Emboîtant le pas à la patronne du Parti des travailleurs (PT), le secrétaire général, par intérim, du Rassemblement national démocratique (RND), Ahmed Ouyahia, déclare, lors de l’allocution inaugurale du congrès régional, qui s’est tenu ce samedi à la Mutualité des travailleurs de la construction de Zéralda, que la photo de Bouteflika, tweetée par le Premier ministre français, Manuel Valls, est «une manœuvre coordonnée par certains entre Paris et Alger».
Ces «certains» ne sont autres que «des revanchards qui ne veulent pas admettre que «l’Algérie de Papa» est finie», précise Ouyahia. L’orateur rajoutant, ici, une couche de mystère au grincement dans la machine des relations algéro-françaises, et aux objectifs d’un partenariat d’exception que l’on veut bâtir des deux rives de la Méditerranée. Et ce, bien qu’une certaine opposition et quelques médias, selon les propres termes qu’il a utilisés, soient explicitement accusés d’y jouer un jeu malsain.
Donc, selon Ouyahia, ce sont également les relents d’une vengeance, plat qui se mange froid, qui peuvent être considérés comme motivations de l’utilisation du Net pour la déstabilisation du pays, via une mise à mal du quatrième mandat, appelé, si Dieu le veut, a être terminé dans les délais, tient-t-il à indiquer, et ce, bien que le président de la République ait vu son énergie réduite des effets de la maladie. Il n’en demeure pas moins que ladite maladie ait «accru l’affection du peuple pour lui». On y décèle, dans ses propos, «la maladie a certes réduit son énergie», et probablement, pour la première fois, l’aveu selon lequel Bouteflika est amoindri physiquement, venant, de surcroît, de son directeur de cabinet. “Dieu merci, malgré cela», rappelle ce dernier, «le Président ne s’est pas assoupi, lors de la rencontre avec Valls, contrairement à «de hautes personnalités françaises en parfaite santé», qui n’ont pas résisté à la tentation de tomber dans les bras de Morphée, «même durant des activités des plus officielles». L’allusion, ici, à Laurent Fabius, est, on ne peut plus claire ! Quoi qu’on dise, les réalisations avantageuses pour le pays suffisent, aux yeux de Ouyahia, pour dédouaner le Président de la mauvaise presse, dont on veut le caractériser. Plus explicite, Ouyahia dévoile, un tantinet nationaliste, les raisons de la trahison française, en justifiant que l’attaque, dont a fait l’objet l’Algérie, à travers «l’exploitation éhontée d’une image du Président Bouteflika», trouverait sa justification dans la position algérienne, souveraine, visant la défense de ses intérêts régionaux, essentiellement économiques et ceux attentatoires à ses propres Institutions. Quelle que soit la manière, et quelles en soient les visées, Ahmed Ouyahia, intervenant au nom du RND, «condamne fermement ce comportement abject des revanchards français et de certains médias qui les ont relayés». La partie complice algérienne n’en est pas aussi épargnée : elle mérite toute la condamnation requise de la part du patron par intérim du «bébé moustachu».
La fronde interne : Ouyahia insensible
La tenue du congrès a coïncidé, faut-il le rappeler, avec un double anniversaire : la célébration de la Journée du Savoir, coïncidant avec le 16 avril, et celle du deuxième anniversaire de la réélection de Abdelaziz Bouteflika, à la tête de la présidence de la République, le 17 avril 2014. Au-delà du symbolique, des conditions particulières sont aussi à relever. Parmi elles, on peut citer la fronde interne, les attaques du secrétaire général du FLN, Amar Saâdani, le retour de Chakib Khelil, l’incrimination de Abdessalem Bouchouareb dans l’affaire «Panama Papers», et ce, pour ne citer que celles-là. Au sujet de la première citée, Ouyahia, dénommant ceux qui l’actionnent de «minorité» et de «groupuscule», met en garde ces derniers, leur promettant qu’il s’en tiendra aux résolutions de la Commission nationale chargée des préparatifs du congrès extraordinaire, prévu entre le 5 et le 7 avril, conformément au statuts et au règlement intérieur du Parti. Ceci étant dit, Ouyahia assure ses détracteurs qui tentent de s’imposer par le biais d’un soi-disant «redressement», que leur action ne sera nullement dissuasive, quant à la marche en avant qu’il compte faire jusqu’à cette échéance. D’autant plus, tient-il à rappeler, que le congrès en question réunira, selon les prévisions, près de 1 600 congressistes, dont 500 de sexe féminin, et dont les délégués de base seront sélectionnés par consensus ou par élection, témoignant, ainsi, d’une pratique démocratique sans pareil, que devra conforter davantage l’élection, pour la première fois dans la vie de ce Parti (l’ANR l’ayant déjà fait en 2012, ndlr), à bulletins secrets, du SG du Parti, soit ce que a décidé la commission nationale du RND. Ahmed Ouyahia, fort d’une base militante de 93 000 membres, n’est pas apparemment, du moins comme il tente de le faire paraître, dans une mauvaise posture.
Affaires Khelil, Panama Papers, propos de Saâdani
«Je n’ai pas à commenter ce que doit faire la Justice, car, moi aussi, je suis justiciable», a-t-il répondu à un confrère qui le questionnait ainsi: «Pourquoi la Justice ne s’est pas autosaisie de l’affaire Chakib Khelil?» Concernant Abdessalem Bouchouareb, qui est aussi militant du RND, Ouyahia a tenu à préciser que celui-ci était un homme d’affaires, avant de devenir ministre, tout en avouant ne pas savoir si ces capitaux, dévoilés dans l’affaire Panama Papers, sont sortis ou non du pays. Quant à Saâdani, il lui répond en ces termes: «Je suis honoré par la confiance mise en moi par le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, qui est aussi président». Respectant même son avis, «Saâdani est libre de ne pas me faire confiance». Liberté de paroles quand tu nous tiens! Enfin, Ahmed Ouyahia a tenu à afficher son total soutien à la ministre de l’Éducation nationale, Nouria Benghebrit. Signalant que les affaires du pays sont dominées par le lobby de l’argent, notamment dans le milieu des médias, Ahmed Ouyahia fait-il allusion à Issad Rebrab, propriétaire déjà du journal “Liberté”, qui vient de racheter le groupe “El-Khabar” ?
Zaid Zoheir