La métropole syrienne d’Alep connaît depuis 24 heures un répit dans les raids aériens du régime et de son allié russe, à la veille de l’entrée en vigueur d’une trêve censée permettre aux civils et rebelles de quitter la ville ravagée.
Sur le plan diplomatique, une réunion de travail sur la Syrie est prévue à Berlin entre les chefs de l’Etat français, russe et allemand, tandis qu’à Genève, militaires russes, américains, saoudiens, qataris et turcs se retrouvent pour tenter de dissocier à Alep groupes rebelles «modérés» des jihadistes. Moscou, principal allié du président Bachar al-Assad, avait annoncé mardi l’arrêt des raids de son aviation ainsi que celle du régime sur la partie rebelle d’Alep, soumise à un déluge de feu meurtrier depuis une offensive lancée par Damas le 22 septembre pour reprendre la deuxième ville du pays. Cette suspension intervient avant l’entrée en vigueur jeudi à 05H00 GMT d’une «trêve humanitaire» de huit heures, annoncée par Moscou et qui doit permettre en principe l’évacuation de civils et de rebelles qui le désirent des quartiers Est de la métropole, tenus par les rebelles, où vivent quelque 250.000 personnes. «Il n’y a pas eu de raids aériens depuis mardi matin», a indiqué à l’AFP à la mi-journée Rami Abdel Rahmane, directeur de l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH). «Mais il y a toujours des combats sur plusieurs fronts aux abords des quartiers rebelles, notamment dans la Vieille ville», avec des tirs d’artillerie du régime et des roquettes lancées par les rebelles, a-t-il précisé.
«Pas d’avions dans le ciel»
Ancienne capitale économique de Syrie, Alep est le principal front de la guerre qui déchire la Syrie depuis mars 2011 et qui a fait plus de 300.000 morts. «Grâce à Dieu, il n’y a pas d’avions dans le ciel en ce moment», a indiqué de son côté à l’AFP Ibrahim Abou al-Leith, porte-parole des Casques blancs à Alep, les secouristes en zone rebelle. «Mais il y a encore des tirs d’artillerie et de roquettes», a-t-il ajouté. Profitant du répit dans les frappes, les habitants d’Alep-Est étaient sortis mardi à la recherche de nourriture, de plus en plus rare dans ce secteur assiégé depuis pratiquement trois mois.
La pause humanitaire de jeudi doit permettre l’ouverture de six couloirs humanitaires pour l’évacuation des civils et des blessés, et deux autres passages pour le retrait des combattants. «Les troupes syriennes se retireront à une distance suffisante pour que les combattants puissent quitter l’est d’Alep avec leurs armes», a précisé le ministre russe de la Défense, Sergueï Choïgou. «Il y a eu trois cessez-le-feu à Alep depuis le début de l’année. Cela n’a rien donné (…) Nous n’y croyons plus», a réagi toutefois lors d’une visite à Paris Abdulrahman Almawwas, vice-président des Casques blancs.
«Eliminer les terroristes»
Le régime et son allié russe affirment bombarder les quartiers rebelles pour éliminer les «terroristes», principalement les jihadistes du Front Fateh al-Cham (ex-Front al-Nosra, la branche syrienne d’Al-Qaïda). «Nous devons éliminer les terroristes à Alep, c’est ainsi que nous pourrons protéger les civils», a souligné le président Assad lors d’un entretien avec la chaîne de télévision suisse SRF 1 diffusé mercredi. Des militaires russes, américains, saoudiens, qataris et turcs se retrouvent d’ailleurs mercredi à Genève pour discuter de «la séparation entre l’opposition modérée et les terroristes à Alep», selon l’armée russe. «Chaque fois, les Américains disaient qu’il était impossible d’effectuer cette séparation sans mise en place d’un cessez-le-feu. La condition qui a été posée (…) est maintenant remplie», a affirmé la porte-parole de la diplomatie russe, Maria Zakharova,
Il n’y a «plus aucune raison pour ne pas mener jusqu’au bout le processus de séparation», selon elle. A Berlin, une «réunion de travail» sur la Syrie est prévue entre le président français François Hollande, son homologue russe Vladimir Poutine, et la chancelière allemande Angela Merkel, à l’issue d’un sommet sur l’Ukraine, selon la présidence française. De source française, il s’agira de faire «passer toujours le même message à Poutine sur la Syrie: un cessez-le-feu durable sur Alep et un accès humanitaire». Mme Merkel a dit ne pas attendre de «miracle» sur ce dossier, jugeant que la question des sanctions contre la Russie en représailles de ses bombardements «ne peut être enlevée de la table» des discussions. Mercredi, la Russie a accusé l’aviation belge, qui fait partie de la coalition internationale antijihadiste, d’avoir tué six civils suite à des bombardements dans une localité de la région d’Alep. Le ministère belge de la Défense a démenti ces accusations.