Le vieux bâti de la ville d’Alger connait actuellement une vaste opération de restauration initiée par les pouvoirs publics. En plus des déclarations des officielles, des experts et des urbanistes se sont également exprimés sur cette initiative. Le vieux bâti d’Alger, dont les immeubles de la Place des Martyrs et du Boulevard Zighout Youcef, nécessitant une réhabilitation, doivent avoir un carnet de santé et d’entretien, a estimé l’expert architecte Abdelhamid Boudaoud. De nombreux immeubles datant de la fin du 18ème, 19ème et 20ème siècles, situés dans la ceinture urbaine de Larbi Ben M’hidi, Zighoud-Youcef, Colonel Amirouche, Mohamed-Belouizdad, Mohamed V, Krim-Belkacem et Didouche-Mourad font actuellement l’objet d’une opération de réhabilitation. «Tous doivent disposer d’un carnet de santé», relève l’expert. Dans la wilaya d’Alger, il n’y a pas que le centre historique qui doit être réhabilité. D’autres quartiers anciens comme Sidi M’hamed, Hussein Dey, El Harrach et surtout Bab El Oued comptent des immeubles construits selon des styles architecturaux particuliers de leur époque, et donc renferment une forte symbolique politique et culturelle, sociale. A Belouizdad, «dans Laâquiba, la colonisation a construit ce quartier de telle manière que toute contestation peut être rapidement étouffée. Les architectes de la colonisation ont tout simplement pris pour exemple les événements de la Commune de Paris pour concevoir l’ancien quartier de Belcourt, toutes les voies du quartier peuvent être dés lors bouclées par la police», explique cet urbaniste. Mais, le temps ayant commencé à faire son oeuvre sur le vieux bâti algérois, «ces quartiers, qui renferment en fait l’histoire européenne d’Alger, nécessitent d’être sauvés de la dégradation et bénéficier d’un traitement adéquat», selon Abdelhamid Boudaoud. Plus concrètement, la prise en charge du vieux bâti à Alger «commence par une analyse puis un diagnostic du bâti, qui doivent aboutir à l’établissement d’une fiche servant de base à l’élaboration d’un carnet de santé de ces structures urbaines, afin de déterminer les besoins d’entretien, qui font aussi l’objet d’un carnet spécifique», relève cet expert. Pour lui, «la réhabilitation n’est pas conjoncturelle et ne concerne pas que les façades et doit se renouveler périodiquement pour chaque composante de la bâtisse, de l’immeuble ou de la structure urbaine: tous les 20 ans pour la plomberie, 15 ans pour l’électricité, 10 ans pour la peinture et 25 ans pour la menuiserie (portes et fenêtres)». «Tous ces éléments sont susceptibles de redonner sa qualité au vieux bâti, qui a une importance historique», explique t-il, ajoutant qu’outre la réhabilitation, les experts peuvent proposer le confortement pour stabiliser l’immeuble ou la démolition partielle ou totale. Après démolition, «les matériaux nobles comme la céramique, le marbre, le carrelage et la ferronnerie ou simplement les pierres peuvent être récupérés et réutilisés dans l’entretien des anciennes bâtisses. Ce sera autant de matière première originelle». Selon M. Boudaoud, c’est la seule manière de sauver les édifices situés à l’intérieur du périmètre urbain d’intervention dans le cadre du plan de modernisation de la ville d’Alger, matérialisé par la transversale allant du Palais du dey à Port-Saïd, d’El Aurassi au siège de la wilaya. De vieilles mosquées, des hôtels particuliers, des palais de justice, des théâtres et même des gares sont situés à l’intérieur de ce périmètre qui n’abrite pas seulement des immeubles d’habitations, et qui risquent de s’effondrer en l’absence d’une prise en charge adéquate. «Cela a été le cas pour une partie des murs du Palais consulaire au Boulevard Frantz Fanon, sur le front de mer, près de la Grande Mosquée», a prévenu M. Boudaoud. Selon le président de l’APC d’Alger-Centre, Abdelkrim Bettache, quelque 1 800 immeubles nécessitent une réhabilitation dont près de 30% requièrent une restauration en profondeur. Cinq milliards de dinars ont été dégagés pour la restauration et la réhabilitation de ces immeubles pour plusieurs communes du grand périmètre urbain d’Alger dans le cadre de la première étape d’un vaste programme de sécurisation des habitations et de protection du patrimoine architectural, qui ne s’achèvera qu’en 2029. Par ailleurs, Smaïl Loumi, directeur du logement de la wilaya d’Alger avait annoncé que d’autres opérations seront lancées à travers d’autres communes pour la réhabilitation des différentes structures urbaines de près de 59 000 logements, notamment le ravalement des façades, l’étanchéité des terrasses et la restauration des parties communes. Alger abrite un grand nombre de bâtiments d’un patrimoine national estimé à plus de 1,9 million de logements construits avant l’indépendance, soit 27% du parc immobilier global évalué à 7,2 millions de logements, selon le ministère de l’Habitat, de l’Urbanisme et de la Ville.