Sept œuvres littéraires algériennes ont été traduites cette année en tamazight par le Haut Commissariat à l’amazighité (HCA) dans une démarche visant à enrichir, développer et généraliser la langue amazighe par la traduction. Vers la fin 2014, le HCA a entrepris à travers des ateliers scientifiques à Taghit (Béchar), un projet de traduction dont les ateliers ont été confiés à des spécialistes en langue amazighe. Après avoir obtenu l’autorisation légale de la part des maisons d’édition et les auteurs des œuvres originales, sept œuvres littéraires ont été traduites. Il s’agit de « Tassilia » de Azzedine Mihoubi, « Le noir te va si bien » de Ahlam Mosteghanemi, « Les Citadelles érodées » de Mohamed Sari,, « La nuit du Henné » de Hamid Grine, « Taous Amrouche » de Djoher Amhis, « Les jeux de notre enfance » de Noureddine Louhal et « La guerre de Jugurtha » de l’historien romain Salluste. Dans l’attente d’une publication élargie de ces ouvrages, le HCA propose au niveau de son stand au Salon intarnational du livre d’Alger (SILA), des extraits traduits aux variantes kabyles et chaouies. Pour ce qui est du projet, le premier du genre, le SG du HCA, Si Hachemi Assad a indiqué que l’expérience sera généralisée à d’autres œuvres algériennes et universelles en vue d’élargir le lectorat de manière « structurée » et donner l’opportunité aux amazighophones de découvrir les littératures universelle et algérienne. Le HCA a déjà encadré des traductions considérées comme des essais dont « Le petit prince » d’Antoine de Saint-Exupéry et les « Quatrains » de Omar Khayam. En dépit de la dynamique que connait ces dernières années la traduction vers le tamazight, le SG du HCA a évoqué un « manque » de dictionnaires bilingues qui fournissent des équivalents en tamazight. Dans ce contexte le HCA a organisé, dans le cadre du Sila, une table ronde consacrée à l’édition, la coédition et la traduction en présence de spécialistes et de chercheurs en langue amazighe. Absence d’un dictionnaire unifié: La hantise des traducteurs. Le chercheur en langue amazighe, Mohamed Djellaoui, traducteur du recueil de poésie « Tassilia » a longuement évoqué ce point, en affirmant que la traduction en langue amazighe à partir de la langue arabe, connue pour la richesse de son lexique, achoppait souvent à la pauvreté du vocabulaire amazigh et à la difficulté de transmettre les émotions exprimées dans un poème en arabe vers le tamazight. Quant à l’absence de terminologie artistique et scientifique, Djellaoui a rappelé que le tamazight « reste pauvre d’expressions linguistiques, mais il est en voie d’enrichissement et de constitution ».
Abondant dans le même sens, l’historien Habiballah Mansouri, passionné de traduction en langue amazighe, estime que l’absence de synonymes était un réel obstacle pour le traducteur en Tamazight, insistant sur l’impératif de s’accorder sur un « dictionnaire » de référence pour les traducteurs, afin de maintenir la traduction dans un cadre académique. Le chercheur propose la formation de traducteurs en tamazight, en introduisant une nouvelle spécialité au niveau de l’Institut supérieur de traduction, notamment avec la forte demande sur le livre amazigh. Le journaliste et psychologue Mohamed Zerdoumi, traducteur en langue chaouie du roman « Le noir te va si bien » de Ahlem Mostaghanemi, qui constitue sa première expérience dans ce domaine, a pour sa part affirmé que « la langue amazighe nécessite des outils scientifiques modernes pour sa promotion et sa généralisation ».
L’absence d’un dictionnaire amazigh unifié demeure la hantise pour les traducteurs car chaque traducteur doit puiser dans son propre bagage linguistique et culturel pour combler le vide linguistique, en attendant les résultats des premiers ateliers lancés en 2014 dans différentes régions amazighophones, et animés par des chercheurs et des spécialistes en tamazight pour recenser et collecter les données linguistiques nécessaires à l’établissement d’un dictionnaire unifié.