Quelques jours après ses hésitations verbales sur le come-back de l’ex-ministre de l’Énergie, Chakib Khelil, en Algérie, la SG du Parti des travailleurs (PT), Louisa Hanoune, a fini, hier, par clarifier sa position.
Avec le scandale d’évasion fiscale dit «Panama Papers» qui gagne en polémique la scène nationale, du fait que le ministre de l’Industrie, Abdessalem Bouchouareb, eût été cité dans l’affaire, Hanoune ne veut pas donner un cachet politique à ces questions. Pour elle, c’est à la justice de trancher ces cas. En effet, la première fois où elle était interrogée sur Khelil, la responsable politique a fait preuve de beaucoup de prudence dans ses propos. Elle qualifiait ce retour de «non-événement», tout en mettant, tout aussi, en garde, contre les «provocations» que cela pourrait en suscitr parmi la population. Lors d’une rencontre, animée hier à la bibliothèque communale d’El-Harrach, avec cadres et militants du parti issus d’Alger, Hanoune est revenue sur ces deux affaires, dans un contexte marqué par le phénomène planétaire du «Panama Papers». Un grand déballage qui s’apparente à «un séisme», a qualifié la conférencière, pour se passer de tout commentaire, visiblement. Ceci, dans la mesure où les révélations de cette enquête internationale, menée par un consortium de journalistes issus d’une centaine de médias, ont touché à un haut responsable politique du gouvernement national. Même si ces révélations en soi, ne suscitent pas pour elle une surprise générale chez les Algériens, de par une foultitude d’affaires de corruption qui défrayent la chronique judiciaire, il n’en demeure pas moins que la «Justice doit prendre acte et décider sur ces cas», a indiqué la patronne du PT, en sorte d’interpeller l’institution judiciaire. Elle estime que le peuple s’interroge sur le silence de la Justice qui «impose un statuquo dangereux», devant les affaires ayant éclaboussé la compagnie pétrolière Sonatrach, à travers ses procès en cascade. À ce titre, elle considère que l’accueil officiel réservé à Khelil lors de son atterrissage, le 17 mars dernier à l’aéroport d’Oran, en provenance des Etat-Unis, «est une provocation». Il a été reçu «en héros, comme s’il est le Mahdi mountadhar (guide attendu, ndlr)», s’est offusquée la dame de fer. Or, pour elle, l’ex-homme fort du secteur énergétique «n’est pas jugé à ce jour», a-t-elle regretté, après avoir entretenu un silence au sujet de l’homme le plus controversé dans le scandale de Sonatrach. En réponse aux déclarations justifiant la réhabilitation de l’ex-ministre, par le fait que les poursuites judiciaires lancées à l’encontre du mis en cause, à travers un mandat d’arrêt international que l’on dit souffrant d’un vice de forme, Hanoune explore une autre piste. Si tel est le cas, il reste que «l’accusation dans son fond reste fondée», a relevé la cheftaine du parti qui en veut pour preuve le fait que le tribunal de Milan (Italie) «soit toujours sur le dossier». Néanmoins, Hanoune qui dit ne reprendre par ses déclarations qu’un fait révélé à l’opinion publique, ne peut pas aller jusqu’à «s’immiscer dans les affaires de la justice, seule habilitée à prendre des décisions sur ces affaires», a-t-elle précisé.
Dans ce sillage, elle a mis en garde les responsables politiques quant au silence «trompeur» du peuple, mais dont la «colère latente» en dit long sur sa position par rapport à ces questions, a laissé entendre la même responsable. Revenant sur le scandale du «Panama Papers», Hanoune a laissé libre cours à une multitude d’interrogations sur les tenants et les aboutissants de cette affaire. Avant de trancher, au PT, «nous voulons comprendre d’abord», a-t-elle fait savoir, avant d’évoquer peu après le cas de Bouchouareb, cité comme étant impliqué dans ce dossier touchant à plusieurs personnalités du monde entier parmi lesquelles figurent des chefs d’États. À ce titre, elle affirme, d’emblée, qu’il y’a un parti pris dans ce scandale. En effet, elle se demande à qui profite bien cette affaire «faisant délibérément fuir des tas de données», ou encore, «qui a ordonné la publication des ces infos ?, pourquoi maintenant? ». Telles étaient les questions qui lui font dire qu’il y’a bien anguille sous roche et des non-dits qui restent à connaître. Ceci, d’autant plus et comme par hasard, aucune personnalité américaine, juive et autre, n’a été citée dans ce scandale, a-t-elle fait remarquer. Ceci l’amène à croire, donc, qu’il s’agit d’une campagne concoctée par les puissances occidentales et les partisans du capitalisme, «à l’origine déjà du chaos et du contexte marqué par des crises multidimensionnelles prévalant dans plusieurs pays», a-t-elle accusé. Mais, cela n’empêche tout de même pas «la blanchiment des personnalités impliquées dans les scandales financiers», allusion aux affaires judiciaires impliquant des responsables algériens, a-t-elle précisé.
Farid Guellil
Hanoune critique la visite de Manuel Valls
D’autre part, Louisa Hanoune a commenté la visite du premier ministre français, Manuel Valls, hier à Alger, à la tête d’une délégation importante de son gouvernement. Tout en considérant que l’Algérie n’a tiré aucun profit des partenariats conclus avec la France et dans le cadre de l’Union européenne. Intervenant dans un contexte de tensions entre Alger et Paris, le voyage du staff gouvernemental français ne vise que «le sauvetage des entreprises de ce pays», a-t-elle estimé. Pour elle, le fait que la France et de nombreux autres pays de l’Europe s’enlisent dans une crise économique, en dit long sur l’objet de cette visite. «L’Algérie est-elle au courant de cet état de fait?», a-t-elle mis en garde. Certes, pour elle, si la France est en quête de rafler les marchés dans le pays est en soi «un droit», il n’en demeure pas moins que l’Algérie ne doit pas accepter d’aller au secours de l’économie française. Toujours dans le même ordre d’idée, Hanoune appelle à privilégier «la préférence nationale», à même d’arriver à un partenariat «gagnant-gagnant». Ce qui n’est malheureusement pas le cas, à l’heure actuelle, a conclu la SG du PT.
F. G.