L’organisation Etat islamique a envoyé des renforts dans la région de Kobané, en Syrie, et lancé une nouvelle attaque contre les forces kurdes, en dépit des frappes quotidiennes de la coalition internationale.
Les jihadistes concentrent une grande partie de leurs efforts sur cette ville dont la prise leur permettrait de contrôler une longue bande continue de territoire à la frontière syro-turque. Ces dernières heures, l’EI a de nouveau reçu des «renforts en hommes, munitions et équipements» venant de la province d’Alep et de celle de Raqa, bastion du groupe extrémiste sunnite en Syrie, a indiqué samedi l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH), qui se fonde sur un vaste réseau de militants et témoins à travers la Syrie. Vendredi, les jihadistes ont lancé une nouvelle offensive contre le secteur du poste-frontière, dans le nord de Kobané, tirant 28 obus de mortier, d’après l’OSDH. «L’EI a visé le poste-frontière et des bâtiments autour», a confirmé un responsable local kurde, Idriss Nassen, joint au téléphone alors qu’il se trouve actuellement en Turquie. Il a ajouté que «dans la nuit, l’EI avait lancé une attaque féroce depuis l’est de Kobané pour atteindre le poste-frontière, mais les milices kurdes YPG (Unités de protection du peuple) ont répliqué avec force» et ont repoussé les jihadistes. Plusieurs membres de l’EI ont été tués et d’autres blessés, a-t-il précisé. M. Nassen a également fait état de cinq raids aériens de la coalition internationale la nuit passée dans l’est, l’ouest et au sud de Kobané, en soutien aux forces kurdes au sol.
Selon une journaliste de l’AFP à la frontière turque, la situation était calme en matinée, même si des tirs pouvaient être entendus dans la partie est de la cité. La région de Kobané est le théâtre depuis un mois d’une vaste offensive des jihadistes, qui sont finalement entrés dans la ville le 6 octobre mais n’en contrôlent pour le moment que la moitié, selon l’OSDH. Plus d’une centaine de raids ont été menés par la coalition internationale depuis fin septembre dans la zone. «Je pense que ce que nous avons fait là-bas ces derniers jours est encourageant. Nous voyons les Kurdes se battre et regagner du terrain et je pense que nous avons été capables de les aider avec des frappes aériennes précises ces derniers jours», s’est félicité le général Lloyd Austin, chef du Commandement militaire américain chargé de la région (Centcom), qui supervise la campagne de frappes en Irak et en Syrie.
Il a néanmoins reconnu que la ville, où plusieurs centaines de civils restent bloqués, pouvait encore tomber entre les mains des jihadistes.
L’ONU appelle à soutenir Bagdad
En dépit de l’importance médiatique et symbolique de Kobané ces dernières semaines, le général Austin a rappelé que l’Irak était «la priorité des Etats-Unis» et «devait le rester». Le Conseil de sécurité des Nations unies a également souligné l’importance de combattre les jihadistes en Irak, et exhorté la communauté internationale à intensifier son soutien au gouvernement irakien et à ses forces de sécurité. Les forces irakiennes, appuyées par des frappes aériennes de la coalition, ont lancé vendredi plusieurs offensives, dans la région de Tikrit, aux mains des jihadistes depuis quatre mois, et dans trois secteurs de Ramadi, partiellement contrôlé par l’EI. Accusé de crimes contre l’Humanité, l’EI qui compte des dizaines de milliers de combattants dont de nombreux étrangers y compris occidentaux, est responsable de terribles exactions -viols, rapts, exécutions, décapitations- dans le «califat» qu’il a proclamé fin juin sur les vastes régions sous son contrôle en Irak et en Syrie. Si les Etats-Unis ont exclu l’envoi de troupes au sol, ils cherchent à renforcer l’armée et les forces kurdes en Irak, ainsi que la rébellion et les Kurdes en Syrie. Une délégation américaine a ainsi rencontré le 12 octobre à Paris une délégation du PYD, principale parti politique kurde de Syrie, selon un communiqué du porte-parole du parti. Un développement que la Turquie, qui refuse toujours d’intervenir en Syrie malgré les appels répétés de ses alliés, ne voit pas d’un très bon œil. Ankara craint en effet que le renforcement des Kurdes en Syrie ne bénéficie par ricochet à leurs «frères» turcs du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), qui mènent une guérilla sécessionniste en Turquie depuis 1984. Ces derniers jours, le président turc Recep Tayyip Erdogan a ainsi mis le PKK et l’EI dans le même sac «terroriste».