaro. Facilement élu dimanche avec 55% des voix, cet ancien capitaine d’artillerie prendra ses fonctions le 1er janvier prochain.
«ARRÊTER LE POLITIQUEMENT CORRECT»
Sur l’antenne de TV Record, il a annoncé qu’il n’attendrait pas la transition pour presser les élus du Congrès d’assouplir les lois sur le contrôle des armes à feu. Faciliter la détention d’armes, a-t-il réaffirmé, permettrait de réduire la criminalité en donnant aux Brésiliens la possibilité de se défendre. «Nous devons abandonner le politiquement correct, arrêter de penser que si tout le monde est désarmé, le Brésil se portera mieux, non, il ne se portera pas mieux», a-t-il dit. Il a par ailleurs déclaré qu’il tenterait de faire qualifier de terrorisme les invasions de propriétés privées menées par des groupes comme le Mouvement des sans terre (MST). Face aux inquiétudes suscitées par son profil et par ses déclarations de campagne, il a déclaré que la liberté d’expression était sacrée et a promis que l’opposition politique serait respectée. Bolsonaro effectuera son premier déplacement international au Chili, un autre pays d’Amérique du Sud qui a récemment basculé à droite. Il espère ensuite se rendre rapidement à Washington et a annoncé qu’il réalignerait la politique étrangère du Brésil vers les économies les plus avancées. Le futur président, qui voue une admiration à Donald Trump, a parallèlement annoncé dans une interview accordée à la chaîne Globo TV qu’il annulerait les campagnes gouvernementales de publicité dans les médias qu’il accuse de «mentir». A 63 ans, le chef de file de l’extrême droite brésilienne, autour duquel gravite un cercle d’ex-militaires, ajoute son nom à la liste des dirigeants de droite portés au pouvoir ces dernières années, de Donald Trump au Philippin Rodrigo Duterte ou au Hongrois Viktor Orban. Dans un entretien téléphonique lundi avec le secrétaire d’Etat américain Mike Pompeo, Bolsonaro a discuté de collaborations futures sur des questions prioritaires de politique étrangère, dont le Venezuela, la lutte contre la criminalité transnational et les moyens de renforcer les relations économiques.