La volonté, dit-on, soulève les montagnes. Quand elle est mise au service d’une cause noble comme la solidarité, elle peut produire des résultats qui vont au-delà de ce que les bénéficiaires – dans le cas présent, les parents des bénéficiaires puisque ceux-ci ne sont que des enfants en bas-âge ; quand il ne s’agit pas de nourrissons – ne pouvaient jamais imaginer.
Surtout quand cette solidarité se fait autour d’une question de santé. Et que cette dernière a trait à une pathologie à la gravité avérée comme peut l’être le spina bifida. Et qu’elle est doublée d’un aspect social évident : la majorité écrasante des bénéficiaires de l’action de solidarité, qui aura pour théâtre, durant toute la semaine en cours, l’hôpital Mohamed Boudiaf de la ville de Médéa, appartiennent, en effet, à des familles que le discours officiel qualifie pudiquement « de défavorisées ». C’est, à l’évidence, cette gravité et l’insuffisance (actuelle) de compétences nationales pour prendre efficacement en charge cette pathologie, affectant la moelle épinière, qui sont à l’origine de l’action de solidarité en question. Une action initiée par la Maghreb-American Health Foundation (MAHF), une association multidisciplinaire fondée, en avril 2012, aux Etats-Unis, par des médecins originaires du Maghreb, dont le docteur Azzedine Stambouli, un médecin algérien établi à Washington,qui se propose d’apporter son concours désintéressé à la résolution de certains problèmes de santé auxquels sont confrontés les pays de cet espace géographique mais également de contribuer à la formation des médecins et personnels de santé y exerçant. Et à laquelle prendra part une équipe médicale américaine composée de (13) membres : quatre éminents professeurs en neurochirurgie infantile, dont un détenteur du Prix Nobel de médecine, des anesthésistes, des rééducateurs et des infirmiers. Conduite par Azzedine Stambouli, précisément, celle-ci est arrivée avant-hier dans la capitale du Titteri. Selon les informations que nous avons pu avoir, elle effectuera, durant son séjour d’une semaine, « 30 opérations chirurgicales sur autant d’enfants atteints de spina bifida » et choisis, avons-nous appris, parmi les cas les plus désespérés ; des opérations d’autant plus délicates qu’elles se proposent de corriger les malformations, « plus ou moins sévères », pour reprendre les propos d’une spécialiste en neurochirurgie infantile exerçant à l’hôpital susmentionné, de la moelle épinière provoquées « par l’absence de fermeture des arcs postérieurs vertébraux » ; les plus fréquentes de ces malformations de nature congénitale sont, selon le même spécialiste, « généralement lombaires » mais peuvent également être « dorsales et même cervicales ». Dans tous les cas, a-t-il précisé, elles s’accompagnent « d’importants désordres neurologiques » tels, entre autres, « une paraplégie, une incontinence sphinctérienne, une insensibilité des membres inférieurs et une cécité ». C’est à la correction de tels désordres que vont s’atteler, durant la présente semaine, les membres de l’équipe médicale américaine ; tous des bénévoles. Et ce, par les biais des interventions chirurgicales qu’ils effectueront durant leur séjour à Médéa. Sauf que leur mission ne se limitera pas à cela. En associant des spécialistes algériens à ces interventions, ils concrétiseront le deuxième objectif de leur mission en Algérie ; à savoir la formation de ceux-ci « dans les nouvelles techniques de traitement chirurgical de cette pathologie » ; des techniques qui visent, avons-nous appris, le double objectif «de réduire sensiblement la durée d’hospitalisation des patients et de leur éviter des complications post-opératoires fâcheuses ». Comme ils auront également à examiner, en parallèle, quelque 190 enfants, venus de toutes les régions du pays, souffrant de spina bifida. L’importance d’une formation plus poussée d’équipes multidisciplinaires algériennes spécialisées dans le traitement de cette maladie congénitale est rendue nécessaire, selon nombre d’observateurs, aussi bien par l’évolution rapide des techniques de son traitement que par le souci d’assurer une certaine équité aux familles algériennes devant la maladie ; la cherté du traitement (du spina bifida) pénalisant, en effet, grandement les plus pauvres d’entre elles qui étaient, de ce fait, réduites à regarder, impuissantes, leurs enfants s’éteindre à petit feu. Mais également par la lourdeur du suivi post-opératoire des patients ; une lourdeur qui découle de sa durée. Il faut, en effet, selon le spécialiste en neurochirurgie infantile cité ci-dessus, « pas moins de dix années pour effacer chez le patient qui en a été affecté, les séquelles de cette maladie ». à titre indicatif, la Maghreb-American Health Foundation (MAHF), n’est pas à sa première action du genre dans la région maghrébine. Selon son site, elle a, en effet, déjà organisé deux autres similaires en Tunisie,en septembre 2012, et au Maroc, une année après. Ce qui n’a pas manqué de pousser nombre de citoyens algériens à s’interroger sur les raisons de ce « retard » mis par la MAHF à intervenir dans notre pays. Des interrogations auxquelles a toutefois répondu un des responsables de Nass El Khir, une association caritative algérienne. Selon les informations qu’il a posté sur sa page facebook, celui-ci était dû «à l’opposition de la Société algérienne de neurochirurgie à la venue en Algérie d’une équipe médicale algérienne » ; une opposition qui n’a été contournée que dernièrement « avec l’autorisation que le ministère a accordé à une telle venue ».
Sur un autre plan, il semble que le choix de la capitale du Titteri pour accueillir cette mission médicale américaine est motivé par la volonté des spécialistes en chirurgie infantile exerçant dans son hôpital de faire de celui-ci un établissement pilote, à l’échelle nationale, dans le traitement de la pathologie du spina bifida.
Mourad Bendris