Le port du masque par les commerçants est obligatoire à partir d’aujourd’hui, selon les récentes instructions du ministre du Commerce, Kamel Rezig, alors que des wilayas comme Constantine et Tipasa ont commencé déjà l’application de cette mesure. Cette mesure pourrait être généralisée à tous les citoyens. Sur ce, les Algériens sont partagés entre ceux qui anticipent par souci de sécurité et d’autres qui baignent encore dans l’insouciance. Au chef-lieu de Boumerdès, à 45 kilomètres d’Alger, dans le marché municipal et les centres commerciaux, le port du masque est presque déjà de mise. Les bavettes de protection couvrent pratiquement toutes les bouches. La mesure est très stricte : « le commerçant doit choisir entre le port du masque de protection ou la fermeture », a mis en garde le ministre Rezig, depuis la wilaya d’Oran. Certains commerçants et marchands ne tolèrent pas l’entrée de clients sans porter de masques, comme l’attestaient les affiches collées aux devantures de leurs magasins. Alors qu’ils ont estimé dans un premier temps que le masque médical devait être réservé au personnel hospitalier et qu’ils ne protégeait pas le reste de la population, les professionnels de la Santé ont conclu récemment que le port du masque médical réduisait de façon significative le risque de transmission du coronavirus par la toux ou par la simple respiration. Ainsi que le Comité scientifique de suivi de l’évolution du Covid-19 a recommandé au gouvernement que le port de masque soit rendu obligatoire. L’imposition de cette mesure a impliqué la satisfaction de certains citoyens et la colère chez d’autres. Les stocks en masques et bavettes de protection médicale font face à de grandes pénuries. « Je pense que la décision des ministres de la Santé et du Commerce de généraliser le port des masques est un petit peu exagérée. Il faut se rendre à l’évidence, même pour nous, en première ligne de lutte contre le Covid-19, il est difficile d’obtenir et d’utiliser une bavette chaque jour. Des citoyens nous demandent toujours quand les masques seront disponibles. Mais nous n’en savons rien ! », nous a expliqué une propriétaire d’une pharmacie. « Les citoyens n’ont pas toujours les moyens pour acheter un masque à chaque fois qu’ils se rendent dans une boutique ou un espace commercial. Il faut savoir aussi que les masques sont ces jours-ci au centre d’une horrible surenchère commerciale. Les prix des bavettes simples, par exemple, ont triplé de 20 DA l’unité jusqu’à 70 ou 80 DA », nous a souligné, M. K, étudiant en médecine. « De plus, certains citoyens n’ont même pas de quoi acheter un sachet de lait. Alors comment ferait-il pour s’offrir un masque ? Il est illogique qu’un vendeur interdise l’accès de son magasin à un client sous prétexte qu’il n’a pas de masque ! À mon sens, c’est à l’État de veiller à la disponibilité gratuitement de ces masques à l’entrée des magasins et grands espaces ! », poursuit-il. Le ministre de la Santé a affirmé que l’obligation de port du masque n’est pas à écarter, « à condition bien sûr qu’il y ait aussi disponibilité de bavettes en quantités suffisantes ». En attendant d’avoir suffisamment de stocks, le ministre a recommandé aux citoyens qu’ils devaient plutôt utiliser les « gestes barrières » comme se laver les mains ou tousser dans son coude. Par ailleurs, il faut dire, selon les constats faits sur terrain, que la mesure de port de masque n’est pas respectée de la même façon dans toutes les communes de Boumerdès. Plus on est loin du chef-lieu de la wilaya, plus l’insouciance des citoyens est plus perceptible. Cela est peut-être dû au fait que les autorités de la wilaya ne se sont axése que sur les grandes villes pour animer des campagnes de sensibilisation quant au respect des mesures de protection. L. N, un retraité et résidant de la commune de Chabet-el-Ameur, estime, pour sa part, que les Algériens doivent anticiper par sécurité, plutôt que d’attendre que des mesures plus drastiques ne se mettent en place. « Sans une véritable prise de conscience des citoyens, aucune mesure, aussi restrictive soit-elle, ne connaîtrait de succès et stopperait la hausse des contaminations », pense-t-il, mais insistant que «l’État doit quand-même rendre disponible les masques avec des prix réglementés dans les pharmacies ». Une autre image regrettable dans la wilaya de Boumerdès : des cafés continuent à travailler clandestinement malgré les mesures de fermeture, et sans égard aux mesures de sécurité.
Hamid Mecheri