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TRENTE DÉPOUILLES RESTITUÉES À GHAZA : Des corps mutilés ou les preuves de torture

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Dans un silence étouffé par la peur et la cendre, trente corps de Palestiniens ont été restitués jeudi au ministère de la Santé de Ghaza. Trente dépouilles arrachées aux réfrigérateurs de l’occupation, rendues par la Croix-Rouge internationale. Trente corps qui portent, selon les autorités sanitaires, les marques de coups, de tortures, de brûlures, de mains liées et d’yeux bandés. Trente témoins muets d’un crime commis dans l’ombre. Le ministère de la Santé a confirmé que quatre victimes ont pu être identifiées par leurs familles. Les autres attendent encore qu’un nom leur soit rendu, dans les morgues saturées du territoire. Cette livraison macabre porte à cent vingt le nombre total de corps libérés ces dernières semaines, sans qu’aucune explication ni reconnaissance ne soit donnée par l’occupant. « Les corps nous ont été rendus enchaînés comme des animaux, les yeux bandés, portant des traces de torture et de brûlures », a déclaré Mounir Al-Barsh, directeur général du ministère de la Santé, dans un message publié sur la plateforme X. Selon lui, ces dépouilles n’ont pas été découvertes sous les ruines mais “détenues” des mois durant dans les réfrigérateurs militaires de l’occupation. « Ce que nous voyons, ce sont des crimes qu’aucune propagande ne peut dissimuler », a-t-il ajouté. Ces accusations ne sont pas isolées. Des prisonniers récemment libérés dans le cadre d’un échange ont raconté à Al-Quds Al-Arabi l’enfer de la détention : coups, humiliations, privation de sommeil, morsures de chiens dressés pour terroriser. « Je tente de me maîtriser en public, mais à l’intérieur, mes blessures sont encore ouvertes », confie l’un d’eux. Ces récits, corroborés par des traces physiques, rappellent les pires heures des régimes de terreur. Pendant que les familles pleurent et que les équipes médicales de Ghaza s’efforcent d’identifier les martyrs, le monde détourne le regard. Le point de passage de Rafah demeure fermé, les secours humanitaires bloqués à la frontière égyptienne, les blessés laissés sans soins. Hier encore, des tirs de l’armée d’occupation ont fait de nouvelles victimes malgré la trêve annoncée. Les chiffres sont terrifiants : 67 938 martyrs, 170 169 blessés depuis le 7 octobre 2023. Et ce décompte, déjà inhumain, ne reflète pas la douleur des familles, ni les cris étouffés des disparus.

L’ombre du déni et la complicité internationale
La scène internationale, elle, hésite entre hypocrisie et mutisme. La chaîne Al-Jazeera rapporte qu’Israël a interdit l’entrée d’une délégation turque venue avec des équipes de secours et du matériel lourd pour participer à la recherche des disparus sous les décombres. Des responsables israéliens auraient cyniquement affirmé que la résistance palestinienne « pouvait s’occuper seule de restituer les corps ». Ankara a pourtant confirmé sa volonté d’envoyer des experts pour identifier les victimes et aider à extraire les restes coincés sous des tonnes de béton. Même du côté américain, le discours vacille entre froideur et menace. Un conseiller de l’administration à Washington a reconnu les difficultés à identifier les corps israéliens encore piégés sous les ruines, tandis que le président Donald Trump a menacé, sur sa plateforme Truth Social, de «tuer» les membres de la résistance palestinienne si ceux-ci « continuaient de tuer des gens à Ghaza ». Des propos incendiaires, symptomatiques d’une lecture à sens unique du drame en cours, où la victime devient bourreau, et le bourreau, simple « allié stratégique ».
Ce que révèlent les dépouilles rendues, c’est la vérité que l’occupation tente de garder gelée dans ses chambres froides : une pratique systématique de la torture, une déshumanisation méthodique, une vengeance maquillée en guerre. Ces cadavres livrés par lots ne sont pas des statistiques, mais des preuves. Preuves de la brutalité d’un système colonial qui nie jusqu’à la dignité du mort. Les équipes médicales de Ghaza poursuivent malgré tout leur tâche : autopsier, documenter, identifier, témoigner. Leur travail, méticuleux et héroïque, s’inscrit dans la longue lutte pour la mémoire et la justice. Dans les ruelles encore couvertes de poussière, les familles se rassemblent, récitent des prières et attendent que la terre retrouve ses enfants. La barbarie de l’occupation n’a pas seulement tué : elle a voulu effacer. Mais chaque corps retrouvé, chaque nom rendu, chaque cicatrice documentée devient une preuve que la mémoire ne meurt pas. Ghaza, malgré le siège, malgré la faim, malgré la mort, continue de se battre pour une vérité que nul ne pourra congeler éternellement.
M. S.

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